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Une stratégie cantonale en matière de formation des adultes : une nécessité

Soumis par Pierre-Alain Porret le 24 avril 2020
Photo : Benjamin Starostka Jakobsen (Unsplash)

Donnant suite à la motion du groupe socialiste au Grand Conseil du 26 mars 2018, le Conseil d’État a élaboré un rapport sur la formation continue dans notre canton, et propose de modifier la loi de 2005 s’y référant. Dans la foulée, il est demandé au législatif d’adopter un décret portant octroi d’un crédit d’engagement d’un montant total de 1'320'000 francs pour le programme cantonal d’encouragement de l’acquisition et du maintien des compétences de base chez les adultes, pour la période 2021-2024.

Comme de nombreux autres partenaires économiques et sociaux, le SAEN a été consulté récemment sur ce rapport.

On y constate tout d’abord que le système de formation neuchâtelois permet à 90 % des jeunes d’obtenir un titre du secondaire 2, professionnel ou académique. C’est un fait réjouissant. Toutefois, chez les plus de 25 ans, la proportion de personnes formées diminue (72 %), d’une manière plus marquée que la moyenne suisse (78 %). Et c’est là, chez les personnes nouvellement arrivées chez nous, ou installées depuis plus longtemps, mais sans formation de base solide, que se situe tout l’enjeu de cette problématique.

Sans surprise, on déplore que les personnes les moins formées sont les plus pénalisées lorsqu’il s’agit de se former sur le tard. Souvent, elles ont des lacunes importantes dans les trois compétences de base (français, mathématiques et utilisation des technologies de communication). A cela s’ajoute la plupart du temps des besoins dans les « compétences douces » (savoir-être : autonomie, confiance en soi, esprit d’équipe, écoute de l’autre, soif d’apprendre…).

Du côté des employeurs, on observe des réticences à financer des formations de base, considérées comme peu rentables économiquement. Ainsi, le prix des cours, la charge de travail, le risque de surmenage, le manque de confiance en soi, les obligations familiales et même les traditions culturelles ou les préjugés sociaux empêchent beaucoup d’individus pourtant motivés au départ de finaliser leur formation.

Il est pourtant unanimement reconnu que l’accès aux compétences de base est un puissant moteur de confiance en soi, permettant d’accéder à des emplois plus sûrs et mieux rémunérés, d’échapper au licenciement, au chômage et à la précarité. Toutes les études montrent d’ailleurs que cet investissement est rentable à moyen et à long terme, pour les individus, les entreprises et les collectivités.

Hélas, il faut admettre que la pression de la concurrence et la nécessité du profit immédiat font obstacle aux investissements des entreprises dans la formation continue de base. D’où un certain désintérêt pour ces filières, tout en en reconnaissant les bienfaits à plus long terme. Pourtant, une population mieux formée est un réservoire de main d’œuvre qualifiée, et c’est un atout économique non négligeable.

Ainsi donc, et tout particulièrement dans le domaine des quatre compétences de base citées plus haut, un engagement résolu des collectivités, communes et cantons, est nécessaire. C’est une responsabilité importante de la société tout entière de soutenir les personnes les plus fragiles. Le rapport considère que l’État devrait financer au moins les personnes qui visent leur premier titre de formation professionnelle, mais aussi encourager la formation tout au long de la vie.

Nous soulignons aussi que si ce texte ne parle que de la formation des employé·es, il est évident que les besoins sont eux aussi importants parmi la population sans emploi, particulièrement chez les femmes au foyer d’origine étrangère, pour lesquelles d’importants efforts devraient être consentis.

Le SAEN ne peut que déplorer la contradiction flagrante entre les conclusions limpides de ce rapport et la décision de fermer le CEFNA2 faisant suite à celle d’abandonner le secteur « compétences de base ». Il appelle donc le Grand Conseil à adopter ce projet, mais aussi à exiger du Conseil d’État que ce type de formation soit renforcé au sein des écoles professionnelles. 

1 Le titre est aussi celui du rapport soumis au Grand Conseil
2 Centre de formation neuchâtelois pour adultes.

Publié le
ven 24/04/2020 - 09:06