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Enseignement précoce des langues: oui, mais avec quels enseignants ?

Soumis par Jean-François Kunzi le 25 mai 2007

Aujourd'hui, le débat ne porte heureusement plus sur la légitimité de l'enseignement précoce des langues à l'école obligatoire, même si certains doutent encore de l'efficacité des méthodes utilisées, jugées trop ludiques et ne prenant pas suffisamment en compte la conceptualisation. Les recommandations de l'Unesco, de l'Union européenne et du rapport Ludi ont fini par convaincre la CDIP qui a décidé d'introduire, afin que l'école publique conserve toute sa crédibilité, deux langues - l'allemand et l'anglais pour la Suisse romande - durant la scolarité primaire.

Quelle formation recevront les enseignants chargés de pratiquer l'enseignement précoce des langues ? La mort du généraliste n'est-elle pas programmée ?

La Suisse, si elle entend s'assurer une place importante dans le contexte mondial, a un urgent besoin de citoyens polyglottes. Le jeune enfant se caractérise, entre autres, par une envie de tout découvrir et par une absence d'à priori. De plus, de nombreuses études le démontrent, son cerveau a une capacité réceptrice extraordinaire, décroissant malheureusement avec l'avancement en âge, qui justifie pleinement, par exemple, l'enseignement précoce des deux langues, l'allemand et l'anglais, choisies, dans cet ordre, par la CIIP. On pourra même les ouvrir à celles parlées par leurs camarades...

Au terme de la scolarité obligatoire, le niveau moyen atteint actuellement, en allemand, notamment dans le domaine de l'expression orale, s'avère souvent décevant, même chez des futurs lycéens. Certains imputent volontiers cette «inefficacité» aux méthodes actuelles qui, à leurs yeux, revêtent, au départ, un caractère trop ludique et occultent l'élément primordial de la conceptualisation. A considérer les objectifs des différents plans d'études, ces reproches s'avèrent parfaitement injustifiés. Toutes les méthodes employées pour les atteindre intègrent les dernières découvertes de la recherche dans le domaine de la «physiologie» de l'apprentissage. Elles se soucient prioritairement, comme cela se passe tout naturellement pour la langue maternelle, de doter l'élève de moyens langagiers qui lui permettent, sans références grammaticales préalables, de s'exprimer volontiers et avec aisance.

Alors, où peut bien résider le problème? L'école publique devrait-elle s'efforcer de pratiquer davantage l'immersion, même partielle? Sans doute qu'un enfant, confronté à un contexte plus impératif et dans un milieu plus fermé, réaliserait des progrès plus rapides et plus indéniables.

Dans notre société, jusqu'à un passé récent, on n'avait pas vraiment pris conscience de l'importance vitale de la connaissance de plusieurs langues. Aujourd'hui, les mentalités ont évolué. Il reste à convaincre les décideurs politiques, même en période de vaches maigres, d'investir dans ce domaine et de doter l'école de moyens à la hauteur des ambitions légitimes.

Dans cette perspective, on ne saurait exiger des enseignants du secteur primaire qu'ils possèdent des connaissances générales et des compétences optimales, qu'ils soient, en plus, au moins parfaitement trilingues, excellents musiciens et chefs de chœur, artistes peintres chevronnés, sportifs de bon niveau et qu'ils maîtrisent les diverses activités manuelles. Un seul individu ne peut plus réunir toutes ces qualités!

L'avenir appartient désormais à l'équipe pédagogique dans laquelle œuvrent, en se répartissant les tâches et les matières, des enseignants bénéficiant tous d'une formation de haut niveau.

Jean-François Kunzi

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