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Les enseignants suisses ont un nombre de leçons trop élevé

Soumis par SAEN le 20 décembre 2009

Les enseignants alémaniques cumuleraient les heures supplémentaires. Certains cantons pensent à embaucher des «aides» externes.

L’avis du patron de l’Association faitière des enseignants

Des profs surchargés qui accumulent le stress. Des enfants dont les besoins individuels sont de plus en plus difficiles à contenter. Le tableau n’est guère réjouissant si l’on en croit l’Association faîtière des enseignants (LCH), basée en Suisse alémanique. Mardi dernier, elle a présenté une étude scientifique réalisée auprès de 5100 enseignants alémaniques, selon laquelle ceux-ci accumuleraient en moyenne trois semaines supplémentaires de travail non payé par an. Les raisons de leur surcharge vont des classes chaotiques aux activités annexes (administration, coordination, réforme…) de plus en plus nombreuses.

Les enseignants tirent la sonnette d’alarme et veulent inciter les politiques à l’action pour, disent-ils, préserver la qualité de l’enseignement. Depuis la publication de ce rapport, par ailleurs critiqué car il a été commandé par les enseignants eux-mêmes, un projet fait parler de lui: et si l’on adjoignait à l’enseignant un «assistant» rétribué, par exemple une mère ou un père qui, au bénéfice d’une formation supplémentaire, se verrait confier des tâches subalternes? Certains cantons alémaniques y penseraient de manière intensive. Du côté des enseignants, Beat W. Zemp, président de la LCH et voix officielle très consultée, se montre sceptique.

Le Temps : Suite à l’étude présentée la semaine dernière, vous déplorez les heures supplémentaires accumulées notamment en raison des fonctions administratives exigées des enseignants. Au-delà des critiques, que réclamez-vous de concret ?

Beat W. Zemp : Il faut alléger les tâches administratives. Aujourd’hui le métier d’enseignant englobe les réflexions sur le développement de l’école, les projets d’équipe, la formation complémentaire et d’autres aspects encore. Dans ce contexte, les enseignants suisses ont en comparaison européenne un nombre de leçons trop élevé par semaine. En Finlande, leur cahier des charges ne dépasse pas 24 leçons (en Suisse entre 28 et 33) et, lorsqu’une mission particulière est dévolue aux enseignants, ce nombre est vu à la baisse. Nous demandons donc une réduction du nombre de leçons obligatoires, qui n’a plus diminué depuis plus de 200 ans. 

– Dans ce contexte de surcharge, l’idée d’engager des aides annexes comme des mères ou pères a fait son apparition. En Suisse romande, des représentants d’enseignants ont déjà marqué leur désaccord. De votre côté, dans la presse du dimanche, vous n’avez pas exclu cette alternative…

– Il y a là un problème de précision. Nous sommes aussi très sceptiques quant à l’idée d’assistants de classe auxquels on demanderait, après une formation accélérée, de se tenir devant les élèves. Et d’assumer un rôle qui est celui de l’enseignant. Nous n’en voulons en aucun cas. Cela signifierait une non-reconnaissance de la profession. Par contre ce que nous pouvons imaginer, c’est que certains enseignants, surtout au jardin d’enfants ou à l’école primaire, demandent à des personnes adéquates, comme des parents, de les soutenir pour des exercices faciles, ceci dans le but d’améliorer le suivi individuel des enfants.

– Ils hériteraient ainsi d’une autorité et d’une fonction dévolues à l’enseignant. Comment comptez-vous les choisir ou les former ?

– C’est l’enseignant qui, comme c’est le cas dans un projet pilote lancé à Berne, peut demander l’engagement de ces aides de classe lorsqu’il l’estime nécessaire. Par exemple pour lui prêter assistance lors d’une sortie. Le personnel serait ensuite recruté par la direction de l’école.

– Faut-il aussi comprendre que l’école insiste encore sur sa fonction «éducative» ?

– De plus en plus de tâches éducatives sont malheureusement déléguées à l’école, même si les parents devraient toujours avoir là le rôle central. Mais si ceux-ci n’assument pas ces tâches élémentaires, le problème repose sur les épaules des enseignants. Qu’on le veuille ou non.

– Après l’étude que vous avez présentée la semaine dernière, comment comptez-vous motiver les jeunes à choisir cette profession ?

– Cette question devrait être posée aux autorités scolaires et aux institutions de formation. Durant les dix à douze prochaines années nous devrons, en Suisse, remplacer quelque 30 000 enseignants. Si nous ne parvenons pas à garantir l’attractivité de la profession, les problèmes seront colossaux. La formation suisse pourrait très vite passer de la première à la deuxième ligue en matière de qualité.

Anne Fournier
Le Temps (16 déc. 2009)

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