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Informatique scolaire : les leçons du Covid…

Soumis par Pierre-Alain Porret le 22 mai 2020
un smartphone (photo : Kon Karampelas)

A la mi-mars, en l’espace d’un week-end, toutes les écoles de Suisse se sont retrouvées dans l’obligation d’imaginer un suivi pédagogique pour leurs élèves confinés à la maison. Personne ne s’y était réellement préparé, ni ne l’aurait sérieusement imaginé il y a peu encore. Pour les services informatiques de l’État de Neuchâtel, le défi était immense. En 48 heures, il a pourtant été possible d’activer une adresse électronique pour chaque élève et d’ouvrir les accès à Pronote à toutes les familles.

Dès la première semaine, dans un formidable élan, les enseignants se sont attelés à la tâche de préparer du travail scolaire jusqu’aux vacances de printemps et d’assister les familles, à distance, dans leur découverte de ce nouveau fonctionnement. Là aussi, la disponibilité a été admirable, et les résultats souvent magnifiques.

Très vite, toutefois, les difficultés sont apparues. Beaucoup de familles ne sont pas à l’aise avec l’informatique, ont peu de temps à y consacrer, ne possèdent pas d’ordinateurs ou ont des problèmes de connexion. Si les ados sont relativement à l’aise avec l’ordinateur, les enfants, eux, le sont nettement moins.

Et c’est à ce moment-là qu’est apparue clairement une réalité : aujourd’hui, l’appareil utilisé par toutes et tous, c’est vraiment le smartphone, avec ses applications répandues massivement, WhatsApp en particulier. Son accessibilité quasi universelle en a fait très rapidement une application phare pour des milliers de classes. Toutefois, et la petite histoire ci-dessous l’illustre, la question de la protection des données est sensible. Elle a été mise de côté l’instant d’une crise, mais il faudra urgemment s’y pencher.

Peu à peu, la crise sanitaire va se calmer, et nous allons retrouver nos bonnes vieilles habitudes… Va-t-on tirer quelques leçons de cette crise ?

Permettez-moi de rêver : Et si les cantons romands (voire suisses) s’unissaient résolument pour acquérir ou développer une gamme d’applications sécurisées et adaptées aux besoins de notre école, que ce soit pour la communication ou pour des besoins pédagogiques, afin de les mettre à disposition de l’ensemble de la population scolaire, adultes et enfants, enseignants et responsables ?


Petite fable informatique

Ou quand un enseignant féru d’informatique s’interroge sur la subtilisation de nos données par les géants du web…

C’est drôle mais pas marrant...

En 2004, un petit gars dans une université américaine a eu l’idée de créer un truc informatique lui permettant de noter les filles sur leur physique.. Le narcissisme et l’exhibitionnisme d’une population estudiantine insouciante aidant, le succès fut fulgurant. Les annonceurs, alléchés par l’opportunité de faire de bonnes affaires, s’y intéressèrent rapidement.

Quelques années plus tard, le même petit gars racheta à deux autres petits gars leur application révolutionnaire proposant un service de messagerie en ligne via les téléphones portables. Ces deux petits gars avaient juré-craché que leur application ne se financerait jamais via la publicité. Alors le premier petit gars mit plus de 19 milliards de dollars sur la table et les deux autres petits gars devinrent très riches.

Quelques années plus tard encore, le premier petit gars se trouva à la tête d’un empire mondial comptant plus de 2.5 milliards d’utilisateurs actifs par mois. Sa valorisation boursière s’éleva fin 2019 à plus de 500 milliards de dollars. Et tout cela en proposant des services gratuits, sans produire ou vendre aucun bien de consommation. On appelle cela « un réseau social ». Elle n’est pas belle la vie ?

Bien sûr, des esprits chagrins ont bien tenté de s’opposer au petit gars en arguant que son modèle d’affaire ne respectait pas la protection des données. Il a même dû en répondre devant les plus hautes autorités de son pays. Il a été condamné et a payé de lourdes amendes. Les mêmes esprits chagrins ont aussi allégué que les services du petit gars avaient faussé l’élection présidentielle de 2016 aux USA ou le Brexit en 2018.

Tout cela n’empêche pas les affaires du petit gars de prospérer. Il a vieilli, s’est mis en couple et se retrouve en 2020 à la 7ème place du classement Forbes des milliardaires, avec une fortune personnelle estimée à 54.7 milliards de dollars. Le business du gratuit se porte bien.

En cette période d’école à domicile, le service de messagerie instantanée du petit homme est considéré par beaucoup comme « l’outil le plus efficace pour toucher toutes les familles, en particulier les plus défavorisées ». Oui, mais à quel prix ? Si c’est gratuit, c’est toi le produit !

Publié le
ven 22/05/2020 - 17:40
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