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Faut-il continuer les sacrifices ?

Soumis par Jean-François Kunzi le 15 septembre 2006

Le Conseil d’Etat vient de présenter, avec une mine réjouie, un bilan intermédiaire des comptes 2006. Avec une ancienne enseignante à sa tête, le DECS se montre le meilleur élève de la classe. Il réalise, par rapport au budget, une économie de 7 millions. Mais à quel prix ! Fermetures et non ouvertures de classes, licenciements, suppressions de décharges … Tout cela pour ramener le déficit prévu de 43 à … 5 millions.

Quand on sait que « plaie d’argent n’est pas mortelle », l’enjeu d’un tel sacrifice en vaut-il vraiment la peine ?Sans état d’âme et sans la moindre résistance de notre ministre, notre gouvernement à majorité de gauche a décrété que TOUS les départements devaient contribuer à résorber le déficit abyssal des finances cantonales, estimant que celui-ci avait des causes non seulement conjoncturelles mais aussi, et surtout, structurelles. Depuis trop longtemps, notre canton vit au-dessus de ses moyens en offrant des prestations qu’il n’est plus en mesure d’assumer.

Une société est généralement peu encline au changement. Il faut, presque toujours, hélas, attendre qu’une crise majeure s’installe pour que le monde politique et l’ensemble des partenaires sociaux prennent conscience de la réalité, s’interrogent sur le fonctionnement d’une collectivité publique, sur la pertinence du maintien, de la modification voire de la suppression d’une prestation. « A quelque chose malheur est bon ». Dans cette perspective, qu’une offre de formation doive, aujourd’hui, être reconsidérée relève du bon sens. L’état des finances publiques peut aider à prendre la solution la plus radicale.

En 2005, vu la gravité de la situation financière, le Conseil d’Etat a, sans doute, dû agir dans l’urgence. Même s’il est soutenu dans sa démarche par une majorité du Grand Conseil, cela n’excuse en rien sa précipitation ultérieure, son zèle à respecter absolument les mécanismes de frein à l’endettement décidés par le peuple et, surtout, son entêtement à vouloir réduire, coûte que coûte, le déficit des finances cantonales. Ce qui signifie, fait sans précédent, y compris en imposant des sacrifices lourds dans le domaine de la formation. Il est resté sourd à l’appel solennel que nous lui avons lancé, avec la FAPEN, demandant que, quelle que soit la conjoncture, l’éducation (l’instruction) publique reste SA priorité.

« Nous ne sommes pas là pour deviner l’avenir mais pour le construire » (Denis de Rougemont). Les délocalisations engendrées par la mondialisation et la recherche du profit maximal par les grands groupes industriels ou financiers suppriment, chez nous, des quantités d’emplois, paupérisent la frange la plus vulnérable de la population obligeant les collectivités publiques à développer considérablement une aide coûteuse et laminent, inexorablement, la classe moyenne ce qui ne manquera pas d’avoir, à terme, des répercussions dangereuses sur la nécessaire cohésion sociale.

Si nous voulons survivre et demeurer compétitifs dans ce monde impitoyable, nous devons impérativement être les meilleurs. « L’école doit être la préparation de l’avenir et non l’apologie du présent et du passé » (Paul Graber). Se retrancher derrière des pourcentages pour justifier une augmentation des effectifs relève de la malhonnêteté. La réalité vécue par les collégiens et par les lycéens dans des classes de 25 élèves et plus ne se traduit pas, elle, par une donnée statistique impersonnelle mais par une discrimination difficilement admissible. Par une disponibilité forcément moindre de leurs enseignants, ne cherche-t-on pas à opérer, discrètement, une sélection supplémentaire grave qui conduira une partie de ces étudiants dans un processus d’échec et les empêchera, demain, d’assumer de hautes responsabilités ? Dans le contexte et les perspectives actuels, toutes les énergies disponibles ne devraient-elles pas être mobilisées pour élever le plus possible le niveau général de la formation afin d’éviter un déclin programmé ?

Sacrifier la formation pour économiser 7 millions constitue une faute grave. Les membres de l’actuel gouvernement qui ne l’assumeront évidemment pas devant l’histoire doivent impérativement, à l’exemple de leurs collègues jurassiens, reconsidérer très rapidement leur copie.

Se retrancher derrière des pourcentages pour justifier une augmentation des effectifs relève de la malhonnêteté. La réalité vécue par les collégiens et par les lycéens dans des classes de 25 élèves et plus ne se traduit pas, elle, par une donnée statistique impersonnelle mais par une discrimination difficilement admissible.

Jean-François Kunzi

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