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Les profs en ont assez de payer eux-mêmes leurs remplaçants

Soumis par SAEN le 23 juin 2015

NEUCHÂTEL • Les enseignants du canton financent à parts égales avec l’Etat et les communes leur caisse de remplacement. Dépôt d’une motion.

Deux syndicats ont déposé hier une motion populaire munie de mille signatures visant à libérer les enseignants de leur obligation de contribuer à la caisse de remplacement. LDD

A en croire les syndicats, si le terme «neuchâteloiserie» n’est apparu que récemment, le concept pourrait, quant à lui, être ancré dans le canton depuis bien longtemps. Plus de cinquante ans, pour être plus précis. En effet, depuis cette époque, les enseignants financent à parts égales avec le canton et les communes leur remplacement en cas d’arrêt-maladie. Une spécificité unique en Suisse, à laquelle s’opposent le Syndicat des services publics (SSP) et le Syndicat autonome des enseignants neuchâtelois (SAEN). Hier, ils ont déposé une motion populaire, munie de plus de mille signatures, visant à libérer les enseignants de leur obligation de contribuer à la caisse de remplacement.

Attaques répétées

​«Nous devons sûrement être les seuls au monde à payer nous-mêmes nos remplaçants!» s’emporte Pierre Graber, président du SAEN. Si cette ponction exceptionnelle a déjà été perçue précédemment comme «injuste», l’augmentation de ses coûts la rend désormais «injustifiable» aux yeux des enseignants du canton, qui figurent parmi les moins bien payés du pays. En effet, en 2014 les professeurs ont subi par deux fois une hausse de leur contribution: le 1er janvier, leur part passait de 0,5% à 0,56%. En juillet, elle augmentait encore, de 0,56% à 0,74%. Le taux total réparti entre trois contributeurs est de 2,22%, pour un coût de 7 millions de francs. Une somme que les professeurs verraient bien à la charge unique des employeurs.

«A ces deux augmentations, s’ajoutent plusieurs attaques répétées contre la profession», précise Michel Gindrat, coprésident du SSP-enseignants. «Ces dernières années, nous avons eu droit à l’indexation négative par rapport à l’indice des prix à la consommation, une ponction destinée à assainir la caisse de pension et à la suspension partielle du système d’annuité, pour limiter l’augmentation de la masse salariale dans l’enseignement à 0,5%», détaille-t-il, de la lassitude dans la voix. Contactée, Monika Maire-Hefti, conseillère d’Etat chargée de l’Enseignement, n’était pas joignable.

Congés de longue durée en hausse

​Pour les professeurs, la situation ne peut plus durer. En novembre, ils étaient déjà plus deux mille (sur un canton qui compte moins de quatre mille enseignants) à manifester contre la détérioration de leurs conditions de travail. «On nous demande de mettre en place des réformes à la charge des enseignants; on exige plus de prestations sans donner plus de moyens; et, enfin, on augmente les effectifs des classes. Résultat? Le nombre de congés de longue durée (plus de vingt et un jours) et de burn-out se multiplie», regrette Pierre Graber. Indicateurs de cette hausse, les coûts de la caisse de remplacement ont augmenté de près de 80% entre 2003 et 2013, selon l’Institut universitaire de santé au travail.

Au final, les enseignants se sentent-ils soutenus par leur magistrate de tutelle? Quelles sont les chances de la motion de faire modifier la loi sur les remplacements? Hier, aucun des syndicalistes présents au château ne s’est risqué à un pronostic, mais l’optimisme ne régnait pas: «Même si le Conseil d’Etat est à majorité socialiste, il se plie souvent au diktat d’un parlement de droite», résume Pierre Graber. Un parlement qui ne se prononcera pas avant la rentrée sur le sort de la motion.

Mohamed Musadak

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