Le canton de Neuchâtel s’est vu attribuer 805 requérants d’asile en 2015, soit un chiffre en forte augmentation par rapport à la période 2004-2010. Mais on est encore loin du record de 1999, lié à la guerre du Kosovo.
C’est une certitude: des centaines de réfugiés syriens, afghans, érythréens ou venus d’autres pays enlisés dans les conflits ne pourront pas rentrer chez eux et devront envisager leur avenir sur sol neuchâtelois.
En 2015, le canton a accueilli plus de 800 requérants d’asile, un chiffre qui a explosé par rapport à la période entre 2004 et 2010, où Neuchâtel enregistrait entre 200 et 400 arrivées par an. Ces nombreux migrants réussiront-ils à s’intégrer socialement et professionnellement?
«La volonté, aussi forte soit-elle, ne suffit que très rarement aux personnes accueillies à réussir leur intégration professionnelle dans un pays comme le nôtre, avec les exigences de son marché du travail et l’excellent niveau de formation de sa population, scolarisée dès l’âge de 4 ans», relève le Conseil d’Etat neuchâtelois. Il ajoute que pour toutes ces personnes, «un échec constitue un frein à l’intégration sociale, une menace de marginalisation, un sentiment de découragement, un risque accru pour la santé. Et pour les collectivités, l’échec est synonyme de coûts d’assistance très importants.»
Formations pas adéquates
Dans un rapport d’information publié hier, le Conseil d’Etat neuchâtelois présente la situation détaillée de l’asile en Suisse et dans le canton, ses évolutions et ses impacts.
Face à l’afflux massif de migrants à destination de l’Europe lié au conflit syrien et à la situation géopolitique au Proche et Moyen-Orient, le canton a dû ouvrir, en urgence et dans des conditions parfois difficiles, de nouveaux centres d’accueil tels que ceux de Tête-de-Ran ou de La Ronde à La Chaux-de-Fonds. Il a également dû recourir à la solution hôtelière durant plusieurs mois, jusqu’au printemps 2016, pour y loger jusqu’à 80 personnes.
Mais des défis encore plus importants attendent le canton ces prochaines années, notamment celui de former et d’intégrer les centaines de réfugiés qui ne pourront pas rentrer chez eux, et éviter ainsi une fracture sociale. Le Conseil d’Etat avertit que ces enjeux en matière d’intégration ne seront pas gratuits: «ils nécessiteront des investissements d’ordre financier et en ressources humaines.»
Actuellement, l’encadrement et les formations offertes aux enfants de migrants et aux mineurs non accompagnés, parfois analphabètes, «ne sont pas adéquats», constate le Conseil d’Etat. Dans les centres d’accueil de Fontainemelon et de Couvet, aucun collaborateur n’a une formation d’assistant social ou d’éducateur.
Réduire la liste d’attente
Le Conseil d’Etat a donc décidé, comme première mesure, d’affecter temporairement la structure de La Ronde à La Chaux-de-Fonds à l’hébergement des mineurs non accompagnés et des familles, et d’engager deux éducateurs pour assurer un meilleur encadrement des jeunes réfugiés.
Le canton envisage également d’ouvrir une classe de premier accueil à La Chaux-de-Fonds et de renforcer le nombre de périodes d’enseignement dispensées dans la classe de premier accueil du collège de Fleurier, en situation de sureffectif.
«Les coûts nouveaux à prévoir pour la scolarisation des élèves en classe de premier accueil se montent à 230000 francs», informe le Conseil d’Etat.
Quant aux jeunes migrants ayant dépassé l’âge de la scolarité obligatoire, ils sont orientés vers les classes Jet (Jeunes en transition) du Centre de formation neuchâtelois pour adultes. «Les demandes d’admission en classes Jet continuent d’affluer et début juin, plus de 100 candidats étaient en liste d’attente», informe le gouvernement. Il renforcera la capacité de ces classes dès la rentrée, ce qui représentera un coût supplémentaire de 340 000 francs par année.
Et les adultes? «Le nombre de cours de français dans le canton est trop restreint pour permettre aux personnes d’atteindre rapidement un niveau suffisant», reconnaît le Conseil d’Etat. «Il est donc primordial que le canton mette les moyens nécessaires pour agir en amont et limiter, à terme, la fracture sociale.» Les cours de sensibilisation et de connaissances civiques seront également renforcés.
Places réservées en crèche
Enfin, les crèches sont aussi concernées par des mesures visant à promouvoir l’intégration sociale des enfants migrants et de leurs parents: «Afin de favoriser l’équité des chances dans les structures d’accueil préscolaires et parascolaires», informe le Conseil d’Etat, «certaines places sont spécifiquement réservées à des enfants réfugiés».
par Virginie Giroud
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