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Les employés de la fonction publique neuchâteloise au-devant de sacrifices

Soumis par SAEN le 7 février 2018

Le Grand Conseil se retrouve pieds et poings liés avec la pièce de résistance de sa prochaine session: la réforme du financement de la caisse de pensions. Une baisse des rentes paraît "inéluctable".

Les 18'000 employés de la fonction publique et parapublique neuchâteloise devront a priori avaler la pilule. La baisse des rentes de leur deuxième pilier, l’an prochain, s’annonce comme une fatalité.

Dans deux semaines, le Grand Conseil sera appelé à changer les règles du jeu. Il définira les conditions d’un changement historique de régime pour les affiliés à la caisse de pensions Prévoyance. ne: le passage de la primauté des prestations à celle des cotisations. Cela signifie que les rentes calculées en pourcents du salaire, quel que soit le nombre d’années de cotisations, seront remplacées par des rentes qui dépendront du capital de prévoyance et des taux d’intérêt du marché.

"Pas le choix"

Dans le rapport du Conseil d’Etat, le passage à la primauté des cotisations est jugé «inéluctable». Car, "partout en Suisse, les caisses de pensions adaptent leur plan de retraites à l’allongement de la durée de vie des assurés et anticipent un rendement plus faible des capitaux investis".

"Nous n’avons pas le choix, la législation fédérale nous y force", explique le popiste Daniel Ziegler, président de la commission sur la prévoyance. "Cela s’est décidé ailleurs", confirme le libéral-radical Marc-André Nardin.

"La primauté des prestations promet des rentes sur un rendement que nous n’avons plus", explique le député de droite, par ailleurs rapporteur de la commission sur la prévoyance. Et d’imager son propos: "Lorsque vous avez une fuite dans le bateau, vous n’organisez pas un concert. Il n’y a que sur le ‘Titanic’que l’on a joué jusqu’à la fin... La récréation est finie, demain, on ne rasera plus gratis!"

Dans la diversité de sa composition politique, la commission propose ainsi à l’unanimité d’accepter la réforme. Le compromis qu’elle soumet au vote des députés atténue les sacrifices des futurs rentiers, en particulier ceux qui ont aujourd’hui plus de 45 ans.

"Nous avons réussi à gratter un peu. Malheureusement, nous n’avons pas davantage de marge de manœuvre", relève Daniel Ziegler. Et d’évoquer "une épée de Damoclès" brandie par l’autorité de surveillance des caisses de pensions. "Nous sommes condamnés à réussir. Si nous ne prenons pas des mesures à la prochaine session, l’autorité forcera Prévoyance.ne à agir et elle ne pourra le faire qu’en diminuant les prestations. Ce sera alors 26% de baisse de rentes pour tout le monde et une catastrophe sociale."

Un moindre mal

Avec la proposition de la commission, la baisse moyenne des rentes serait de 10,4%. C’est un peu mieux que les 10,9% qui découlent du projet du Conseil d’Etat. Quant au plan d’assurance du conseil d’administration de Prévoyance.ne, il ne comprend pas de mesures d’accompagnement. Il table sur une diminution moyenne des rentes de 18%.

Avec la version de la commission, l’effort de capitalisation se chiffre à 200 millions de francs, contre 173 millions selon le Conseil d’Etat. Il serait à 60% à charge des employeurs et 40% des employés.

"Cet accord politique est le moins dommageable pour la fonction publique, tout en étant payable par le canton", relève Baptiste Hurni. Le président du groupe socialiste au Grand Conseil admet que "les mesures compensatoires sont faibles. A gauche, nous allons voter en traînant les pieds."

Cela dit, "il n’y aura pas de débat dogmatique". Baptiste Hurni résume ce qui attend les députés: "Nous avons un jeu perdant entre les mains, mais si nous ne jouons pas, nous perdrons davantage."

Syndicat mécontent

"Nous constatons qu’aucune de nos revendications n’a été entendue", réagit Karim Boukrhis, du Syndicat des services publics (SSP). "Nous demandions le maintien de la primauté des prestations, une diminution des rentes de 10% au maximum et que l’effort soit principalement sur les employeurs." Selon le vote du Grand Conseil, les délégués du SSP devront dire s’ils lancent ou non un référendum, voire d’autres actions. Karim Boukrhis rappelle qu’il y a quatre ans, lorsque l’âge de la retraite dans la fonction publique a été porté de 62 à 64 ans, il était question de garder la primauté des prestations jusqu’en 2038.

C’était sans compter le changement du contexte financier et de la législation fédérale, "mise en place par une majorité de droite", précise Daniel Ziegler. Le popiste comprend la réaction du SSP, qu’il a "longtemps présidé. Mais ce serait jouer un sale coup aux assurés que de se braquer."

Le député regrette pourtant la disparition d’un système solidaire au profit d’un autre où "chacun a sa tirelire". Et en commission, il n’a pas eu de réponse à deux questions: les pertes fiscales liées à la baisse des rentes et les prestations complémentaires que l’Etat aura à verser.

Frédéric Mérat

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