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Démocratie, où es-tu ?

Soumis par Pierre-Alain Porret le 20 mai 2022
(pixabay)

La France vient de réélire son président, pour cinq années supplémentaires. Avec une certaine réticence, de la frustration, voire même de la colère chez certain·es. De nombreux·ses enseignant·es sont dans cette frange de la population qui s’est sentie délaissée par un pouvoir néolibéral et tendu vers les relations extérieures plus que vers les soucis de tout un chacun. Alors le populisme a refait surface, de plus belle. On a ainsi, par exemple, pu voir un Éric Zemmour faire mine d’écouter gravement les problèmes d’un collectif d’enseignant·es. Tout cela laisse plus que songeur …

Au moment de la proclamation des résultats provisoires, nul triomphalisme. Les vaincus·e applaudissaient leur victoire. Le vainqueur se faisait humble, presque gêné d’avoir été réélu. Comédie ou prise de conscience ? L’avenir le dira très vite probablement. Il n’était pas inintéressant, au-delà des coups de griffes échangés entre personnalités politiques, d’entendre des voix divergentes. À droite ( Robert Ménard, maire de Béziers ), au centre ( Luc Ferry, philosophe, ancien ministre de l’Éducation nationale ) et à gauche ( Daniel Cohn-Bendit, ancien député européen ), quelques-uns osaient sortir du pugilat habituel, scénographie politique convenue et stérile, où tout le monde considère avoir raison et refuse d’écouter l’autre.

Il faut, selon ces francs-tireurs, « rouvrir le débat politique », « construire une démocratie délibérative de négociation et de compromis », accepter la « nécessité de travailler ensemble, de se parler entre personnes de bords politiques différents », sortir des « scrutins majoritaires injustes », cesser la « diabolisation » de ses ennemis politiques, qui produit « une société fracturée par la haine ».

Et chez nous ? On y vit bien, certes. Nous avons l’inestimable privilège de bénéficier de structures politiques proches des gens, d’outils démocratiques permettant à chaque citoyen·ne de se prononcer très régulièrement sur tous les sujets importants, à tous les niveaux, communal, cantonal, fédéral. Nos systèmes scolaires aussi fonctionnent très largement sur un mode consensuel, où le dialogue professionnel est constant entre les divers partenaires de l’école. Les enseignant·es réfléchissent ensemble avec leurs directions, même si toutes ne sont pas toujours très à l’écoute. Les syndicats travaillent sur de nombreux dossiers dans lesquels ils sont amenés à donner leur avis et à présenter des pistes de réflexion. Au niveau romand et fédéral, nos faitières syndicales se font entendre par les autorités et par les médias.

Alors ? Sommes-nous beaucoup mieux lotis que nos voisins hexagonaux ? On peut vraiment le considérer. Toutefois, gardons-nous de tout triomphalisme. Les dérives que nous observons juste au-delà de la frontière existent aussi chez nous. Et la tendance à l’individualisme et au désengagement de la réflexion collective et politique nous menace aussi.

« La démocratie est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres », a écrit un jour Winston Churchill. On pourrait aussi y ajouter : « La démocratie ne s’use que si l’on ne s’en sert pas. »

Notre société fait face à de nombreux défis, et ils ne vont pas disparaitre du jour au lendemain. Autorités scolaires et enseignant·es devront les relever en commun. Ne restons donc pas seul·es dans nos classes. Unissons-nous, participons ensemble, dans l’écoute et le respect mutuel, à la recherche des meilleures solutions pour préparer nos élèves à construire le monde de demain. C’est, plus que jamais, nécessaire.

Publié le
ven 20/05/2022 - 00:04
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