PARIS - Des chercheurs affirment que réduire le nombre d'élèves par classe a des effets bénéfiques sur la réussite scolaire bien que l'hypothèse inverse soit à l'étude au ministère de l'Education et continue à faire polémique.
Des documents internes au ministère dévoilés lundi révèlent que le ministère entend élaborer, avec les recteurs d'académies d'ici au 15 juin, un "schéma d'emplois 2011-2013" visant à supprimer des postes de professeurs.
Parmi les pistes de réflexion figure celle d'augmenter les effectifs par classe en primaire et au collège. Argument: les études récentes montreraient qu'une diminution du nombre d'élèves par n'aurait pas un effet "avéré" ou "probant" sur la réussite des élèves.
"C'est faux", a déclaré à l'AFP le chercheur Pascal Bressoux, qui dirige le laboratoire en sciences de l'Education de l'Université Pierre-Mendès-France de Grenoble.
"Les études montrent que la réduction de la taille des classes a un impact très significatif sur les acquis des élèves, par exemple, en français et en mathématiques, mais aussi sur les facteurs comportementaux: ils travaillent plus en cours", a-t-il expliqué.
Cet effet "joue plus à l'école primaire, un petit peu moins au collège et encore un peu moins au lycée", a-t-il ajouté.
"Il est toutefois vrai que ce n'est pas le seul levier sur lequel jouer pour améliorer la réussite scolaire: il y a aussi les pratiques pédagogiques", a-t-il relevé.
Thomas Piketty, professeur à l'Ecole d'économie de Paris et directeur d'études à l'EHESS, est l'auteur d'une étude publiée en 2006 par les services du ministère. "Je montrais qu'en primaire, on apprend mieux à lire et à calculer quand on est 20 au lieu de 25. C'est encore plus vrai pour les enfants de milieux défavorisés", a-t-il expliqué.
Interrogé dans les couloirs de l'Assemblée, Luc Chatel a affirmé que "la question des moyens n'[était] pas la réponse aux problèmes de l'Education nationale aujourd'hui".
"C'est une question d'organisation, d'efficacité du système", qui relève d'un travail "académie par académie, école par école à partir des besoins locaux", de sorte de "s'adapter à la diversité des situations que l'on rencontre".
Selon lui, il y a 700.000 élèves de moins en France qu'au début des années 1990 et 50.000 professeurs de plus.
Selon l'OCDE en 2007, la France avait 22,6 élèves par classe en primaire et 24,3 dans le secondaire (moyenne OCDE: respectivement 21,4 et 23,9 élèves).
Les mesures à l'étude (diminution de la scolarisation des deux ans en maternelle, recours aux non-titulaires pour les remplacements courts, suppression au moins partielle des postes "Rased" par exemple) ont continué de susciter la critique.
Le Snes-FSU (premier syndicat des collèges et lycées) a relevé que le ministère mettait en place, dans le même temps, des internats d?excellence (faibles effectifs, ndlr) dont les taux d'encadrement "font rêver tous les établissements".
Cela va "creuser l'écart entre les élèves les plus fragiles et leurs camarades", a estimé le SIEN-Unsa (inspecteurs).
Chez les parents d'élèves, la FCPE a déploré que l'on "racle les fonds de tiroirs". Pour la Peep, si "la question des moyens" n'est pas "centrale", "il y a des seuils à ne pas franchir", notamment le "non-remplacement des professeurs absents".
L'UNL (lycéens) a dénoncé "une saignée supplémentaire" et le Parti socialiste a qualifié de "cynique et brutale" l'attitude du gouvernement.