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Plus de protection pour les apprenti·es

Soumis par SAEN le 23 décembre 2022
image d'illustration (wikimedia)

Une initiative cantonale pour une meilleure protection des apprenti·es a été lancée il y a maintenant  deux mois. Elle demande des contrôles non annoncés et réguliers sur le lieu de travail, une meilleure formation de base sur les droits des apprenti·es et le droit du travail avec la participation des partenaires sociaux, une augmentation du nombre de conseillers et conseillères en formation professionnelle (CFP) et une formation des formateur·trices en entreprise aux problématiques des apprenti·es, plus particulièrement sur le harcèlement et les violences physiques ou psychologiques.

Comme le canton cherche à atteindre une part de 85% des apprentissages en formation duale ( c’est-à-dire en entreprise avec des cours dans une école professionnelle), il semble évident et nécessaire que le système en place doit devenir plus sécurisant pour les apprenti·es.

Des récits d’apprenti·es et ancien·nes apprenti·es neuchâtelois·es se rejoignent pour attester d’expériences malheureusement négatives :

«J’étais quelqu’un de relativement calme, aujourd’hui je suis quelqu’un de très nerveux, de très anxieux (... ), je sentais que je commençais à avoir des montées de stress que je n’avais jamais eues avant.»

«Bien que je sois un employé de l’entreprise, ils ne me considéraient pas comme un collègue, ils me voyaient juste comme «l’apprenti». ( ...) mon expérience définissait le respect qui m’était dû.»

«Un client m’a demandé si ça ne me gênait pas qu’il me drague et si je pouvais m’habiller de manière plus féminine.»

Ces témoignages mettent en lumière le manque de contrôle des conditions de travail des apprenti·es, démuni·es face aux potentiels abus. La peur de perdre sa place prend alors souvent le pas sur la nécessité de dénoncer chaque cas particulier.

Vous pouvez soutenir cette initiative en la téléchargeant ICI ou en commandant des feuillets au 079 811 06 17.

Philippe Vaucher


Témoignages

Katie*, 17 ans

Je suis apprentie en 2e année dans un métier de la santé. Malgré mes bonnes notes à l’école, je suis actuellement en arrêt de travail, pour épuisement professionnel. J’ai des insomnies, des tendances boulimiques, et j’ai développé un exéma nerveux sur le crâne.

Mal encadrée sur mon lieu de formation, je subis des pressions constantes, car on me fait souvent faire le travail d’un·e diplômé·e (absent·e) alors que je ne suis qu’une apprentie. J’ai des horaires de travail variables, ce qui me fait des heures supplémentaires, que mon patron ne me redonne pas forcément. Il rit quand je lui pose la question, il dit que ces heures font partie de mon travail, et que je ne les récupèrerai pas.

Il me fait également du chantage, m’octroyant mes vacances d’été uniquement si je ne tombe pas malade.

J’ai peur d’en parler à mes parents, car si mon patron me met à la porte, je ne suis pas certaine de trouver une nouvelle place pour poursuivre mon apprentissage.

Yann *, 21 ans

J’ai fait un apprentissage dans le domaine de la construction. Mon patron me reprenait souvent: «Tu ne sais pas faire ça?!», «Mais fais comme ça!», «T’es vraiment un bon à rien ma parole…» Cela m’a beaucoup déstabilisé, moi qui manquais déjà de confiance en moi. Mes parents ont demandé des entrevues, durant lesquelles il promettait des choses, puis me le faisait payer ensuite, en me rabaissant encore plus.

J’ai fini par abandonner cette formation (qui me plaisait pourtant, et pour laquelle j’avais de très bonnes notes à l’école). Je n’ai pas pu trouver d’autre place, car mon patron était très influent dans son milieu et a desservi ma cause en me rabaissant encore auprès de potentiels employeurs.

J’ai finalement repris des études au lycée: le monde de l’apprentissage est trop rude et injuste.

Amélie *, 18 ans

J’ai terminé l’école obligatoire et j’ai pris l’option de faire un stage pour voir si un apprentissage pourrait me plaire. La patronne, quand elle a su que j’étais dyslexique, m’a immédiatement renvoyée chez moi, ne me laissant aucune chance de prouver ma valeur.

Mon premier patron d’apprentissage m’employait pour des travaux de rénovation dans son propre appartement, alors que je n’étais ni apprentie peintre, ni apprentie maçonne.

Quand nous partions travailler à l’extérieur, il lui arrivait de me déposer dans un village inconnu, avec une échelle. Je devais trouver seule un abri pour me protéger des intempéries à midi, en mangeant froid, évidemment. Puis il me laissait me débrouiller pour rentrer par mes propres moyens, en transports publics, toujours avec mon échelle.

Finalement, nous nous sommes mises à plusieurs pour nous plaindre à l’Office des apprentissages, qui a bien dû constater que depuis des années, aucune des apprenties de cette entreprise ne réussissait sa pratique.

Myriam Facchinetti

*prénoms fictifs (pour des situations ayant réellement existé)

Publié le
ven 23/12/2022 - 00:03
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