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La disparition des trois sections de l'école neuchâteloise débute lundi

Soumis par SAEN le 14 août 2015

La rentrée est marquée par l'introduction en 9e année des classes à niveaux.

En 9e année, le français (ainsi que les maths) sera enseigné selon un système à deux niveaux. DAVID MARCHON

C'est l'heure du grand saut. Lundi, jour de rentrée, les collèges de l'école obligatoire neuchâteloise accueilleront 20 400 élèves. Le grand saut pour les 1700 enfants qui entameront leur première année scolaire. Le grand saut, aussi, pour les 1900 élèves de 9e année, première volée qui sera formée selon le système des classes à niveaux.

Après plusieurs années de préparation, l'heure est venue de dire adieu aux sections préprofessionnelle, moderne et maturité. Un adieu progressif, puisque les élèves de 10e et 11e années termineront leur scolarité dans une de ces trois sections, mises en place il y a plus de cinquante ans.

Nouvelles pratiques

Les autorités cantonales, hier lors d'une conférence de presse, n'ont pas manqué d'évoquer cette révolution dans l'histoire de la scolarité neuchâteloise. "Les uns et les autres ont fait le maximum pour que tout se déroule dans de bonnes conditions" , a déclaré la conseillère d'Etat Monika Maire-Hefti. "Mais par la force des choses quand il y a un changement aussi conséquent, il y a des inconnues. Les enseignants concernés, de leur côté, devront adopter de nouvelles pratiques. Là aussi, nous ferons en sorte de les accompagner le mieux possible et, le cas échéant, d'améliorer ce qui peut l'être."

Deux niveaux

Mais ne dites pas à la ministre de l'Education que les élèves de 9e année serviront de cobayes... "Non, aucunement, et cela d'autant moins que le système mis en place a pour but de former les élèves mieux encore." Et Monika Maire-Hefti de dresser la liste des objectifs poursuivis par le nouveau système (qui existe dans d'autres cantons), autant d'objectifs déjà largement décrits dans nos colonnes. Le premier d'entre eux, "c'est de valoriser les compétences individuelles de l'élève" .

En résumé: l'enfant n'est plus rattaché à une section, mais il suit sa formation soit au niveau 1 (pour les moins bons), soit au niveau 2 (pour les meilleurs), cela dans les branches principales. Au final, l'idée est d'individualiser l'enseignement autant que possible, y compris à l'intérieur d'une classe (ou du moins ce qu'il en restera). Dans le jargon, on parle de différenciation.

C'est sur ce point que les avis sur cette réforme semblent le plus diverger. Non pas tellement sur le fond - les objectifs généraux sont partagés par presque tous - , mais sur la forme: une partie des enseignants (impossible à quantifier) considèrent que cette réforme a été mise en place trop rapidement, ou pas de la bonne manière, ou encore - et surtout - sans les moyens nécessaires du point de vue financier, humain, matériel ou pédagogique.

Formation insuffisante?

Prenez justement la question de l'enseignement différencié. Avec la suppression des sections et l'absence de niveaux dans plusieurs branches, les classes seront plus hétérogènes qu'aujourd'hui. Cela sans formation complémentaire pour les enseignants, déplore le Syndicat des services publics (SSP).

"Certains enseignants n'ont jamais enseigné à un panel d'élèves aussi diversifié" , commente Claude Grimm, secrétaire syndicale. "On leur a promis qu'ils seraient informés et accompagnés durant cette transition vers des classes hétérogènes et un enseignement différencié, mais finalement, seules des séances obligatoires d'analyse des pratiques professionnelles entre enseignants sont prévues. Ce qui est bien peu en regard de l'importance de la réforme. De plus, ces séances ne seront mises sur pied que dans le courant de l'année."

Pas de cours imposé

Chef du Service cantonal de l'enseignement obligatoire, Jean-Claude Marguet analyse la situation de manière différente: "Je rappelle d'abord que l'enseignement différencié fait partie de la formation de base des enseignants. Et que les classes sont hétérogènes jusqu'en 8e année. D'ailleurs, même avec le système des sections, les élèves d'une classe n'étaient pas tous du même niveau dans toutes les branches. Cela étant dit, des conférences et des séances de réflexion se sont déjà tenues dans certaines centres. Par ailleurs, des cours de formation en analyse des pratiques professionnelles seront proposés, avec comme public cible les enseignants de 9e année. Sans parler de tous les cours de formation continue déjà existants." Monika Maire-Hefti ajoute: "Nous n'avons pas voulu imposer à tous telle ou telle formation, car les besoins d'un enseignant peuvent fortement varier en fonction de son parcours, de son expérience, de ses compétences personnelles ou encore de son âge."

"DES CONDITIONS DE TRAVAIL PEJOREES"

Les inquiétudes et les questions du Syndicat des services publics (SSP) ne portent pas que sur les difficultés que posera l'enseignement dans des classes qui seront plus hétérogènes (en 9e en 2016-2016, mais aussi en 10e et 11e années par la suite). "L'évaluation des élèves constituera une équation difficile. Comment évaluer de la même manière des élèves qui auront suivi un enseignement différencié au cours de l'année?" , s'interroge par exemple la secrétaire syndicale Claude Grimm.

Plus généralement, le SSP tape encore et encore sur un clou connu, si l'on peut dire: "On ne cesse d'ajouter de nouvelles tâches aux enseignants, et dans le même temps, on péjore leurs conditions de travail." Une remarque partagée par Pierre Graber, président du Syndicat autonome des enseignants neuchâtelois (SAEN): "Nous partons du principe que la réforme qui entrera en vigueur lundi a été correctement préparée, quand bien même tous les moyens nécessaires n'ont pas été accordés. Mais nous espérons que les autorités ne tergiverseront pas pour corriger le tir quand ce sera nécessaire. Les épisodes récents sont peu encourageants: on veut bien nous écouter, mais sans remettre en question ce qui a été planifié." Il ajoute: "L'école neuchâteloise fournit toujours plus de prestations, ne cesse de hausser leur niveau, tout cela dans un environnement salarial en perpétuelle dégradation. Il faut vraiment que les enseignants soient des idéalistes pour que ça fonctionne... encore!"

CE QU'IL FAUT AUSSI SAVOIR

EFFECTIFS
Lundi, 20 404 élèves et 2052 enseignants (dont une grande majorité à temps partiel) prendront le chemin de leur collège pour intégrer ou encadrer l'une des 1115 classes de l'école obligatoire neuchâteloise. L'effectif moyen par classe s'élèvera à 18,3 élèves au cycle 1 (1ère à 4e année), 19 au cycle 2 (5e à 8e) et 19,6 au cycle 3 (9e à 11e). "Globalement, ces chiffres sont proches de la moyenne nationale" , commente le Département de l'éducation.

HORAIRES
Depuis plusieurs semaines, les parents ont en principe la possibilité de prendre connaissance de l'horaire de leur enfant via internet (site du cercle scolaire, du centre scolaire, Guichet unique cantonal, etc.). Mais une fois de plus, l'information à ce sujet a été très variable, voire inexistante.

ALLEMAND
Le canton poursuit l'enseignement précoce de l'allemand en l'étendant à la 6e année: 34 classes, totalisant 600 élèves, bénéficieront de cet enseignement par immersion dans quatre communes.

FONDS
Après avoir envisagé une opération blanche du point de vue financier, le Conseil d'Etat a décidé en 2014 d'attribuer des fonds à la réforme de "l'école secondaire". Des dépenses à hauteur de deux millions de francs au total ont pour but de faciliter la mise en place de cette réforme d'ici 2018. A ces dépenses ponctuelles s'ajouteront des coûts annuels supplémentaires pour le canton et les communes.

HARMOS
La rentrée scolaire 2015 marque la concrétisation, pour le canton de Neuchâtel, de la convention scolaire romande et du concordat national Harmos. "Elles ont été mises en oeuvre dans les délais impartis grâce au fort engagement des enseignants, des directions d'écoles, des partenaires et du personnel du Service cantonal de l'enseignement obligatoire ", dit le Conseil d'Etat dans un communiqué.

PASCAL HOFER

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