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Dualiser n’est pas jouer

Soumis par Laurent Feuz le 25 janvier 2019
M. Laurent M. Feuz, chef du SFPO du canton de Neuchâtel

L’article « Apprentissage dual : le bonjour d’Émile... » paru en novembre, a suscité une réaction du chef du service des formations post-obligatoires à qui nous avons volontiers offert la possibilité de préciser ici les contours du nouveau mécanisme soutenu par le Conseil d’État.
Le SAEN promeut depuis toujours la formation professionnelle. On aurait même aimé que sa part soit plus significative et qu’il n’y ait pas eu besoin de faire appel à Émile Coué.
On ne peut toutefois espérer susciter un mouvement de bascule de la formation en écoles vers la formation professionnelle que si celle-ci n’est plus perçue comme un second choix, un pis-aller. Cela signifie notamment que la palette des métiers doit rester vaste et variée; or, la tendance nous semble être à sa réduction. (pg)

Depuis bientôt 10 ans, le canton de Neuchâtel s’attache à promouvoir la formation professionnelle auprès de plusieurs publics pour lui rendre ses lettres de noblesse car malheureusement, la formation professionnelle paye encore un lourd tribut de son déficit d’image. En Suisse romande, le courant d’influence venu de nos voisins français façonne singulièrement les représentations que la société se fait de la formation qui suit l’école obligatoire. L’école à plein temps est encore perçue comme étant un genre de must, un graal absolu assurant succès et bonheur.

Si notre système de formation est envié du monde entier, c’est parce qu’il offre des portes d’entrée à tous les profils et qu’il permet une insertion rapide sur le marché du travail ou dans des écoles subséquentes. Un autre atout majeur qui le caractérise est la possibilité de réaliser des passerelles certes exigeantes, mais jamais utopiques. À l’approche de ce système, il s’agit donc d’accumuler des informations (salon des métiers), des connaissances (cours d’éducation au choix) et des expériences (sous forme de stages) en vue de faire un choix de formation éclairé. L’accompagnement de cette phase d’approche fait définitivement partie des missions éducatives qui sont partagées. Il s’agit donc de poursuivre avec conviction non pas une promotion aveugle de la formation professionnelle en tant que dogme, mais une véritable sensibilisation aux qualités de notre système de formation.

La formation professionnelle mène non seulement vers le marché du travail – a fortiori lorsqu’elle est accomplie en mode dual – mais vers toutes les formations du domaine tertiaire. Et ce n’est pas faire allégeance à Émile Coué1 que d’affirmer que des parcours impressionnants par leur dynamique et leur réussite ne sont pas rares dans la voie professionnelle. Si la voie générale est la voie royale, la voie professionnelle est la voie impériale puisqu’après l’obtention d’un CFC, c’est non seulement le monde professionnel qui s’ouvre, mais aussi toutes les écoles subséquentes.

Dans un système tel que celui que nous connaissons, il convient cependant de prendre soin des articulations. Les transitions sont en effet des moments « névralgiques » et c’est dans ces transitions que l’État doit assumer ses tâches régaliennes dans l’esprit d’accompagner les plus fragilisés. Le système d’accompagnement mis en place depuis quelques années dans le canton de Neuchâtel est certainement perfectible, mais il offre la possibilité à tout jeune qui se trouve en situation délicate lors de cette transition de bénéficier d’un accompagnement ciblé et personnalisé.

Cette première transition est essentielle, mais d’autres filets existent tout au long de la formation pour éviter que des jeunes « sortent du système » et se retrouvent dans des situations précaires. Le processus volontariste mené dans le canton de Neuchâtel depuis 10 ans visant à promouvoir la formation professionnelle n’a donc rien de la « Chronique d’une catastrophe annoncée » 2 car le monitorage des situations particulières est effectué avec beaucoup de soin. Aujourd’hui, ce qui nous importe et nous motive, ce n’est pas d’ergoter sur des pourcentages, mais c’est d’offrir à chacune et à chacun la possibilité de s’insérer dans une formation au sein de laquelle elle ou il peut s’épanouir et obtenir une certification lui permettant grâce au bagage acquis de trouver place sur le marché du travail ou de poursuivre des études. Notre satisfaction est de permettre à la relève de notre canton de devenir des citoyens insérés et si possible heureux d’être là où ils sont… et pas de réaliser des économies !!!

Laurent M. Feuz, chef du service des formations postobligatoires et de l’orientation du canton de Neuchâtel

1 En référence à l’article de M. Pierre Graber « Apprentissage dual : le bonjour d’Émile... » in Educateur 10 l 2018.

2 ibid.

Publié le
ven 25/01/2019 - 17:54
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