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La finance n’est pas une industrie mais un service public

Soumis par SAEN le 28 août 2009

Une régulation forte est nécessaire pour que les marchés financiers soient au service de l'économie, et non une fin en soi

Pour contrer la crise financière déclenchée par les crédits hypothécaires pourris, les Etats ont libéré des sommes colossales.

Ainsi la Suisse a mis la main au porte-monnaie pour sauver UBS de la faillite. Ces interventions, contraires au dogme libéral longtemps en cours, ont été justifiées par la nécessité de garantir le crédit, poumon de la production. Laisser tomber des acteurs financiers, les banques, détenteurs de parts de marché considérables et aussi étroitement interconnectés, comme l'exigerait l'application stricte de la loi de la concurrence, conduirait à paralyser la vie économique. C'est donc l'intérêt public - une économie qui dispose de moyens de paiement et de crédits - qui a guidé les Etats dans leurs opérations de sauvetage.

Aujourd'hui, alors que les turbulences apparemment s'éloignent, les acteurs financiers revendiquent à grands cris le retrait de l'Etat, le retour à la «normale», le marché étant suffisamment efficace pour réguler les transactions financières. Tel n'est pas l'avis de Philipp Hildebrand, le futur président du directoire de la Banque nationale suisse, qui estime au contraire que le marché n'est pas une instance suffisante de régulation. C'est pourquoi il préconise des mesures de contrôle plus sévères, propres à instaurer une transparence accrue des transactions financières.

La crise financière et économique actuelle justifie de pousser plus loin l'analyse. Si l'accès au crédit est la condition essentielle d'une économie dynamique, alors l'Etat doit se porter garant du bon fonctionnement des marchés financiers, tout comme il est garant d'un réseau performant de transports et de télécommunications. A cet effet il ne suffit pas de durcir quelques dispositions -par exemple le relèvement du taux de fonds propres - tout en laissant fonctionner le libre jeu des intérêts. Ce libre jeu a conduit à la création d'une véritable industrie financière. Cette dernière n'a plus pour fonction première d'irriguer l'économie, de favoriser l'emploi et de contribuer au bien-être collectif. Cette industrie a perdu son caractère de service, elle n'est plus d'abord l'infrastructure nécessaire à l'économie réelle. Elle se sert de l'économie réelle pour faire de l'argent par le biais d'acrobaties spéculatives. Jusqu'à conduire l'économie réelle au bord du gouffre.

Reconnaître au marché financier le caractère de service public n'implique pas l'étatisation du crédit, comme le préconisent quelques archéo-marxistes nostalgiques. Cette reconnaissance passe par l'explicitation d'une responsabilité de l'Etat en matière de monnaie et de crédit, un Etat veillant à ce que les marchés financiers contribuent au bon fonctionnement de l'économie. Quant aux acteurs privés, ils exercent leurs compétences dans le cadre des règles du jeu fixées par l'Etat et non en fonction du libre jeu de leurs seuls intérêts.

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