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L’étoffe dont on faisait les chefs

Soumis par Pierre Graber le 22 avril 2016

La mise en place de HarmoS, conjuguée à la régionalisation de l’école a causé la disparition des commissions scolaires et le transfert de leurs prérogatives aux exécutifs communaux, avec pour conséquence un renforcement de la hiérarchie.

Du jour au lendemain, il a fallu presque quadrupler le nombre des directeurs-trices dans nos écoles. Cela s’est souvent bien passé et des personnalités se sont ainsi révélées. Évidemment, à l’inverse, il y a aussi eu des erreurs de casting et certaines perdurent hélas…

Le rôle des directions a été redéfini et leurs membres tenus de suivre une formation conséquente conclue par l’obtention d’un CAS à la FORDIF. Sur deux ans, en cours d’emploi, ils étudient ainsi « l’organisation du travail, le management et le développement de leur institution. [Le CAS] permet d’acquérir des savoirs et des outils centrés sur la gestion opérationnelle [...]. Il offre [aussi] une première initiation à la profession de directeur d’institution de formation, entre pilotage et leadership. »1

Histoires de parapluie

Par le passé, quand seules les villes en disposaient en primaire, les directions ouvraient leur parapluie pour protéger les enseignants des griefs excessifs de certains parents. Si les quérulents n’avaient pas cherché préalablement à régler leur problème avec l’enseignant concerné, la direction mettait vite le hola. Cela ne l’empêchait pas de convoquer le collègue en question pour saisir l’origine du conflit; selon les cas, rarement, cela pouvait se conclure par un « savon » bien compris.

De nos jours, de plus en plus d’enseignants ont l’impression que les directions ouvrent le parapluie pour leur propre protection. Fréquemment, elles accordent a priori toute leur attention aux griefs de parents considérant l’école comme un supermarché à disposition de leur enfant. Une succession de procédures s’ensuit: dépositions, constitution d’un dossier, entretiens éventuels avec les uns et/ou les autres, … Si, par malheur, excédé, empêché d’enseigner, l’enseignant pète un plomb, a une parole ou une ébauche de geste déplacé, il peut, en plus, fortement craindre que la direction abondera dans le sens des plaignants et en remettra une couche. Notre société considère tellement l’école comme une prestataire de service que l’enfant (client) y est roi comme dans le commerce de détail!

Sus aux directeurs, alors? Non, ils sont parfois aussi démunis que nous. En fait, l’école est victime du caractère obligatoire de l’institution. Dans la population, on part du principe que chaque enfant y a sa place assurée. C’est un objectif louable que nous partageons totalement, si les moyens suivent.

Or, dans nos classes, il y a souvent 3 types d’élèves: un groupe principal2, des élèves à besoins éducatifs particuliers et d’autres encore présentant des troubles du comportement. L’enseignant doit alors adapter son enseignement, démultiplier les préparations, concevoir des stratégies alternatives, gérer les besoins divers, rencontrer parents et partenaires, participer à des réseaux… tout en respectant les contraintes du plan d’études.

C’est beaucoup pour une personne. Sûrement trop…

À l’évidence, il y a des lacunes dans le dispositif.

On n’a probablement pas fini de parler d’épuisement professionnel!

1 extrait du site www.fordif.ch
2 « la classe » telle qu’on l’a longtemps connue

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