Une nouvelle politique salariale sera appliquée dès 2017.
Les calculs n’ont pas manqué lors de l’élaboration des nouvelles grilles salariales. Y compris pour les salaires des enseignants... DAVID MARCHON
Comme il fallait s’y attendre, le conseiller d’Etat Alain Ribaux, répondant aux questions des journalistes, n’a pas manqué de dénoncer l’attitude des syndicats de la fonction publique, hier, à l’occasion d’une conférence de presse. Elle portait sur la nouvelle politique salariale de l’Etat, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2017 et qui fâche fortement les représentants des employés (notre édition du 28 mai). «L’énorme travail qui a été réalisé a permis d’harmoniser, de moderniser et de clarifier les grilles salariales, le tout en répondant positivement à plusieurs revendications.»
Comment, dès lors, expliquer la vision totalement différente des syndicats? Décryptage.
Toute la carrière?
Au cœur du conflit entre le Conseil d’Etat et les représentants des employés – ceux des enseignants en particulier –, on trouve le «salaire de carrière»: il correspond à l’addition de tous les salaires durant une carrière, depuis l’engagement jusqu’au moment où la personne prend sa retraite. Selon les syndicats, les enseignants, avec la nouvelle grille mise en place, percevront entre 70 000 et 300 000 francs de moins sur l’ensemble de leur carrière.
«Qui, aujourd’hui, se réfère au salaire de carrière? Personne!», a commenté Alain Ribaux. Avant d’ajouter: «Prenons l’exemple d’un ferblantier: ce dont il se soucie le plus, c’est le salaire qu’il touchera dans les mois à venir. Et je ne parle pas, ici, des différences en termes de sécurité de l’emploi...»
Problème, selon le ministre en charge des Ressources humaines: «Les syndicats se sont opposés systématiquement à toutes les mesures qui avaient un impact sur le salaire de carrière. Dès qu’ils considéraient que c’était le cas, ils refusaient d’entrer en discussion.»
Cotisation supprimée
Le gouvernement se dit d’autant plus étonné de l’attitude des syndicats d’enseignants qu’il estime avoir répondu positivement à deux vieilles revendications: «D’une part, avec l’aval du Grand Conseil, nous proposons de supprimer les cotisations à la caisse de remplacement dès la rentrée d’août 2017 (réd: coût approximatif pour l’Etat: 1,6 million de francs par année). D’autre part, les salaires de début de carrière des enseignants de 1re et 2e années Harmos seront augmentés de 8,1%, et ceux de la 3e à la 6e année de 4,2%.»
Plus généralement, «les salaires des enseignants seront tous soit maintenus, soit revus à la hausse.» Ministre de l’Education, Monika Maire-Hefti a ajouté: «Nous envisageons plusieurs autres mesures en faveur du personnel enseignant, mesures qui doivent être négociées avec les syndicats.» A ce sujet, la conseillère d’Etat socialiste a ajouté: «Les syndicats sont dans leur rôle, et il est essentiel que le Conseil d’Etat les entende et travaille avec eux. Nous l’avons fait, nous avons répondu favorablement à plusieurs de leurs demandes, mais ils n’ont émis aucune proposition sur laquelle nous aurions pu discuter.»
Fortes pressions
Au final, le Conseil d’Etat estime que les nouvelles grilles salariales amèneront toute une série d’améliorations. D’abord sur la forme: l’harmonisation et la simplification apportée devraient permettre d’éviter les tensions politiques et sociales, année après année, lors des discussions relatives au budget cantonal.
Ensuite et surtout sur le fond, considère le gouvernement: «Nous avons voulu maintenir des grilles salariales attractives, qui permettent à la fois de motiver les collaborateurs de l’Etat et d’attirer des gens compétents», a déclaré Alain Ribaux. Avant de préciser: «Cela n’est pas allé de soi. Le Conseil d’Etat, si je puis dire, était pris entre le marteau et l’enclume: d’un côté, une situation financière très difficile et une forte pression du Grand Conseil pour que le budget soit revu à la baisse. De l’autre, des syndicats avec lesquels, trois ans durant, le dialogue a été très compliqué.»
Quel sera le coût... ou le bénéfice de l’opération?
Les nouvelles grilles mises en place ont-elles pour but de réduire la masse salariale de l’Etat de Neuchâtel, et cela dès 2017? On sait que l’une des mesures visant à assainir les finances cantonales a pour but de «limiter la hausse mécanique de la charge salariale»... Le conseiller d’Etat Alain Ribaux répond par la négative: «Non, la masse salariale 2017, selon les projections qui ont faites, correspond à celle de cette année.» Ce que confirme Thierry Gonzalez, chef du Service des ressources humaines, et à ce titre au cœur de l’élaboration des nouvelles grilles salariales: «Le cadre qui avait été fixé par le Conseil d’Etat n’était pas une diminution, mais le maintien de la masse salariale.» Sauf que: «Une fois que toutes les mesures prévues seront entrées en vigueur, alors oui, l’Etat, au fil des années, fera des économies», a indiqué Alain Ribaux. Cela grâce aux nouvelles échelles salariales mises en place.
Près de 6000 personnes
La fonction publique cantonale en chiffres: 5880 personnes (4560 équivalents plein temps), réparties en 2750 fonctionnaires et 3130 enseignants. La masse salariale annuelle s’élève à un total de 474 millions de francs (sur un budget de 2,2 milliards). «On comprend dans ces circonstances que la moindre modification apportée aux grilles salariales a vite des conséquences énormes, de surcroît sur de nombreuses années», a commenté Alain Ribaux.
Rejet total des syndicats
Mobilisation - L’ensemble des syndicats neuchâtelois de la fonction publique appellent leurs membres à une «assemblée de mobilisation» qui se tiendra lundi soir prochain à Neuchâtel.
Liste - Ces syndicats, ce sont: le Syndicat des services publics (administration et enseignants), le Syndicat autonome des enseignants, la Société des magistrats, fonctionnaires et employés de l’Etat, le Syndicat des gendarmes et des agents de détention, le Syndicat de police judiciaire, enfin l’Association du personnel forestier.
Rejet - Comme nous l’avons relaté dans notre édition du 28 mai, les syndicats, après avoir parlé d’«un simulacre de négociations», ont rejeté en bloc le projet de grilles salariales.