Comme un mauvais remake d’un film raté, mais avec une redoutable agressivité, elle a submergé l’Europe. En février dernier, nous nous sentions plus ou moins au-dessus d’une crise qui, puisqu’elle concernait l’Extrême-Orient, n’aurait pas dû nous toucher. Mais en octobre, pas d’excuse: nous étions dument averti·es. Hélas, elle ne nous a pas loupé·es.
Ce qui a changé par contre cet automne, c’est l’approche choisie par les responsables politiques nationaux et cantonaux. Le premier confinement, pourtant admiré par nos voisins en raison de son caractère équilibré, n’a pas été reconduit. Dans les écoles, les craintes de fermeture ont été de courte durée. Cette fois-ci, nous étions appelé·es à rester fidèles à nos tableaux noirs (ou blancs), et à assumer notre enseignement de notre mieux, avec lavage des mains, désinfection des surfaces et port du masque pendant les leçons.
Les premiers bilans des expériences vécues ce printemps ont révélé des résultats inquiétants. Certes, un immense effort a été fourni, à tous les étages de l’organisation scolaire, pour équiper les élèves d’outils numériques et organisationnels afin de soutenir leur suivi pédagogique à domicile. Pour une partie de ces enfants, cette expérience a été positive. D’autres en sont ressorti·es mitigé·es. Mais pour certain·es élèves, cette expérience s’est révélée difficile.
Vague à l’âme
Notre société se développe de manière très rapide vers une numérisation qui concerne tous les aspects de notre vie quotidienne. L’école a pris un très gros retard dans ce domaine, et des réflexions intenses sont menées pour intégrer ces nouveaux paramètres dans le cursus des apprentissages. Mais le choc et la rapidité du confinement ont mis en lumière, de manière évidente, le fait que la machine ne peut pas remplacer l’humain, encore moins pendant les années cruciales et décisives de l’enfance. Nous devons absolument faire évoluer l’école pour éviter que le fossé numérique ne devienne infranchissable pour les moins favorisé·es de nos élèves. Certes.
Mais il y a urgence aussi de redécouvrir la richesse de l’échange personnel, sans écran interposé, de faire de l’école un lieu où l’on a le temps de rêver, de s’exprimer, d’écouter l’autre, d’évoluer à son propre rythme.
Nous confions nos enfants, pendant onze années, à l’institution scolaire. C’est une longue période. Et si nous, les enseignant·es, nous parvenions à nous libérer un peu de la cadence effrénée imposée par notre société ? consumériste et digitalisée afin d’offrir à nos élèves un espace de sérénité? Un peu de silence, quelques minutes pour tout oublier et se plonger dans… un bon livre ?