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Un député jurassien accuse la HEP-Bejune de profiter des étudiants

Soumis par SAEN le 6 janvier 2018

Le député popiste jurassien Rémy Meury vient d'interpeller le gouvernement de son canton à propos de la Haute Ecole pédagogique Bejune. Il estime que l'institution cherche à améliorer ses comptes en ponctionnant le salaire des étudiants effectuant des remplacements. La HEP se justifie.

Rémy Meury est persuadé que la HEP-Bejune profite de la situation.
Rémy Meury est persuadé que la HEP-Bejune profite de la situation. Keystone

Et si la HEP-Bejune améliorait ses comptes en se sucrant sur le dos de ses étudiants? C’est l’intitulé de la question écrite que le député popiste jurassien Rémy Meury vient d’adresser au Gouvernement de son canton.

L’élu de gauche en est persuadé: la retenue de 15% perçue sur les salaires des étudiants assurant des remplacements afin de couvrir les frais administratifs, appliquée dans le cadre de l’élaboration du budget 2018, sert avant tout à renflouer les caisses de l’institution. Plus de 100'000 francs sont en jeu.

Double avantage

C’est en épluchant le budget 2018, établi par le comité stratégique de la HEP, que le membre de la CIC (commission interparlementaire de contrôle) est certain d’avoir décelé «une pratique financière douteuse». Rémy Meury veut savoir ce qu’en pense le Gouvernement jurassien.

Au passage, il invite l’exécutif à envisager la possibilité de donner plus de pouvoirs à la CIC. Pour l’heure, cette dernière ne fait que prendre connaissance du budget, avec le seul droit de poser des questions... Depuis la rentrée scolaire d’août 2014, les établissements scolaires de l’espace Bejune à la recherche de remplaçants peuvent faire appel à des étudiants de 3e année à la HEP.

Double avantage: mettre du personnel passablement formé à disposition des écoles du degré primaire et responsabiliser les étudiants concernés, toujours placés sous la surveillance des formateurs de l’institution, comme dans le cadre d’un stage.

Neuchâtel aussi

L’idée de départ était d’accorder ces remplacements de longue durée (6 mois) en priorité à une certaine catégorie d’étudiants (la plus prometteuse).

Mais un compromis a été trouvé: vu que tous les étudiants ne pourront pas effectuer des remplacements de même durée, il a été décidé de créer un pot commun pour les rémunérer. Selon Rémy Meury, ce sont quelque 800'000 francs qui ont été glissés dans cette enveloppe en 2016. Une somme à partager entre une centaine de bénéficiaires.

Se réfugiant derrière des arguments juridiques et financiers, le comité stratégique a donc calculé que tout travail a un coût: d’où l’introduction de cette ponction de 15%, représentant 120'000 francs en 2016.

«Difficile de croire que les frais administratifs liés à la gestion de ces remplaçants atteignent un tel montant», cogne Rémy Meury. «On va là clairement vers une forme d’exploitation des étudiants par l’institution chargée de les former.»

Son homologue vert au Grand Conseil neuchâtelois Patrick Hermann (également membre de la CIC) et le député PSA au Grand conseil bernois Peter Gasser (président de la CIC) vont interpeller leur exécutif ces prochains jours pour connaître leur point de vue sur le sujet.

Trait tiré sur les prestations gratuites

Jean-Paul Mathey-de-l'Endroit

Monika Maire-Hefti, en tant que présidente du comité stratégique de la HEP-Bejune, on imagine que vous ne partagez pas l’avis de Rémy Meury?

Surtout, je le nuance beaucoup. Les HEP, selon les lois fédérales, ont trois missions: la formation, la recherche et les prestations de service. La HEP-Bejune les remplit les trois. Pour les remplacements de longue durée, il y a lieu d’évoquer une indemnité plutôt qu’un salaire. Car lorsqu’il remplace, l’étudiant, comme dans le cadre d’un stage, continued’être suivi par un formateur de l’institution.

La formule entrée en vigueur lors de la rentrée scolaire d’août 2014 donne satisfaction. Mais dans le budget 2018 est apparue cette ponction de 15% liée à des frais administratifs dus à la gestion de ces remplacements...

La nouvelle loi fédérale est entrée en vigueur en 2016. Il a fallu la mettre en application. Nous devons facturer les prestations de service de la HEP-Bejune à un juste prix, en prenant garde de ne pas fausser le jeu de la concurrence. Nous affinons aussi les budgets. Des prestations que nous assumions gratuitement ne peuvent plus l’être aujourd’hui.

Une retenue de 15% sur les indemnités accordées aux étudiants équivaut facilement à un emploi à plein temps. Le montant de 120000 francs évoqué correspond à peu près au coût annuel d’une secrétaire.

Devant la Commission interparlementaire de contrôle, vous auriez déclaré que cette mesure était purement économique en regard des difficultés financières rencontrées par les trois cantons contributeurs, Neuchâtel, Berne et le Jura...

C’est exact. Mais ce que Rémy Meury oublie de mentionner, c’est que j’ai également demandé de ne pas fausser le jeu économique. Le canton de Neuchâtel sans budget, cela impacte directement nos partenaires.

Par Gérard Stegmüller

Source (PDF)


Texte de l'interpellation de Rémy Meury, qu'il a communiquée au comité de l'Intersyndicale des Enseignant-e-s BEJUNE à l'occasion de sa séance du 6 décembre 2017.

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