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Là-haut, sur la montagne, l’est un petit joyau !

Soumis par Jean-François Kunzi le 11 mai 2007

Perché à 1153 m. d’altitude, à l’extrémité nord du canton, le collège de Derrière-Pertuis jouit d’une situation tout à fait originale, d’un environnement enviable et d’une vue magnifique puisque, du côté sud, le regard s’étend jusqu’aux Alpes. Il abrite l’une des dernières classes à degrés multiples.

Les accusations douteuses de certains parents qui ont largement alimenté des chroniques médiatiques quasi unilatérales ont, depuis l’été 2006, entraîné la petite école dans une zone de turbulences néfastes dont on n’entrevoit pas, hélas, la fin.

Mais il y a pire. Parce que l’effectif minimal légal risque de ne pas être atteint pendant une seule année, le DECS annonce qu’il exigera la fermeture de la classe. Face à la menace, les « Montagnards » se mobilisent pour défendre farouchement LEUR école. Samedi 31 mars, quelque deux cents personnes sont venues leur apporter leur soutien …

Derrière-Pertuis. Avant de défrayer, à de trop nombreuses reprises, la chronique médiatique, ce nom ne devait guère être connu au-delà des frontières cantonales sauf par les sportifs amoureux des crêtes jurassiennes et par certains cyclistes désirant tester leur condition physique.

L’endroit, longtemps isolé, surtout durant les vrais hivers, se mérite. On quitte Chézard (771 m), dans la vallée, pour se lancer dans une première montée de 3,5 km, en forêt. On atteint les Vieux-Prés (1030 m). On dispose de 1,5 km de faux-plat pour reprendre son souffle. Au sortir de la cluse qui franchit la chaîne du Mont-d’Amin, une rude montée vous attend encore : 132 m de dénivellation sur une distance de 1 km !

Le premier bâtiment qu’on aperçoit quand les arbres cèdent la place au pâturage est le collège centenaire et sa façade blanche. Dans cet univers rural où l’habitat s’avère particulièrement dispersé, il constitue une sorte de place de village, un centre de vie et de rassemblement. Il abrite un véritable joyau : l’une des dernières classes à degrés multiples du canton. Il possède tous les atouts pour être un paradis … scolaire.

Souriants, les quelque douze enfants qui le fréquentent actuellement donnent l’impression d’être parfaitement heureux. Agés de six à onze ans, ils semblent conscients de vivre une expérience riche et unique sous la conduite de leur enseignant, un véritable homme d’orchestre compétent et enthousiaste, et de la maîtresse qui le seconde.

Ce type de classes ne représente-t-il pas un idéal pédagogique, une illustration de ce pourrait aussi être la filière unique si chère aux Finlandais et à quelques enseignants neuchâtelois et romands ? L’organisation minutieuse qu’il implique ne favorise-t-elle pas la solidarité, l’entraide, la compréhension et le respect mutuels, une ouverture vers les autres et donc vers le monde, un apprentissage serein, confronté à une réalité vécue au quotidien, un approfondissement du savoir lié à la nécessaire reformulation, la communication sous toutes ses formes, la transmission de valeurs éducatives ?…

Yves Yersin, le cinéaste auteur des « Petites Fugues », est tombé sous le charme. Depuis la rentrée d’août 2006, il tourne, quatre jours par semaine. Il livrera au public, en automne 2008, le fruit de son travail, son regard sur une espèce d’école en voie de disparition.

Le modèle de Derrière-Pertuis n’est sans doute pas exportable tel quel. Ici, sur la montagne, dans des conditions bien spécifiques, il répond parfaitement aux besoins de la population, à ses aspirations, à sa recherche d’identité et de racines solides.

L’école se serait bien passée de la polémique lancée par des parents qui a des répercussions jusque dans les villages situés dans la vallée. A Dombresson, les électeurs se prononceront sur la poursuite de l’accord intercommunal qui permet son maintien. Le DECS ira-t-il au bout de ses exigences ou finira-t-il par accorder, conscient des enjeux bien mis en évidence par le comité de soutien, une dérogation pleinement justifiée ?

Dans l’école de Derrière-Pertuis, un trésor est caché. Alors …

Jean-François Kunzi

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