Durant des décennies, assurer la protection juridique des profs semblait à certain·es aussi pertinent que de couvrir le risque d’inondation au Sahara ! Les compagnies d’assurance adoraient offrir leurs services aux enseignant·es. Mais c’est désormais de l’histoire ancienne. La statistique des montants pris en charge par l’assureur du SAEN lors des douze dernières années est éloquente.
En 2009, lors de l’établissement de son offre, l’assureur s’est manifestement basé sur des statistiques ou une évaluation qui considéraient les enseignant·es comme de «bons risques», susceptibles de dégager une rentabilité satisfaisante.
Cela s’est vérifié durant quelques années (également dans les nombreux cantons partageant le même contrat) avant de se dégrader progressivement…
Aux causes sociétales, dues à l’évolution des esprits que l’on observe partout en Occident, s’ajoute une spécificité neuchâteloise : si l’on excepte les deux premières années (2012-2013), on distingue clairement une corrélation entre la mise en place de la régionalisation de l’école obligatoire neuchâteloise et les charges de protection juridique de nos membres. La multiplication des cas concernant les cycles 1 et 2 (l’école primaire) depuis leur intégration au système du secondaire en est l’illustration.
On peut certes voir dans ces attaques contre l’école et les enseignant·es une dérive «à l’américaine» conduisant toujours davantage de familles à contester les conditions de formation dont leur enfant bénéficie. De la même façon que lors de la pandémie, où beaucoup ont cru pouvoir s’exprimer avec la même autorité que les épidémiologues, un nombre croissant de parents s’estime légitimé à juger de la prestation des enseignant·es, voire même de la manière dont ils·elles devraient pratiquer leur métier.
A l’opposé, on constate aussi que certains parents compensent leur «absence» à la maison (et la frustration qui l’accompagne) par des exigences accrues à l’égard de l’école, ainsi qu’une surprotection de leur progéniture.
Dans plusieurs centres et cercles scolaires, des parents ont ainsi exploité l’autonomie locale des directions pour mettre des enseignant·es sous pression, les «dénonçant» et les accusant de ne pas prêter toute l’attention nécessaire à leur enfant, ou de ne pas suivre correctement (à leurs yeux) les exigences du plan d’études.
Durant l’essentiel de ma «carrière» d’enseignant, l’écrasante majorité de mes collègues considérait superflue une protection juridique professionnelle. Leurs successeur·es feraient bien de réviser rapidement cette appréciation. Plus personne ne peut s’estimer à l’abri, même l’enseignant·e pratiquant son métier avec les meilleures intentions et une conscience professionnelle irréprochable.
Face au manque d’implication de certaines autorités dans l’accompagnement et le soutien de leur corps enseignant, parfois même en cas de «coup dur», l’appartenance à votre syndicat s’impose comme une évidente nécessité !