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Cycle 3 : Placer l’élève au centre ou au milieu ?

Soumis par Pierre Graber le 20 septembre 2019
© Gianni Ghiringhelli

La mise en place de la réforme du cycle 3 a incontestablement constitué un sacré défi. Pour adopter le langage de notre époque, disons qu’il y a eu un changement de paradigme. Alors que les cinquante dernières années ont vu s’imposer une logique sélective à l’école secondaire avec des classes censées être toujours plus homogènes à la faveur des filières, on a subitement inversé l’approche en plaçant l’individu au centre.

Dans un canton viscéralement voué à la maîtrise des défis techniques, les initiateurs de la réforme se sont rapidement concentrés sur ses aspects mécaniques. Des procédures ont été imaginées permettant de gérer la répartition dans les groupes à niveaux. Avec cinq branches concernées [1], sans oublier les options académiques ou professionnelles, cela relevait de la quadrature du cercle. Et pourtant, la mission a été accomplie. Chapeau les artistes !

L’élément mobilisateur était la mise de l’élève au centre (de quoi?). On a donc isolé chaque enfant avec ses spécificités et on en a fait un consommateur face aux multiples étalages du supermarché scolaire.

Le hic, c’est qu’on a alors perdu de vue un aspect essentiel du développement des adolescent·es : l’appartenance à des groupes. Nous avons tous appris lors de nos études que leur vie sociale évolue sous un double mouvement d’émancipation de la tutelle parentale et de construction de nouvelles relations avec les pair·es. Dans ce bouleversement psychique, la présence des personnes de référence que sont les ami·es et les enseignant·es a toute son importance. L’atomisation de ces groupes, leur fragmentation contribue à bien des difficultés rencontrées par les enseignant·es.

C’est quand même un comble de voir une réforme conçue et pilotée par des pédagogues omettre un aspect aussi essentiel.
Il y a une vingtaine d’années, tout le monde se félicitait d’un embryon de réforme testée à La Chaux-de-Fonds pour les classes préprofessionnelles. Cela ne concernait que deux branches : le français et les maths… et pour une partie seulement de la dotation horaire, un·e enseignant·e accompagnait les « meilleur·es » des deux classes, l’autre s’occupant des autres, mais ça marchait ! Dans ce concept, la notion de groupe-classe subsistait, conservait son essence contrairement au canevas actuel.

Cette expérience concluante ne pourrait-elle pas réorienter la gestion actuelle ? Au lieu de placer l’élève au centre d’un trop riche éventail, si on le replaçait au milieu des autres, au sein de sa classe ?

Un nouveau défi ? Oui, mais qui devrait séduire les pédagogues égarés !

[1] Il y en a 4 au Valais, inspirateur de la solution retenue

Publié le
ven 20/09/2019 - 10:58
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