Aller au contenu principal

Entre doutes et espoirs, premières impressions sur la grande réforme

Soumis par SAEN le 4 novembre 2015

Comment cela se passe-t-il en 9e année, où les trois sections ont disparu?

Pour commencer, permettez-nous de prendre des pincettes: après une dizaine de semaines seulement, il est trop tôt pour dresser un bilan de l’entrée en vigueur, en 9e année Harmos, de la réforme de l’«école secondaire» neuchâteloise. C’est donc plutôt des premières impressions que nous avons récoltées auprès de plusieurs enseignants actifs à ce degré, ainsi qu’auprès de Jean-Claude Marguet, chef du Service cantonal de l’enseignement obligatoire (SEO).

L’histoire fait partie des branches qui ne sont pas à niveaux, et où tous les élèves sont donc ensemble.DAVID MARCHON

Le grand mot: hétérogénéité

Un chef de service qui commence par tenir les propos suivants: «Les toutes premières impressions sont plutôt positives, il y a une dynamique nouvelle. Bien sûr, au vu des changements fondamentaux qui sont intervenus, il y a inévitablement des difficultés à surmonter. Elles étaient attendues, et nous avons fait le maximum, avec les directions d’écoles, pour les limiter. De même, nous sommes à l’écoute des enseignants et des directions, et le maximum sera fait pour ajuster ce qui doit l’être.» Il ajoute: «Mais nous relevons avec beaucoup de satisfaction que les enseignants ont intégré les paramètres de cette réforme et qu’ils ont bien perçu les enjeux et les objectifs à atteindre.»

Selon les enseignants interrogés, la principale des difficultés porte sur l’hétérogénéité des classes au niveau 1 (lire ci-contre), mais surtout dans les disciplines qui ne sont pas à niveaux: en allemand, sciences de la nature, histoire ou encore géographie, tous les élèves suivent le même programme, quelles que soient leurs aptitudes scolaires.

Résultat: «C’est sportif!», lance une enseignante, avant que l’un de ses collègues explique: «Les différences de niveau sont parfois énormes. Dans chaque classe ou presque, il y a deux-trois élèves qui sont complètement largués et deux-trois autres qui sont clairement au-dessus du lot.» N’était-ce pas déjà le cas dans l’ancien système? «Oui, mais l’écart entre ces deux extrêmes n’était pas aussi grand. Pour nous, enseignants, il est donc vraiment compliqué d’appliquer ce que l’on appelle la différenciation.»

Avec l’hétérogénéité, c’est l’autre grand mot de la réforme du cycle 3 (9e à 11e années). La différenciation consiste, pour l’enseignant, à s’adapter autant que possible aux compétences de chaque élève. «C’est un beau principe. Et à titre personnel, j’étais favorable à cette réforme. Mais comment fait-on quand il y a de telles différences de niveau entre les élèves?», s’interroge une enseignante. «Certains d’entre nous sont dépassés. Car le programme scolaire est le même pour tous. Et on ne va quand même pas appliquer des barèmes de notes différents au sein d’une même classe!»

Echanges de pratiques

Pour répondre à ce genre d’interrogations – et parler d’autres problématiques –, les enseignants peuvent s’appuyer sur une nouveauté: les analyses des pratiques professionnelles (APP), soit des entretiens en groupe menés par un animateur. «C’est intéressant, ces APP», commente un prof. «Mais que faire lorsque nous faisons tous face au même problème et que personne, au sein du groupe, n’a la solution?»

Jean-Claude Marguet tempère: «Les APP, qui sont un outil ayant déjà fait ses preuves, en sont au tout début au cycle 3, de même que d’autres mesures mises en place pour que la réforme se déroule le mieux possible. Cela étant dit, dans le cas que vous mentionnez, on peut imaginer que l’animateur fasse remonter le problème à la direction du centre, qui peut par exemple faire venir un spécialiste de la différenciation. Ou alors intégrer dans le groupe un enseignant particulièrement expérimenté. Sans parler des mesures qui peuvent être prises par la direction en termes de soutien aux élèves les plus en difficulté, sachant que des moyens supplémentaires ont d’ores et déjà été alloués aux écoles depuis la rentrée d’août.»

En guise de conclusion, on citera cet enseignant: «La situation actuelle n’a rien de catastrophique. Mais jusqu’à présent, les faits confirment les craintes que nous avions émises, y compris pour ce qui est des moyens accordés pour la mise en place de cette réforme. Des solutions doivent encore être trouvées pour faire face à un certain nombre de difficultés.»

Deux niveaux

En 9e année Harmos, les trois anciennes sections ont disparu. Les élèves sont tous ensemble (à l’exception de ceux qui sont en classes terminales), sauf dans deux disciplines, le français et les mathématiques, où ils sont répartis entre deux niveaux en fonction de leurs compétences: 1 pour les moins bons, 2 pour les meilleurs.

Et le soutien «social»?

En section préprofessionnelle, des enseignants portent parfois à bout de bras des élèves qui connaissent non seulement des difficultés scolaires, mais aussi, et peut-être surtout, d’importants problèmes d’ordre social et familial. Avec la disparition de cette section, il n’y aura plus d’enseignants qui travaillent avec une seule et même classe. «Désormais, certains profs de classe voient leurs élèves durant trois périodes par semaine seulement. Dans ces conditions, comment voulez-vous qu’ils accompagnent valablement les élèves qui ont de gros problèmes hors de l’école?», s’interroge une enseignante.

Chef du Service de l’enseignement obligatoire, Jean-Claude Marguet commence par confirmer que la tâche de l’école ne se limite de loin pas à instruire les élèves. Alors, comment faire? «Avec la réforme du cycle 3, il est essentiel que les enseignants d’une même classe échangent, travaillent ensemble et soient aussi soudés que possible. On parle d’équipes pédagogiques. Dans ce domaine aussi, la réforme induit de nouvelles pratiques, et c’est dans ce cadre-là  notamment à l’occasion de colloques internes qu’un accompagnement d’ordre social peut être mis en place pour soutenir un élève.»

PAR PASCAL HOFER

Source

Mots-clés associés