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L’État repense la formation postobligatoire

Soumis par SAEN le 31 août 2009

Afin d'économiser, le canton veut favoriser l'apprentissage et éviter le redoublement. Les acteurs de la formation voient ces mesures favorablement.

Les autorités neuchâteloises veulent plus d'apprentis en entreprise, moins de lycéens et moins de redoublants. Le conseiller d'Etat en charge de l'éducation, Philippe Gnaegi, a présenté ces dernières semaines les objectifs politiques de son département pour les huit ans à venir. Les différentes mesures devraient permettre de faire baisser les coûts de formation, plus élevés à Neuchâtel que dans le reste de la Suisse. Elles visent également à réduire les taux d'échecs et d'abandons, importants dans les lycées neuchâtelois.
Si ces réformes affichent un caractère économique clair - passer de 18600 francs par apprenant et par année à 13000 francs, soit la moyenne nationale -, elles n'en sont pas moins appréciées par les acteurs de la formation et de l'emploi. «Bien sûr qu'il ne faut pas que ces objectifs soient uniquement économiques», indique John Vuillaume, professeur de français et d'histoire au lycée Jean-Piaget et président du syndicat autonome des enseignants neuchâtelois (SAEN). «Ils doivent servir l'éducation des jeunes.»
Selon lui, de nombreux élèves pourraient effectivement mieux s'épanouir scolairement et professionnellement. Il confirme notamment que beaucoup d'adolescents choisissent le lycée faute d'autres solutions. Il approuve donc la volonté du Conseil d'Etat d'augmenter le nombre de places d'apprentissage. «Certains élèves viennent parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils veulent faire. Mais d'autres n'ont effectivement pas pu trouver de places d'apprentissage.»

Plusieurs problèmes à résoudre

Reste que, selon lui, cet attrait pour le lycée découle en partie d'une volonté politique. «Neuchâtel a toujours souhaité et fait en sorte que les élèves acquièrent une très bonne formation de base», souligne le président du SAEN. Il refuse également de diaboliser les adolescents qui abandonnent le lycée après une année. «On dit souvent que cela coûte cher. C'est vrai. Mais c'est beaucoup moins onéreux qu'un jeune qui ne fait rien et qu'il faut ensuite réinsérer.»
Offrir plus de places d'apprentissage n'est pas non plus la solution à tous les problèmes. Claude Jeandroz, chef du service cantonal de l'orientation, ajoute qu'il s'agit également d'en proposer dans des domaines qui attirent les jeunes. Pour cette année scolaire, nonante-cinq places en entreprise étaient en effet encore disponibles à la rentrée. «Certains secteurs s'arrachent, comme le commerce», note-t-il. «D'autres, comme l'hôtellerie ou le bâtiment, peinent parfois à trouver des jeunes motivés.»

Une voie encore mal considérée

En plus du nombre de places, c'est aussi le concept de l'apprentissage lui-même qui doit être revalorisé. «Il faut absolument sortir de ces stéréotypes d'une voie déjà toute tracée», estime Claude Jeandroz. «Le lycée reste la filière la mieux considérée, par la société, les enseignants ou les parents.» Pour le directeur du service de l'orientation, cette voie ne devrait pourtant représenter qu'un choix parmi d'autres, même pour les élèves issus de maturité. Un cours a d'ailleurs été ouvert l'année passé dans les classes de 8e maturité, afin de mieux mettre en évidence les différents débouchés, autres que le lycée. Il n'existait auparavant que dans les autres filières.

Valorisation des employeurs

«Ce ne sont pas toujours les jeunes qui sont attirés par le lycée, mais l'ambiance générale les y pousse», confirme Pierre Hiltpold, directeur de la chambre neuchâteloise du commerce et de l'industrie (CNCI). Et de préciser que la voie de l'apprentissage n'a pourtant souvent rien à envier à celle académique. Il note en effet que certains domaines offrent une formation d'un niveau quasi équivalent à la maturité, que la plupart des professions apprises en entreprise ouvrent la voie à des études supérieures. Et qu'elles offrent les mêmes perspectives salariales ou de postes à responsabilité que celles de l'université. Le tout avec la sécurité en plus, puisqu'un apprentissage permet de travailler après quatre ans déjà. «Il ne faut pas oublier que certains universitaires restent tout en bas de l'échelle ou se retrouvent au chômage», ajoute Pierre Hiltpold.
Faute d'intérêt de la part des bons élèves, certains employeurs peinent donc à recruter leurs apprentis. «Pour des places de micromécaniciens, par exemple, il faut pratiquement sortir de la section scientifique», indique le directeur de la CNCI. «Mais ces adolescents se dirigent plutôt vers le lycée.»

Une orientation plus poussée

Le travail doit également se faire au niveau de l'orientation. John Vuillaume estime en effet que ce volet devrait être plus développé. «Nous aimerions que les élèves soient mieux informés et mieux dirigés dans le choix d'un métier.» Selon lui, choisir une profession devrait constituer l'une des missions fondamentales de l'école, notamment en 8e et 9e année. Des efforts particuliers pourraient également être faits vis-à-vis de certains élèves. «Je pense par exemple à ceux de la section moderne, dont les débouchés sont parfois flous», indique l'enseignant. En effet, si les adolescents de la filière maturité se destinent au lycée et ceux de pré-professionnel à un apprentissage, les élèves de moderne restent parfois plus dans l'expectative.

Redoublements inévitables

Quant aux mesures visant à éviter le redoublement avec un rattrapage d'été ou un soutien scolaire, Claude Jeandroz estime que cela ne peut qu'être positif pour les élèves qui en bénéficieront. John Vuillaume reste, lui, plus sceptique. Il souligne que cette possibilité ne fonctionnera que si les élèves sont suffisamment motivés et les parents présents. Il ajoute que pour les jeunes présentant de réelles difficultés, cette alternative ne suffira pas. L'enseignant précise enfin que le redoublement s'inscrit intrinsèquement dans le système actuel de filière. «Après chaque année, il faut répondre à des critères pour rester dans la même filière. Aussi longtemps qu'on continue avec ce système, éviter les redoublements est inutile.»

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