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A La Chaux-de-Fonds, l’école multiplie les classes spéciales

Soumis par SAEN le 25 janvier 2018
Le cercle scolaire de La Chaux-de-Fonds compte 60% d’élèves en difficulté en classes de formation spéciale de plus que la moyenne cantonale. (Christian Galley)

Selon la statistique, le cercle scolaire de la Métropole horlogère compte le plus d’élèves du canton en difficulté dans des classes spéciales. La faute aux conditions socio- économiques?

La statistique est éloquente. Le cercle scolaire de La Chaux-de-Fonds compte 60 % d’élèves en difficulté en classes de formation spéciale – on les appelle encore parfois terminales – de plus que la moyenne cantonale (données 2016-2017). Et c’est La Chaux-de-Fonds qui « plombe » cette moyenne, puisque les six autres cercles sont en dessous de la barre. Pourquoi cette singularité?

« C’est essentiellement dû à la structure socio-économique de la population. Peut-être fait-on moins redoubler les élèves en difficulté pour mieux les aider, mais c’est marginal dans le constat », relève le conseiller communal popiste Théo Bregnard, qui chapeaute l’école chaux-de-fonnière.

Directive en français

Directeur du secteur ouest du cercle, qui inclut le quartier à population très mélangée des Forges, Fabrice Demarle avance des exemples concrets. Au collège des Endroits, 65 % des familles d’élèves sont allophones (Ils parlent d’abord une autre langue que le français). C’est le seul collège de la ville où l’on a sorti une directive obligeant les élèves à parler français entre eux. Dans une classe, on a noté, chez les tout-petits de 1re et 2e Harmos, 80 % de parents à l’aide sociale. De nouveaux problèmes de violence montent à la surface dès cet âge.

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Ce n’est pas un luxe

Même si on paraît toucher là à un extrême, la direction de l’école ne différencie pas tellement les Forges des deux autres secteurs scolaires du cercle (qui inclut La Sagne, Les Ponts-de-Martel et Les Planchettes). Au cycle 3, les grands de l’école obligatoire, 12,8 % des élèves sont en classes spéciales. Dans les autres cercles du canton, la proportion varie de 4,5 % à 7,2 % (Neuchâtel ville et environs). En tout, La Chaux-de-Fonds compte ainsi six classes de formation spécialisée aux cycles 1 et 2 des plus jeunes et 17 au cycle 3 (dont une aux Ponts-de-Martel).

Le cercle scolaire de La Chaux-de-Fonds en fait-il trop? « Toutes les mesures prises ici ne sont pas un luxe. Elles visent tout simplement à atteindre les objectifs de l’école. Pour l’avenir de ma ville, je souhaite éviter par tous les moyens l’effet boomerang de la ghettoïsation de toute une population de jeunes » répond Théo Bregnard. Signe des temps, à La Chaux-de-Fonds, toutes ces classes spéciales sont pleines. Et de l’avis de la direction, cela ne suffit pas. Le hic, pour la Ville et le canton : elles coûtent cher, avec moitié moins d’élèves qu’une classe normale.

Des cas bons pour l’AI

D’autres mesures d’accompagnement sont ainsi mises en œuvre pour aider les élèves, comme des soutiens pédagogiques ou intégratifs personnalisés. L’école a déposé auprès de l’Office fédéral des assurances sociales un projet pilote d’une classe pour les cas qui menacent à terme de relever de l’assurance-invalidité. A titre préventif. « Nous avons déjà des cas diagnostiqués AI et d’autres que l’on pressent, d’autres encore avec des difficultés de langage massives et/ou des troubles du comportement », illustre Fabrice Demarle.

Pour notre bien

Cap sur une de ces classes spéciales. Pour la plupart, ils sont en pré-insertion dans le monde du travail. Sur une dizaine de jeunes âgés de 14 à 16 ans, cinq ou six disent savoir ce qu’ils veulent faire : aide-soignante, installateur sanitaire, aide de cuisine, gestionnaire en intendance. Ils n’ont pas encore de place, mais plusieurs partiront en stage. A voir, ils sont plutôt reconnaissants qu’on les suive de près. « C’est pour notre bien qu’on est dans une classe spéciale. On peut mieux travailler », dit par exemple Dylan. Leur prof Frédéric Gailloud dit de cette volée d’élèves qu’ils sont super-méritants.

On sent de l’espoir. Celui du conseiller communal Théo Bregnard? La reconnaissance par le canton que la problématique de ces jeunes en difficulté touche surtout les villes. Pour que celui-ci applique des critères de subventionnement différenciés. Même en temps de crise.

Pourquoi est-ce différent au Locle?

Mais pourquoi Le Locle, où certains indicateurs socio-économiques ne sont pas très bons non plus, est en dessous de la moyenne d’élèves en classe spéciales? Le conseiller communal Jean-Paul Wettstein avance une politique qui ne pousse pas les élèves vers ces classes. Le chef du Service de l’enseignement obligatoire Jean-Claude Marguet relève lui qu’à La Chaux-de-Fonds deux fois plus d’élèves sont dirigés en classe terminale que dans le reste du canton.

Un concept neuchâtelois sur l’enseignement spécialisé est sur les rails, précise-t-il, qui devrait être soumis prochainement au Grand Conseil. Celui-ci s’appuie sur un accord fédéral sur la pédagogie spécialisée, ratifié par le canton, qui privilégie les solutions intégratives (dans les classes ordinaires) aux séparatives. Un groupe de travail incluant les écoles se penchera sur l’évolution à la hausse de ces classes spécialisées, particulièrement à La Chaux-de-Fonds.

Par Robert Nussbaum

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Publié le
mar 16/04/2019 - 11:01
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