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Educavox

Inauguration d’un nouveau régime d’orientation

1 mois 2 semaines ago
Le brevet conditionnant l’entrée en seconde générale et technologique, d’après Claude Lelièvre, remet en question le principe du collège unique,…Le choc des savoirs ou le choc du pouvoir

Philippe Watrelot, ancien professeur de Sciences économiques et sociales, formateur, militant pédagogique écrit[1] : « Les fameux groupes de niveau ne sont pas un dispositif isolé. Ils s’inscrivent dans un ensemble plus vaste. Le « choc des savoirs » annoncé par Gabriel Attal le 5 décembre 2023 et que Nicole Belloubet va devoir appliquer constitue une remise en cause du « Collège unique ». Volonté délibérée ou juxtaposition de mesures ? Au final, c’est bien une contre-réforme du collège qui est à l’œuvre. »

Comme le rappelle Claude Lelièvre[2], « Le brevet n’a jamais été une condition pour entrer en seconde. Il a toujours été conçu comme un examen terminal. En faire l’examen de l’entrée en seconde changerait profondément son rôle (par-delà ses modalités changeantes) et serait choisir que la finalité du collège est d’être une propédeutique au lycée et non pas la deuxième phase d’une instruction obligatoire (pour tous). » Cette décision remet ainsi en question la fonction du collège, mais également celle du brevet. « Plus que de revoir la manière dont se déroule et s’organise l’examen, il s’agit donc de toucher à sa nature même, c’est-à-dire de changer ses finalités et son rôle. Cette obligation d’avoir le brevet pour entrer en seconde, qui entrerait en vigueur en 2025, serait une nouveauté historique totale car elle n’a jamais existé jusqu’alors. »[3]

De son côté, Jean-Paul Delahaye, Inspecteur général de l’Éducation nationale honoraire et ancien DGESCO, prend la piste juridique pour ce qui concerne la mise en œuvre des groupes de niveaux[4]. Le Ministère a publié un arrêté le 15 mars 2024. « Le problème, c’est que les visas de cet arrêté citent l’article L 322-2 (partie législative du Code, c’est-à-dire un texte supérieur en hiérarchie des normes à un arrêté), qui traite de l’autonomie de l’établissement… » En résumé, l’organisation de groupes de niveau relève de l’autonomie de l’établissement et non du ministère qui semble donc oublier le cadre juridique qu’il a lui-même instauré. Mais comme le dit Jean-Paul Delahaye, non sans humour, « On doit à la vérité de dire que cette autonomie n’a jamais été vraiment concédée par l’administration centrale du ministère toujours très prescriptive, tous gouvernements confondus, ni d’ailleurs été fortement réclamée par les personnels, c’est le moins que l’on puisse dire. »

Est-ce qu’il n’en serait pas de même pour le coup du brevet nécessaire pour le passage en classe de seconde GT ?

Un texte bien curieux !

Pour ce qui concerne le nouveau rôle du brevet, le Ministère passe par la publication d’un décret « relatif à la mise en place, pour l’année scolaire 2024-2025, d’une phase pilote de l’instauration d’un cycle préparatoire à la classe de seconde »[5]. C’est, semble-t-il, le seul texte publié sur cette question.

L’article 1 comporte l’indication suivante : « Cette classe préparatoire à la classe de seconde est accessible aux élèves admis dans une classe du cycle de détermination des voies générale et technologique ou de seconde professionnelle n’ayant pas obtenu le diplôme national du brevet l’année scolaire précédente et qui sont intéressés par ce dispositif. »

En bon français cela suppose que l’élève peut accéder s’il le veut à cette classe et notamment parce qu’il serait intéressé par ce « dispositif ». Aucune obligation formelle n’est indiquée.

L’article 2 concerne ce qui se passe à la suite de cette classe : « À l’issue de la classe préparatoire à la classe de seconde, un changement de voie d’orientation peut être réalisé, en fin d’année, sur demande écrite des représentants légaux ou de l’élève majeur, après avis du conseil de classe. »

Que veut dit « un changement de voie d’orientation » ? Nulle part il n’est indiqué que cette classe préparatoire à la classe de seconde » serait une voie d’orientation en elle-même. Le « changement » de voie ne peut donc être que l’entrée en seconde professionnelle ou la première année de CAP, cette classe préparant à la « seconde » (remarquer l’absence de qualification de cette seconde) ne peut qu’ouvrir la voie de la seconde GT. Mais remarquons également que cette classe ne tomberait plus alors sous la réglementation des procédures d’orientation.

Ce décret est promulgué notamment vu le code de l’éducation, notamment ses articles L. 311-2 et D. 333-2. L’article L311-2 (Version en vigueur depuis le 22 juin 2000) indique : « L’organisation et le contenu des formations sont définis respectivement par des décrets et des arrêtés du ministre chargé de l’éducation. Des décrets précisent les principes de l’autonomie dont disposent les écoles, les collèges et les lycées dans le domaine pédagogique. »[6] Tiens, coucou, le retour de l’autonomie des établissements.

L’article D333-2 (Version en vigueur depuis le 22 février 2024)[7] présente les trois voies de formation organisées dans les lycées. Aucune nouvelle voie n’est indiquée. Sont indiqués également l’existence de passerelles, de dispositifs d’accompagnement personnalisé et de dispositif de tutorat, nulle par de classe préparatoire à…

Une mise en œuvre problématique

L’article 1 s’ouvre ainsi, en rappelant qu’il s’agit pour le moment d’une expérimentation sur un an : « Pour l’année scolaire 2024-2025 :

1° Dans chaque département, un ou plusieurs lycées relevant du ministère chargé de l’éducation nationale sont identifiés par le recteur d’académie pour mettre en place une classe préparatoire à la classe de seconde ; » Les n° 2 et 3 concerne le ministère chargé de l’agriculture et celui chargé de la mer.

Donc restons sur l’Éducation nationale. A minima, ce dispositif pour l’année prochaine comportera un établissement par département, et cet établissement sera identifié par le recteur. Il faut relever ce verbe « identifier » très curieux dans un décret. Parmi les différents sens de ce verbe, il y a « reconnaître la nature de quelque chose ». Ainsi, certains établissements seraient naturellement propres à recevoir une telle classe. Habituellement les recteurs sont invités, dans ce type de textes, à désigner des établissements ou à ouvrir des appels à candidatures. Il semble bien que ce soit la première fois que cette modalité de l’identification apparaisse dans un texte réglementaire !

Mais un autre point est à relever, c’est la taille de ce dispositif : un établissement et donc une classe par département. Cela suppose un nombre d’élèves extrêmement réduit pour un département à priori, et donc des difficultés de mobilité ou une mise en place d’un système d’internat. À moins que, sur décision du recteur, les bénéficiaires soient réduits à un secteur géographique proche de l’établissement identifié, ce qui suppose que ces établissements du secteur soient également identifiés par la force des choses…

Autre point sensible, la création de ces « classes préparatoires à la seconde » concerne l’année scolaire 2024-2025, mais son alimentation repose sur des mesures d’orientation qui seront prises en juin 2024. Ce qui suppose que les collèges concernés (lesquels) fonctionneront de manière dérogatoire par rapport à la réglementation concernant les procédures d’orientation. Il y aura rupture d’égalité comme disent les juristes. Et l’on attend toujours le décret qui imposera la nécessité de l’obtention du DNB pour passer en seconde GT.

Le bouleversement du principe d’orientation

En préparant mon intervention lors du séminaire du CICUR du 28 mars 2008,[8] j’ai émis l’hypothèse de l’émergence d’une nouvelle conception de l’orientation dont cette nécessité du DNB serait un signe.

Depuis plusieurs années on observe le développement d’évaluations nationales à différents niveaux du système scolaire avec une double fonction, une fonction d’information pour le ministère lui-même sur l’état des acquis scolaires, mais aussi une fonction de référence pour les enseignants (connaître le niveau attendu d’acquisitions) et une fonction d’objectivation de l’évaluation par l’extériorité et la standardisation des épreuves.

Le Conseil national des programmes remarque dans son avis de janvier 2024 : « Dans l’ensemble des pays, les résultats obtenus aux examens nationaux constituent un critère important dans le choix d’orientation de l’élève. La décision relève, dans de nombreux pays, de la responsabilité de l’élève et de sa famille. »[9] Ainsi dans de nombreux pays le diplôme est éclairant pour les familles et les élèves pour prendre leur décision, mais, il n’est en aucun cas nécessaire. Mais pour qu’il le soit en France, faudrait-il encore modifier quelque peu la réglementation.

Si l’on reprend l’histoire des procédures d’orientation, la manière dont est réglementée la circulation des élèves dans le secondaire, on a eu deux grandes et longues périodes. La première repose sur la circulaire de 1890. La décision du passage repose sur le calcul de la moyenne à des épreuves trimestrielles[10]. La norme est ainsi produite par le ministère et s’impose ainsi à tous les acteurs.

À partir des années 60 avec la suppression des épreuves trimestrielles puis surtout les Nouvelles procédures d’orientation de 1973, se met en place un nouveau régime de production de la décision d’orientation jusqu’à nos jours : on laisse aux acteurs locaux la charge de la définition de la norme décisionnelle et nulle trace dans les textes d’une hiérarchisation des voies d’orientation. La régulation des flux se fait par la combinaison locale du développement de la demande scolaire des familles, par les évaluations scolaires des enseignants, et par l’offre de formation locale.

La nécessité du brevet pour passer en seconde GT signerait ainsi la fin de ce régime de l’orientation basé sur les arrangements locaux. L’État reprend la main. Liée à cela, la suppression des correctifs académiques au DNB, entraînant la diminution des diplômés, devrait mécaniquement réduire également les taux de passages en seconde GT et donc à terme l’accès au Supérieur. Donc, plus globalement, c’est la progression scolaire, et donc sociale qui ne serait plus le projet politique.

Bernard Desclaux

Le blog de Bernard Desclaux » Blog Archive » Inauguration d’un nouveau régime d’orientation (educpros.fr)

[1] Philippe Watrelot, Le choc des savoirs est une contre-réforme du collège, https://blogs.mediapart.fr/philippe-watrelot/blog/120324/le-choc-des-savoirs-est-une-contre-reforme-du-college ?.

[2] Claude Lelièvre : « Attal veut mettre fin au collège unique sans le dire » https://www.cafepedagogique.net/2023/12/13/claude-lelievre-attal-veut-mettre-fin-au-college-unique-sans-le-dire/

[3] Claude Lelièvre, Le brevet, futur examen d’entrée au lycée ? https://theconversation.com/le-brevet-futur-examen-dentree-au-lycee-219345

[4] Jean-Paul Delahaye, Groupes de niveau ou de besoin au collège : où est passée l’autonomie des établissements ? https://www.cafepedagogique.net/2024/04/02/groupes-de-niveau-ou-de-besoin-au-college-ou-est-passee-lautonomie-des-etablissements/

[5] Décret n° 2024-229 du 16 mars 2024 relatif à la mise en place, pour l’année scolaire 2024-2025, d’une phase pilote de l’instauration d’un cycle préparatoire à la classe de seconde https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049286397

[6] Article L311-2 (Version en vigueur depuis le 22 juin 2000) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006524739e

[7] Article D333-2 (Version en vigueur depuis le 22 février 2024) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000049173356

[8] Huitième séance du séminaire CICUR : 28 mars 2024, https://curriculum.hypotheses.org/5706

[9] Le CSP, Avis sur l’organisation des enseignements au collège, Janvier 2024, p. 12, https://www.education.gouv.fr/media/160317/download

[10] Desclaux, B. (17 juin, 2012). Aux origines du conseil de classe. https://blog.educpros.fr/bernard-desclaux/2012/06/17/aux-origines-du-conseil-de-classe/

  • Orientation
    Desclaux Bernard

    De la maternelle au lycée : excellence éducative et bien-être à l'École pour accompagner les élèves à s’approprier le monde

    1 mois 2 semaines ago
    La Mission laïque française, réseau mlfmonde, forte de son expérience d’acteur pionnier de l'enseignement français à l’étranger, depuis plus de…À l’heure où l’éducation traverse les frontières, les établissements scolaires français à l’étranger font face à des enjeux et défis stratégiques cruciaux, en particulier à l’école maternelle.

    Ce plan consiste en « des plans », un par établissement, adapté au contexte local de chaque pays. Il vise à donner toutes les clefs aux chefs d’établissements afin de mettre en œuvre les environnements éducatifs de qualité pour améliorer la première expérience de l’école pour l’enfant et ses parents :

    • pédagogie aux apprentissages exigeants ;
    • plurilinguisme en dialogue avec les cultures locales, françaises et langue anglaise renforcée ;
    • parents partenaires de la vie scolaire et éducation à la citoyenneté ; 
    • recherche du bien-être de l’élève dans un “cocon” à taille humaine où les camarades de classe deviennent des amis pour la vie.

    Cette démarche est le fruit d’une mobilisation sans précédent de l’ensemble du réseau en faveur d’un engagement international pour la réussite des élèves, futurs citoyens ouverts sur le monde.

    Les 4 axes pédagogiques prioritaires Des apprentissages solides

    La Maternelle mlfmonde favorise la maîtrise des apprentissages par une structuration de l’emploi du temps autour des pics de vigilance de l’enfant ; en adossant les apprentissages sur un continuum éducatif et pédagogique avec les crèches, avec le périscolaire et avec l’élémentaire (analyse des premières évaluations au primaire pour ajuster le geste didactique) ; en faisant du développement du lexique et des compétences mathématiques chez l’enfant, la priorité absolue ; les élèves découvrent les sciences autour des STIAM.

    En route vers le plurilinguisme (français, langue locale, anglais)

    La Maternelle mlfmonde s’inscrit dans l’objectif de l’établissement : la certification pour tous en anglais au niveau C1. Ainsi, dès la maternelle, le temps d’exposition aux langues est pensé et graduellement augmenté, adossé à des activités extra-scolaires complémentaires permettant aux enfants un bain linguistique varié.

    Bien être pour bien apprendre

    La Maternelle mlfmonde répond aux besoins physiologiques des enfants et s’appuie pour cela sur les derniers apports de la recherche (3h d’activité physique par 24h, classe dehors, pas d’assise prolongée ; emplois du temps respectant le biorythme des enfants).

    La Maternelle mlfmonde développe les compétences prosociales chez les tout petits (jeux coopératifs, empathie, estime de soi, reconnaître ses émotions).

    Elle gomme le stress lié aux apprentissages : travaux non intrusifs et non stigmatisants, progressifs… 

    Le partenariat avec les parents

    La Maternelle mlfmonde inclut les parents dans le projet pédagogique et éducatif de 15 ans de l’enfant. Un accueil personnalisé les intègre à l’ensemble des activités de l’école jusqu’au lycée en les accompagnant dans l’ensemble de la scolarité de leur enfant.

    Une maternelle de l’avenir dans les établissements réseau mlfmonde

    L’école primaire Jacques-Majorelle Benguerir au Maroc, annexe du groupe scolaire Majorelle de Marrakech, rejoint les onze autres établissements français internationaux du réseau OSUI* au Maroc. Cette nouvelle école qui s’ouvrira en septembre 2024, mettra l’accent sur l’épanouissement des élèves dans un environnement multiculturel et plurilingue avec anglais renforcé dès la maternelle. Elle s’inscrit dans le cadre de l’émergence et du développement de la ville intermédiaire de Benguerir où vient de se créer le nouveau Campus de l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P). De nouveaux partenariats en vue avec différents acteurs de la région.

    *Au Maroc, le réseau mlfmonde est implantée sous le sigle OSUI (Office scolaire et universitaire international), association soeur à but non lucratif créée en 1996.

    Une maternelle bienveillante pour le bien-être et l’épanouissement des élèves au Grand Lycée Franco-Libanais, à Beyrouth, Liban. Une initiative novatrice prend forme en maternelle pour aborder la question de la lutte contre la violence et le harcèlement à l’école : le jeu des 3 figures de Serge Tisseron. Il s’agit d’un jeu de rôle interactif, visant à sensibiliser les élèves à ces problématiques importantes tout en leur offrant un espace ludique pour explorer des solutions et des comportements appropriés.

    D’autres exemples à découvrir sur cette pageD’autres exemples à découvrir sur cette page

    Les atouts des établissements français à l’étranger du réseau mlfmonde

    Source de la publication : La Maternelle mlfmonde - Mission laïque française

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    https://www.mlfmonde.org/colloque-en-ligne-la-maternelle-mlfmonde/

     

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      An@é

      Les dangers des écrans pour nos enfants : des fantasmes aux réalités

      1 mois 2 semaines ago
      Eléments du débat qui a eu lieu le 26 mars 2024 dans le cadre des Journées des Libertés numériques (JDNL),…

      Les smartphones ont pris une place prépondérante dans la vie de nos adolescents, l'âge du premier portable s'avance et le temps d'écran augmente. Difficile de ne pas être perdu ou inquiet face à ce phénomène : mais qu'en est-il réellement de leur usage ? L'écran est-il un miroir toxique et isolant ou offre-t-il également de nouvelles formes de créativité et de sociabilité ?

      Julia GLEY

      Les écrans occupent une place prépondérante dans les pratiques à la fois culturelles scolaires et sociales des enfants. Cela a donné lieu à énormément d’inquiétude, de méfiance de la part des parents, des enseignants, des médiatrices, mais aussi des professionnels de santé et des chercheurs, chercheuses. Ces peurs ont été largement relayées par les médias. Il y a aussi beaucoup de littérature scientifique qui a été produite à ce sujet et qui pourra nous renseigner au cours de cet échange. Il sera conduit selon 3 angles principaux : les écrans et l’apprentissage ; les écrans et la relation sociale ; comment on se construit à travers les écrans.

      Les écrans désignent plusieurs objets et contextes : réseaux sociaux, sur smartphone, pratique de jeux vidéo, travail sur un ordinateur ou panneau publicitaire. Entre posture technocratique et les dérives que le numérique peut générer, cette technologique est indispensable et peut créer des genres de dissonance cognitives entre ce qu’on critique et le fait que notre vie est continue sur nos écrans. Cela souligne les enjeux de responsabilité individuelle et collective ? Cela peut amener une culpabilité même quand on est enfant ou ado. Comment grandit-on dans cette complexité ? Qu’est ce qui ressort de vos échanges avec eux ?

      Anne CORDIER 

      Je crois qu’il faut replacer les choses. On est sur un sujet qui est politique, qui interroge la vie de la cité, le vivre ensemble. Quel que soit leur âge ou leur milieu social, ce sont des acteurs. Pourquoi y aurait-il des dangers spécifiques pour les enfants ? Et pour qui parlerait-on forcément de danger ?

      Lorsqu’on les écoutent ils sont les premiers à interroger le monde et pas interroger le numérique ou les écrans, ce qui ne veut rien dire. On parle bien de la vie, du rapport à l’autre. On voit depuis quelques années les enfants les plus jeunes faire entrer dans les échanges les questions autour de la protection de l’image de soi, des données personnelles.

      Exemple concret, un projet sur les enfants et les cultures numériques des enfants des cycles 2 et 3, entre le CP et la 6ème : tous les enfants nous parlent, comment je gère mes publications en ligne, du consentement à l’image, ... A un moment il faudrait peut-être que l’on cesse de penser que nos enfants sont des êtres épistémiques descendus du ciel. Ils sont les héritiers de leurs parents, d’une éducation, de ce qu’on leur montre et de ce qu’on leur transmet. Les problématiques ont évolué. Dans les années 2010 ils étaient intrigués par le fonctionnement des moteurs de recherche : aujourd’hui ce sont les questions de protection de l’image de soi.  Ils veulent garder une maîtrise. Tout le discours sur le respect de l’autre infuse dans les pratiques numériques.

      Fabien LEBRUN

      Concernant le thème des enfants et des écrans, on peut partir d’un contexte général systémique. Depuis 20 ans on parle de révolution numérique, culturelle, sociale, anthropologique. Je pense que c’est avant tout une révolution économique et industrielle qui se situe dans un mode de production et de consommation, à savoir le capitalisme, qu’on soit pour ou contre.

      Elle a impulsé de nouveaux comportements. Elle est décrite par de nombreux chercheurs. Certains parlent d’économie de l’attention, de « guerre de l’attention », de « capitalisme de plateforme », de « capitalisme de surveillance ». Cette économie repose sur la captation de données personnelles au travers des réseaux techniques et des plateformes marchandes. Ceci a contribué à renouveler voire à étendre la société de consommation. A travers des témoignages et des échanges avec de nombreux jeunes, la phrase « je suis addict » ressort souvent, mais peut-être pas plus que chez les adultes. L’économie de l’attention détermine certaines formes de dépendance, d’addiction.

      1. Les écrans et l'apprentissage (Eléments) Anne CORDIER

      Les capacités d’attention n’ont pas bougé si on les compare sur 20 ans. Le problème se sont les éléments distracteurs. L’objet smartphone lui-même fonctionne sur un principe vieux comme le monde : le design émotionnel liant la conception d’un objet, son inscription dans son écosystème de vie personnelle et sociale et le marketing qui conçoit l’objet de façon qu’il y ait un attachement un doudou numérique ?).

      Fabien LEBRUN

      L’enquête PISA 2015 conclue « que malgré l’investissement considérable en ordinateurs, connexions internet et logiciels éducatifs, il n’y a pas de preuve solide montrant qu’un usage accru des ordinateurs conduise à de meilleurs scores en mathématiques et en lecture. Le numérique à l’école n’améliore pas les résultats des élèves ». Ce type de constat se multiplie. La conclusion d’un avis du rapport du conseil supérieure des programmes (juin2023) dénonce « la part des logiques économiques ou clientéliste à défaut d’objectifs pédagogiques définis », et recommandent de ne pas considérer l’éducation nationale comme un marché.

      Anne CORDIER

      L’augmentation des équipements n’a pas d’effet propre sur le développement des compétences. On doit cibler le développement des connaissances et des compétences, au-delà de la mise à disposition aux technologies.

      2. Les écrans et la relation (Eléments)

      La relation intra familiale est-elle bouleversée ? On regardait autrefois la télévision ensemble et à heures fixes (« la télé a ramené le père à la maison », cité par A. Cordier). Les écrans nomades à usages personnels sont maintenant porteurs de ce que Sherry Turkel décrit comme le contexte d’être seul ensemble.

      Anne CORDIER

      Comme cela a été montré, la télévision en fait est un objet de conflit au sein de la famille qui vient altérer les liens familiaux. Le je et nous a toujours été en jeu (comme pour la radio qui provoque la dissolution des discussions en famille) : c’est une façon de revoir nos relations. François de Singly parle d’individualisme connecté. Le smartphone va cristalliser la question des choix et l’autonomisation à travers l’héritage familial. On a le mythe d’une conversation d’« avant » les écrans.  Les adolescents regrettent le temps que les parents passent sur leurs écrans. Ce peut être aussi un support de sociabilité. L’usage numérique n’est pas la cause des différences socio-culturelles.

      Fabien LEBRUN

      Dans la vie quotidienne, par exemple dans les transports, les gens sont focalisés sur leur smartphone. Il est difficile d’évaluer et d’observer un changement profond des relations humaines et sociales. De plus en plus de technologies et de moins en moins de relations sociales ? (Sherry Turkel). Le temps de sociabilité est moindre, notamment chez les adolescents. Une forme de solitude et d’isolement s’est intensifié ces vingt dernières années. Des auteurs parlent de technoférence, de communication qui se fait toujours par un écran et qui a des conséquences sur l’apprentissage et le développement des petits.

      Anne CORDIER

      Il n’y a pas de lien de corrélation et encore moins de causalité entre usage des écrans (ou pratique des jeux vidéo) et violence. Le numérique devient un peu le « ce à cause de quoi » sans aller voir plus profondément. Le monde numérique n’est pas isolé du monde social.

      Fabien LEBRUN

      Il faut être prudent : vu la multitude des contenus inappropriés et notamment violents, ils véhiculent de la violence, en multiplie l’exposition à une présentation réaliste par l’image. La moitié du temps est consacré aux écrans. Les problèmes sociétaux doivent être traités avec le fait technologique et numérique.

      3. Apports des technocultures dans la construction des enfants et des ados. (Eléments) Anne CORDIER

      IL existe un sentiment d’illégitimité culturelle. Je ne vois pas en quoi l’usage récréatif viendrait faire écran, sans jeu de mot, à l’apprentissage et au développement de compétences. L’activité s’accompagne d’une forme de plaisir, qui peut aussi passer par l’effort. C’est ce que montrent les productions, par exemple, des écritures numériques. Cela ne vient pas dégrader la qualité de l’activité qui est mise en place.

      Fabien LEBRUN

      Je vais répondre à travers une digression. Il est important de parler d’une éducation au numérique (et pas seulement par) : comment le numérique fonctionne, qu’est-ce que cette économie de l’attention, d’où viennent tous ces smartphones, ... On apprend ainsi beaucoup d’autres choses, concernant les ressources naturelles notamment. On ne connait pas les conditions d’apparition et de faisabilité de notre vie numérique.

      Anne CORDIER

      On n’accède pas à une culture numérique par les usages. On accède à de l’information dans le meilleur des cas, et après il faut être capable d’en faire une connaissance. A l’école c’est le rôle de l’EMI, éducation aux médias et à l’information. Les paniques morales autour des écrans font qu’aujourd’hui, éduquer au numérique dans la classe, c’est presque devenu un acte de résistance.

      Julia GLEY

      Qu’est-ce qu’on est en droit d’exiger des plateformes et des entreprises numériques pour qu’elles prennent leurs responsabilités ?

      Anne CORDIER

      D’abord, appliquer la loi. Il y a une loi qui vient d’arriver. Le règlement sur la protection des données, 2018, le Digital Service Act et le Digital Marketa Act dans le cadre européen

      Fabien LEBRUN

      On doit exiger beaucoup. Ils ont une action plutôt délétère sur plusieurs champs de la société. Sur l’aspect de la production une quarantaine d’états aux Etats Unis vont lancer des plaintes judiciaires contre des plateformes de types Tik Tok ou le groupe Méta pour fragilisation de la santé mentale des jeunes et notamment des adolescentes. La question de la régulation se pose en rapport à cette accumulation de pouvoir et de puissance des Bigtech.

      Débat à retrouver en intégralité :

      https://mediaserver.univ-nantes.fr/videos/les-dangers-des-ecrans-pour-nos-enfants-fantasme-ou-realite/

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        Morandi Franc

        Pierre Ozer : explorer les marges, rêver demain et remettre le sensible et l'émotion au cœur de nos vies

        1 mois 2 semaines ago
        L'ULiège, Fabrique des Possibles : Le développement durable, sous toutes ses facettes, se pense aussi au sein de l’Université. Qu’est-ce…

        Rencontrer le Pr Pierre Ozer, cheville ouvrière de Nourrir Liège et à l’initiative de la première édition du Festival Rêve Général, c'est plonger dans l'univers d'un homme passionné par les questions de transition et par la construction d'un monde juste et durable.

        Climatologue spécialisé dans les processus de désertification, dans la gestion des catastrophes naturelles et dans les stratégies d’adaptation au changement climatique, Pierre Ozer enseigne ces matières dans cinq facultés de l’Université de Liège.

        « Je suis convaincu que la transdisciplinarité est une clé essentielle pour faire face aux enjeux de demain. Nous sommes de plus en plus nombreux à nous rendre compte que pour donner plus d’épaisseur à nos recherches et enseignements, nous devons nouer des partenariats avec d’autres disciplines. Cette transdisciplinarité est également souhaitée par les jeunes d’aujourd’hui, souvent animés d'une véritable conscience écologique. »

        Révolution intellectuelle

        Comment mettre en lien des personnes d’horizons divers ? Comment semer les graines du changement ? Autant de questions qui animent Pierre Ozer.

        « Il faut sortir du réel qu’on nous impose et partir explorer les marges. À travers des modalités de cours innovantes, en introduisant Nourrir Liège et le festival Rêve Général sur le campus, nous mettons en place les conditions pour que d’autres possibles émergent, pour qu’il y ait des croisements de regards. Et pour que dans 5, 10, 20 ans, les jeunes puissent ouvrir d’autres voies. Le festival Rêve Général est un dispositif unique qui réconcilie art, science et démocratie au travers d’ateliers, débats, spectacles, conférences …, c’est une sorte de « ZAD », Zone À Défendre intellectuelle volontairement éphémère, mais qui pourrait devenir structurelle. Quand tout s’effondre, on n’a plus d’autre alternative que de rêver à un avenir désirable. Et une des manières de faire, c’est de remettre du sensible et de l’émotion au cœur de nos vies. L’un des objectifs du Festival est aussi de créer des possibilités d’échange en mixant les publics : créer des liens, permettre à des parcours de se croiser et faire naître des éclairages de ces rencontres. »

        La transition ne se fait pas dans un labo

        « Arriver à des conclusions de recherche, les publier dans des revues spécialisées, en parler dans des conférences de haut vol, c’est formidable. Mais la transition ne va pas se faire dans un labo ! Il faut aussi faire en sorte que ces constats parviennent jusqu’aux différents niveaux de pouvoir et irriguent les politiques publiques. »

        Engagé sur la scène sociétale, Pierre Ozer a déjà publié une série de cartes blanches dans la presse et est notamment à l’origine du Festival Nourrir Liège, qui a contribué à faire de Liège la référence en Europe en matière de transition alimentaire.

        « Je ne peux pas dénoncer des choses dans mes cours si je ne me mets pas en action dans mon quotidien », confie-t-il, démontrant ainsi son souci constant d'allier théorie et pratique. « J’ai toujours été guidé par des rencontres. J’adore parler avec des gens issus de tous les milieux. Et quand on est curieux, à force d’échanger avec des boulangers, on finit un jour par mettre les mains dans la farine, puis on veut rendre ce pain accessible aux plus pauvres. En suivant la même logique, après avoir passé la première partie de ma vie dans le parc de Cointe, j’ai fait un grand écart en décidant de m’installer dans le quartier Sainte Marguerite. J’y côtoie plus de 100 nationalités, des cultures et des religions différentes. M’installer dans ce quartier précarisé était presque un acte politique, mais je ne m’en rendais pas compte à l’époque. »

        Explorer d’autres chemins

        Comment les jeunes rêvent-ils leur futur ? Comment peut-on les accompagner sur cette voie ? Pour Pierre Ozer, l'université est un lieu où l'on façonne non seulement des esprits ouverts et brillants, mais aussi des acteurs de demain.

        « Lorsque je demande à mes étudiants et étudiantes en 3e bachelier de créer un village idéal, ils ne se limitent pas à imaginer des modes de mobilité douce et des jardins partagés. Ils repensent toute la gouvernance et proposent des modèles totalement nouveaux basés sur l’échange et l’accès pour toutes et tous aux droits fondamentaux : l’alimentation, les soins de santé, l’éducation, la liberté de se déplacer sans contrainte … Ils ouvrent les champs des possibles, ils explorent d’autres voies. C’est vraiment enthousiasmant et porteur d’espoir ! Il ne s’agit déjà plus de quelques graines semées çà et là. Cette nouvelle génération consciente des enjeux de demain forme déjà une véritable forêt, avec des millions de rhizomes qui partent dans tous les sens. »

        À travers ses actions et ses enseignements, Pierre Ozer inspire non seulement ses étudiants, mais aussi toute une communauté à repousser les limites de l'imagination et de l'action.

        « L’Université s’ancre dans le 21e siècle, fait des tests, mélange les disciplines et introduit le milieu artistique dans le cadre des cours. C’est très important, parce que ça nous permet de rêver et de nous projeter vers la création d’autres voies que celles dans lesquelles nous sommes engagés », conclut-il, invitant chacun à échanger et à participer à la construction d'un avenir plus juste et plus durable.

        Source :  le site de l'Université de Liège

        Pierre Ozer : explorer les marges, rêver demain (uliege.be) 

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          Moës Julien

          Varengeville-sur-Mer : Raphaëlle Peria vogue au creux des valleuses

          1 mois 2 semaines ago
          Au Musée Michel Ciry à Varengeville-sur-Mer, Raphaëlle Peria s’inspire de l’eau, à la fois nourricière et destructrice. Elle vit depuis…Photographies gravées

          Varengeville domine la Manche par une imposante falaise. La beauté de ce site majestueux est irrémédiablement liée à sa fragilité. Gorgée d’eau, la falaise s’effrite et connaît d’importants éboulements menaçant l’existence même de l’Église Saint-Valery, le cimetière marin qui l’entoure et certaines habitations. Cette eau omniprésente offre une végétation luxuriante, Varengeville est connu pour ses jardins paysagers.

          Au Musée Michel Ciry – ouvert en 2012 et bâti dans la propriété du peintre face à sa demeure, Raphaëlle Peria (née en 1989) expose des photographies, des feuilles d’or gravées, des céramiques et des dessins. Sur tout un pan de mur, un papier peint reproduit Sans oser lui parler. Cette invitation à flotter sur l’eau est le décor réalisé pour la Drawing Society.

          La plasticienne utilise la technique de la gravure qui a été un des médiums privilégiés par Michel Ciry (1919-2018). Le déclic pour la photographie est venu pendant ses études aux Beaux-Arts. Partie en voyage, elle a réalisé plus de 13 000 photographies. Elle ne savait pas comment traiter cet important corpus et s’est questionnée sur la photographie. Roland Barthes a notamment défini la photographie par le punctum, point témoin de ce qui a été vu, vécu à un moment précis. En constatant que ses souvenirs commençaient à s’effacer ; elle a décidé de déformer les photographies en les creusant comme des plaques de gravure. Le procédé se mêle à l’imaginaire, Raphaëlle Peria fait rejaillir des fragments et réinvente des paysages.

          Au fil de l’eau

          En résidence au FRAC Picardie, elle a installé son atelier sur une barque et a parcouru les Hortillonnages – jardins flottants d’Amiens -, s’intéressant à des plantes auxquelles personne ne porte attention. Native d’Amiens, elle a été marquée par les motifs floraux de la Cathédrale d’Amiens. Elle a conçu des céramiques sur lesquelles elle a appliqué le grattage d’image – les sept vases exposés au Musée Michel Ciry symbolisent les sept chapelles de la Cathédrale d’Amiens. En s’approchant, on découvre le travail minutieux qui met en relief toutes ces herbes qui se reflètent dans l’eau. Pour ciseler la matière, elle utilise la fraise des dentistes – sa mère est dentiste et en observant ses travaux, elle lui a fait cette suggestion. Elle travaille les textures, illumine le blanc qui peut devenir argenté pour les feuillages.

          Raphaëlle Peria a suivi les cours d’eau jusqu’à Flaverolles près de Dreux, en Normandie. A Varengeville, elle s’est promenée dans les jardins et a découvert les mares qui l’ont fascinée : « Il y a tellement d’eau que les arbres sont parfois au milieu de l’eau. » Des photographies et le papier-peint montrent des éclats de lumière, les effets miroitants des arbres et des feuillages.

          L’œuvre exposée au sol provient d’une approche inédite, Raphaëlle Peria fait apparaître des plantes sur un linoléum gravé. Pour la première fois, elle a aussi réalisé des œuvres à 80 mètres de haut, en utilisant un drone. Elle souhaitait « mettre à l’honneur l’arbre et les couleurs de Varengeville ».

          Fatma Alilate

          Exposition Vogue au creux des valleuses de Raphaëlle Peria
          Musée Michel Ciry, Varengeville-sur-Mer
          Commissariat : Aurélie Nourry, directrice du Musée Michel Ciry, Fanny Robin, directrice artistique de la Fondation Bullukian
          Exposition réalisée dans le cadre du Festival Normandie Impressionniste, en collaboration avec le Musée Michel Ciry, la Fondation Bullukian et la Galerie Papillon.
          Jusqu’au 16 juin 2024

          Photos : Les arbres de Varengeville de Raphaëlle Peria, Musée Michel Ciry, Varengenville-sur-Mer © Fatma Alilate
          Exposition "Vogue au creux des valleuses" de Raphaëlle Peria, Musée Michel Ciry, Varengenville-sur-Mer © Fatma Alilate

          • Arts et culture
            Fatma Alilate

            Comment l’accès à l’eau impacte durablement le développement durable et économique d’un pays

            1 mois 2 semaines ago
            Bien que les éléments politiques et économiques soient reconnus comme des moteurs du progrès national, l'importance de l'eau et de…

            L'accès à l'eau sur notre planète présente une répartition inégale, avec un petit groupe de pays, nommément l'Inde, le Canada, la Chine, la Russie, l'Indonésie, les États-Unis, le Brésil, le Congo et la Colombie, qui détiennent 60% du débit annuel global d'eau. En dépit du fait que 73% de la population mondiale ait accès à cette ressource cruciale en 2022, ce sont principalement les pays en voie de développement qui ressentent le plus durement les effets de sa rareté.

            D'après les projections de l'OCDE [1], la demande globale en eau est susceptible de croître de 55% d'ici 2050, une augmentation attribuable à l'expansion urbaine et à la croissance démographique mondiale.

            L'Organisation des Nations-Unies alerte sur le fait que si des améliorations significatives ne sont pas réalisées, des milliards d'individus pourraient se retrouver incapables d'accéder à cette nécessité fondamentale d'ici 2030, nécessitant une multiplication par quatre des efforts actuels.

            Face à cet enjeu crucial de la décennie, une collaboration étroite entre les autorités gouvernementales et les organisations non gouvernementales est impérative pour garantir un accès élargi à l'eau. L’importance des enjeux liés à l'eau se révèle d'autant plus dans le contexte où un cycle économique prospère dépend largement de l'accès à cette ressource naturelle. La pénurie d'eau potable et l'absence d'infrastructures sanitaires élémentaires, telles que des toilettes dans certaines écoles, entraînent une propagation des maladies et augmentent le taux d'absentéisme des élèves. Cette situation impacte particulièrement les jeunes filles, qui se voient souvent contraintes à manquer l'école durant leurs menstruations [3].

            Au-delà des répercussions sur l'éducation, l'eau occupe une place centrale dans la problématique de la malnutrition.

            L'insalubrité de l'eau, source de maladies telles que la diarrhée ou les infections intestinales, contribue à une assimilation insuffisante des nutriments, à une baisse de l'appétit et à une déshydratation accrue, particulièrement chez les enfants [4]. De surcroît, une disponibilité limitée en eau freine considérablement les activités de production alimentaire, tant dans le domaine de l'élevage que de l'agriculture, et affecte également la préparation des aliments [5]. D'après l'Organisation Mondiale de la Santé, réduire le temps consacré à la collecte d'eau et diminuer les incidences des maladies liées à l'eau libérerait du temps pour des activités économiquement plus avantageuses, stimulant ainsi la croissance économique [6].

            Au cours des dernières années, un nombre croissant d'Organisations Non-Gouvernementales s'est investi dans la lutte pour faciliter l'accès à l'eau potable, notamment dans les zones défavorisées.

            Parmi ces acteurs, l'ONG LIFE s'est distinguée par son engagement dans cette cause, principalement en Afrique et dans certaines parties du Proche-Orient et du Maghreb. Cette organisation a réussi à se positionner comme un acteur clé dans le domaine, grâce à la réalisation de projets d'envergure tels que la construction de plus de 2 000 puits et infrastructures hydraulique. La stratégie de LIFE consiste à voir au-delà de la simple fourniture d'eau : elle envisage la mise en place de points d'eau comme un levier essentiel pour améliorer la santé, l'éducation et l'environnement des communautés bénéficiaires. Parallèlement, LIFE soutient également des projets comme les cantines scolaires, contribuant ainsi à renforcer l'assiduité des élèves et à leur offrir une nutrition adéquate.

            La démocratisation de l’accès à l’eau constitue donc le point d’entrée à des politiques plus larges de développement pour les populations concernées.

            « Une fois que vous avez réglé, au moins en partie, le problème de l’accès à l’eau potable, vous pouvez développer d’autres actions, et agir sur l’éducation ou l’environnement. Mais il ne sert à rien de construire une école si les enfants sont obligés de passer leurs journées à s’acquitter des corvées d’eau », résume Fanny Fernandes, directrice exécutive de l’association [7][8].

            Tout comme LIFE, des centaines, voire des milliers d'ONG à travers le monde, se sont mobilisés autour de la question de l'accès à l'eau potable, jouant un rôle fondamental dans le soutien aux populations en besoin. Grâce aux efforts conjugués d'organisations telles que Charity : water [9], WaterAid [10] et Water.org [11], plus de 108 millions de personnes ont désormais accès à une source d'eau potable, marquant des progrès significatifs dans ce domaine crucial.

            Ces associations jouent également un rôle central pour sensibiliser et informer la population sur les possibilités d’accès généralisé à l’eau.

            « Ce n'est pas un problème d'approvisionnement ; c'est un problème de distribution. Et je pense qu'il y a ce sentiment que, parce que nous allons passer de 7 milliards à 8 milliards puis à 9 milliards, et que tout le monde s'agite à propos de la rareté de l'eau et de la sécurité hydrique, nous devons dissiper l'idée qu'il n'y aura pas assez d'eau pour les pauvres—car ce n'est tout simplement pas vrai. », déclare le célèbre acteur et producteur américain Matt Damon, co-fondateur de Water.org [16].

            Ces efforts ne font pour autant pas toujours l’unanimité parmi la population. Scott Harrison, fondateur de Charity water, révèle à quel point les ONGs peuvent susciter la défiance parmi la population :

            « J'ai réalisé cependant que beaucoup de mes amis ne faisaient pas confiance aux associations caritatives. En fait, 42% des personnes en Amérique ne font pas confiance aux œuvres de bienfaisance et 70% pensent que les associations gaspillent de l'argent. » [17]. Gagner la confiance des donateurs, voilà un véritable défi de ces associations caritatives.

            En complémentarité des actions des ONGs, les gouvernements des pays développés sont sollicités pour contribuer significativement à combattre la rareté de l'eau dans certaines zones.

            Depuis 2011, le Royaume-Uni s'engage dans le financement de projets WASH, des initiatives centrées sur la promotion de l'accès à l'eau salubre, l'établissement d'infrastructures sanitaires appropriées et la sensibilisation aux bonnes pratiques d'hygiène [12]. De son côté, l'Union Européenne a mis sur pied la Facilité ACP-UE en 2004, dans le but de soutenir l'assainissement de base dans les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique [13].

            Toutefois, les fonds alloués restent insuffisants au vu des enjeux actuels, le Royaume-Uni ne contribuant par exemple qu'à hauteur de 2% au financement des initiatives WASH.

            Il apparaît donc nécessaire d'augmenter ces engagements financiers pour assurer des avancées concrètes et répondre à l'Objectif de Développement Durable n°6 fixé par les Nations Unies, qui vise à "assurer l'accès de tous à l'eau et à l'assainissement de manière durable" [14]. L'appel à l'action lancé lors de la Conférence des Nations Unies sur l'eau en 2023, qui reconnaît l'eau comme un vecteur essentiel de développement économique, devrait encourager les pays membres à intensifier leurs efforts et à investir davantage dans la garantie d'un accès universel à l'eau potable [15].

            Assurer un approvisionnement équitable en eau est essentiel pour soutenir le développement durable des pays émergents. Cette ressource doit être placée au sommet des agendas des gouvernements et des organisations non gouvernementales, étant donné son rôle fondamental dans l'avancement de l'éducation, l'amélioration de la santé publique et la création d'opportunités économiques. De plus, garantir un accès universel à l'eau pourrait réduire significativement les conflits nés de la compétition pour cette ressource précieuse, illustrés par les tensions dans le bassin du Nil. Les défis posés par le changement climatique, tels que les sécheresses et les inondations, risquent d'exacerber la rareté de l'eau et les disputes qui en découlent. Reconnaître l'importance cruciale de l'eau dans le progrès économique des Nations et prendre des mesures appropriées représente donc un des défis majeurs de notre époque.

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              Boivin Jean

              Les Cahiers du Louvain Learning Lab

              1 mois 2 semaines ago
              L’équipe du LLL - Louvain Learning Lab - vous propose ses cahiers pour vous permettre d’explorer différentes facettes de la pédagogie…Des cahiers pour explorer différentes facettes de la pédagogie universitaire

              Les cahiers sont vendus en ligne au prix de 15 euros sur le site des Presses universitaires de Louvain.

              Sauf mention contraire, la version pdf est mise à disposition gratuitement, sous la licence Creative Commons BY-SA, via la plateforme des OER de l'UCLouvain. Cette licence permet d’utiliser l’oeuvre, de l'adapter et de la partager en citant le nom des auteurs et autrices. Par ailleurs, toute diffusion d'une création nouvelle à partir de cette oeuvre doit se faire selon des conditions identiques.

              Enfin, une version imprimée est disponible gratuitement pour les membres de la communauté universitaire UCLouvain, sur demande auprès d'un·e membre du LLL.

              Le LLL a aussi collaboré à l'écriture du Guide pratique pour une pédagogie active : les APP (Apprentissages par Problèmes et par Projets).

              Accès au site et aux ressources

              https://uclouvain.be/fr/etudier/lll/les-cahiers-du-louvain-learning-lab.html

              L’UCLouvain est une université multisite : Louvain-la-Neuve, Bruxelles Woluwe, Bruxelles Saint-Louis, Bruxelles Saint-Gilles, Mons, Tournai, Namur et Charleroi : huit campus où l'UCLouvain propose son offre de formation à proximité des étudiantes et étudiants. https://uclouvain.be/fr/index.html.

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                Moës Julien

                Le Froid durable a-t-il de l’avenir ?

                1 mois 3 semaines ago
                Alors que climat se réchauffe et que les périodes caniculaires sont de plus en plus fréquentes, les populations ont besoin…

                Pourtant l’utilité du « Froid » est avérée pour protéger le corps humain de la chaleur excessive ou pour préparer et conserver des aliments ou des produits pharmaceutiques (vaccins notamment) et il faut aussi donner l’accès au froid à plus d’un milliards de terriens qui en sont privés.

                Dans ce contexte paradoxal nous ne sommes pas impuissants si des méthodes passives sobres en énergie et non polluantes sont réhabilitées partout où cela est possible, si les technologies de production du froid sont améliorées pendant que la production d’électricité est totalement décarbonée.

                Un peu d’Histoire

                Il y a longtemps que l’Homme se sert du froid. C’est en Mésopotamie qu’on trouve les premières traces de l’utilisation du froid pour la conservation des aliments par maintien de température avec de la glace près de trois mille ans avant notre ère; dans la Rome antique des tunnels et des grottes naturelles rafraîchies avec de la glace ont été utilisées pour conserver les aliments.

                Les glacières (enceintes ou meubles rafraîchis avec de la glace) apparaissent au 16ème siècle en Europe où elles sont réservées à des utilisateurs fortunés.

                Les premières machines frigorifiques sont développées à partir du début du 19ème siècle. C’est à partir de 1870 qu’elles sont utilisés dans des abattoirs, chez les brasseurs, etc…

                Le premier réfrigérateur domestique est produit aux États-Unis en 1913 et sa fabrication industrielle date du début des années 1930. C’est à la fin des années 1940 que le “frigo” commence à envahir les foyers.

                Le premier climatiseur moderne est inventé par Carrier en 1902. Il sera d’abord utilisé dans les hôtels, les grands magasins et les cinémas à partir des années 1920. C’est en 1950 que la climatisation arrive dans les résidences privées et qu’elle est proposée en série sur des voitures au États-Unis puis partout dans le monde.

                La production de Froid aujourd’hui Du froid, pour quoi faire ?

                Les utilisations du froid sont très nombreuses que ce soit pour de la réfrigération ou de la climatisation. Nous les listerons ici par trois domaines d’application : froid alimentaire, froid industriel, climatisation.

                Froid alimentaire

                On le trouve tout au long de la chaîne de production-stockage-transport-commercialisation-conservation avec un usage systématique dans de nombreux secteurs : produits laitiers, produits carnés, poissons et fruits de mer, produits transformes congelés ou ultra-frais. Ce sont près de 300 millions de tonnes de denrées alimentaires qui sont sont dépendantes du froid dans le monde, soit 15% de la production totale.

                Froid industriel

                Outre le secteur agro-alimentaire (industrie et commerce) le froid est indispensable dans de très nombreux procédé de fabrication dans l’industrie chimique et pharmaceutique (contrôle de la température), dans les secteurs de la métallurgie (traitement thermique) et de l’énergie (liquéfaction du GNL et du GPL) ainsi que pour la productions et le transport de gaz industriels dont les applications sont très variées : sidérurgie, électronique, extraction d’arômes, emballage sous atmosphère contrôlée, conservation d’échantillons en recherche biologique.

                Climatisation

                La climatisation sert à modifier et contrôler la qualité de l’air dans dans un espace fermé (température, humidité notamment). Elle est utilisée dans les bâtiments privés (habitations, usines, bureaux, commerces…) ou publics (hôpitaux) ainsi que dans les transports individuels ou collectifs.

                Le froid en chiffres

                Le refroidissement d’un corps physique solide, liquide ou gazeux ne se mesure pas avec une grandeur physique spécifique car il consiste à diminuer sa température en « déplaçant » de l’énergie (de la chaleur) qu’il contient.

                Pour apprécier l’importance de la production de froid et ses impacts on peut prendre le nombre d’équipements et estimer leur consommation énergétique et leur émissions de gaz à effet de serre (GES).

                En 2022, d’après le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) :

                – il y avait 5,8 milliards d’équipements produisant du froid parmi lesquels 2,4 milliards appareils de climatisation (dont les 3/4 sont des climatiseurs domestiques), 2,1 milliards sont des appareils de réfrigération ou de congélation domestiques et 1,2 milliards de voitures équipées de l’air conditionné ;

                – la production de froid a consommé plus de 5000 TWh principalement sous forme d’électricité soit 19 % de la consommation totale d’électricité dans le monde

                -les émissions directes et indirectes* de GES se sont élevées à 4,1 milliards de tonnes de CO2équivalent (CO2e) soit 11 % des émissions cette année là. 35 % de ces émissions proviennent de la chaîne du froid (dont les 3/4 chez le consommateur final) 34 % proviennent de la climatisation domestique et 14 % des transports climatisés.

                *les émissions directes sont liées aux fuites de gaz réfrigérants, les émissions indirectes proviennent de l’usage d’énergie fossiles utilisées pour la production de l’électricité qui fait fonctionner ces équipements

                Le « Froid » est aussi un marché estimé à 300 milliards de dollars par an en 2023 (climatisation 60 %, réfrigération 40%)

                Ces données globales ne doivent pas faire oublier que qu’il y a plus d’un milliard de personnes n’ont pas d’accès au froid (notamment en Afrique et en Asie du Sud) ce qui a pour effets de fragilise leur situation sanitaire en cas de très fortes chaleurs, de réduire leurs revenus agricoles à cause des pertes de produits faute de conservation réfrigérée et de limiter la disponibilité de produits pharmaceutiques fragiles comme les vaccins.

                Produire du froid demain

                Dans le sixième rapport d’évaluation (2023), le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) on peut lire : « La chaleur constitue un risque sanitaire croissant, en raison de l’urbanisation croissante, de l’augmentation des températures extrêmes et des changements démographiques dans les pays dont la population vieillit ». Dans ces conditions, il apparaît que les besoins de refroidissement vont continuer de croître qu’il s’agisse de climatisation ou de réfrigération.

                Perspectives

                D’ici à 2050, le nombre et la puissance installée des équipements de refroidissement dans le monde va tripler 5PNUE, 2023). Avec les technologies et usages actuels cela se traduira par le doublement de leur consommation totale d’électricité. Une telle augmentation des équipements de refroidissement nécessiterait environ 2 à 2,8 TW de puissance électrique supplémentaire à efficacité énergétique inchangée .

                Cela entraînera aussi une hausse des émissions gaz à effet de serre à 6,1 milliards de tonnes/an d’équivalent dioxyde de carbone (CO2e), soit plus de 10 % des émissions mondiales estimées pour cette année-là.

                Un telle évolution n’est pas inéluctable car il existe des solutions permettant d’étendre l’accès au froid à tous en réduisant massivement les effets de ce service sur le réchauffement climatique 

                Froid Durable

                Produire du froid durable c’est possible en agissant de concert sur 3 leviers :

                1) Le développement du refroidissement passif

                2/ L’amélioration de l’efficacité énergétiques des équipement parallèlement à la définition de normes plus exigeantes

                3) Le remplacement des fluides réfrigérants hydrofluorocarbonés (HFC) par des fluides frigorigènes moins polluants

                L’activation mondiale de ces leviers sera d’autant plus efficace que les pays développés l’adopteront rapidement car la production de froid dans les pays du G20 qui représentent 82 % des émissions de GES (mesurées en CO2e) que causent l’ensemble des équipements de refroidissement.

                Développement du refroidissement passif

                Les mesures de refroidissement passif peuvent réduire considérablement les charges de refroidissement tout en maintenant le confort thermique intérieur ainsi que les températures dans les chambres froides. Les techniques qui peuvent minimiser l’entrée de chaleur et la demande de refroidissement des bâtiments comprennent une isolation améliorée, des surfaces réfléchissantes, l’ombrage, l’orientation des bâtiments, la ventilation naturelle, la conception urbaine, l’aménagement paysager et l’orientation….

                Dans la chaîne du froid, les équipement fermés doivent être généralisés notamment dans les commerces où les rayons réfrigérés et les présentoirs de produits surgelés sans porte sont encore beaucoup trop nombreux

                Certaines de ces mesures (isolation, ventilation) peuvent être déployées rapidement sur les bâtiments existants (qu’ils soient climatisés ou susceptible de l’être à court terme) de même que des aménagements des espaces urbains comme la végétalisation.

                L’intégration de toutes / des techniques de refroidissement passif se fera progressivement lors de la construction des bâtiments nouveaux autant que dans les futurs aménagement urbains. Il en ssera de même pour l’adoption d’équipements de refroidissement à faible pouvoir de réchauffement climatiques quand il devront être installés là ou le refroidissement passif ne suffit pas. Cela signifie que tant pour les maîtres d’ouvrage que pour les maîtres d’œuvre le cadre technique et réglementaire devra être adapté et que les financements privés ou/et publics soient adaptés ? Et suffisants ? (avec des méthodes innovantes au besoin, voir plus loin)

                De telles mesures peuvent abaisser de 24 % la croissance de la demande de capacité de refroidissement en 2050 (en nombre d’équipement et de puissance installée), et réduire les émissions de 2050 de 1,3 milliards de tonnes de CO2e (PNUE, 2023).

                Amélioration de l’efficacité énergétique

                Les développements en cours montrent que l’efficacité énergétique des équipements peut déjà être significativement améliorée en optimisant les performances des compresseurs (vitesse variable, réduction des frottements, monitoring avancé), en substituant les fluides frigorigènes actuels (HCFC : hydrochlorofluorocarbures), par des produits plus efficients (HFO : hydrofluorooléfines,..) et, quand c’est possible, par l’intégration directe d’énergie renouvelable (solaire thermique et photovoltaïque) dans les systèmes.

                L’accroissement de l’efficacité énergétique globale du parc des équipement de refroidissement sera d’autant plus rapide que seront généralisées des normes ambitieuses comme celles qui sont déjà en vigueur dans certains pays (Chine pour la climatisation – Canada, l’UE, le Japon, le Royaume-Unis et les États-Unis pour la réfrigération).

                L’installation et l’exploitation d’équipements à haute efficacité énergétique, combinés à une réduction de la charge de refroidissement des installations fixes, pourraient réduire la consommation d’électricité de ces équipements en 2050 au niveau de 2022, malgré le triplement de leur nombre. (PNUE, 2023)

                3) Remplacement des fluides réfrigérants

                La plupart des fluides frigorigènes utilisés aujourd’hui sont des gaz à effet de serre 1000 fois plus puissants que CO2. Ainsi le Fréon R-404A , mélange d’hydrofluorocarbures (HFC) couramment utilisé dans les équipements, a un potentiel de réchauffement planétaire (PRP)* très élevé : 3 922. Des réfrigérants au PRP beaucoup plus faibles sont disponibles pour toutes les production de froid (R-32, R-454C / R-455A, HFO-1234ze, HFO-1234yf) et permettent réduire significativement les émissions de GES résultant de fuites ou de relargage lors de l’utilisation des équipements ou lorsqu’ils arrivent en fin de vie.

                * le PRP du CO2 vaut 1

                La transition vers des réfrigérants à faible PRP est déjà amorcée et pourra être accélérée par la mise en place d’un cadre réglementaire contraignant à l’instar de ce qui a été mis en place pour bannir les CFC destructeurs de la couche d’ozone.

                Outre l’attention qui doit être impérativement portée au démantèlement des équipement hors d’usage, il convient aussi de réglementer la revente de matériels anciens émetteurs de ces réfrigérants excessivement polluants.

                Si elles sont complètement mises en œuvre, les mesures ci-dessus peuvent réduire les émissions de GES dues au refroidissement de plus de 60 % d’ici 2050. La réduction des émissions atteindrait plus de 90 % dans un scenario où l’électricité consommée est décarbonée (PNUE, 2023).

                Outre l’intérêt que présentent les économie sur un cycle de vie de nouveaux (éco)systèmes de refroidissement, l’activation à l’échelle mondiale des 3 leviers (froid passif, efficacité énergétique, fluides réfrigérants) ainsi que la diversité des situations financières nationales nécessitera la mobilisation d’une large gamme d’instruments financiers publics ou/et privés.

                En conclusion : le déploiement du « froid durable » ne pourra se faire sans véritable volonté politique, notamment dans les pays du G20.

                Plus généralement, les gouvernements devront (progressivement) intégrer le refroidissement dans une réglementation cohérente et mettre en œuvre des plans d’action nationaux pour assurer la coordination avec toutes les parties prenantes : recherche, industrie, banques et société civile

                Xavier Drouet

                Le Froid durable a-t-il de l’avenir ? - Hommes et Sciences
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                  Drouet Xavier

                  Didactique des sciences, réflexions de chercheurs

                  1 mois 3 semaines ago
                  Dans le cadre des dossiers thématiques publiés sur les Enjeux de la recherche, dans le magazine de l’Acfas [1] apparaissait récemment…L’éditorial du 16 mars, rédigé par Audrey Groleau, UQTR et Ousmane Sy, UQTR

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/editorial-didactique-sciences-apports-autres-disciplines

                  Audrey Groleau est professeure titulaire de didactique des sciences et de la technologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Elle est titulaire de la Chaire d’excellence en enseignement UQTR sur l’appropriation de questions technoscientifiques d’actualité.

                  Ousmane Sy est professeur de didactique des sciences et de la technologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)». Il enseigne la didactique des sciences et de la technologie auprès d’étudiants et d’étudiantes en enseignement au primaire, au secondaire et en adaptation scolaire et il contribue à la formation de chercheurs et de chercheuses en éducation.

                  Extrait :

                  Le dossier regroupe dix contributions prenant la forme de textes de réflexion, d’entrevues et de discussions mettant le plus souvent de l’avant des didacticiennes et didacticiens des sciences et de la technologie. On vise à y présenter les apports de la didactique des sciences et de la technologie, à d’autres champs de recherche. D’emblée, Audrey et Ousmane ont cherché à offrir une définition de la discipline de recherche de la didactique des sciences : l’étude de l’enseignement et de l’apprentissage des sciences et de la technologie selon ses aspects axiologiques, épistémologiques et praxéologiques, soit le pourquoi, le quoi et le comment. … C’est aussi étudier les manières dont les jeunes et moins jeunes transforment leurs conceptions de phénomènes scientifiques et technologiques.

                  L’éducation en plein air ou l’apprentissage des savoirs dans la « vraie vie

                  Jean-Philippe Ayotte-Beaudet, Université de Sherbrooke

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/education-plein-air-apprentissage-savoirs-vraie-vie

                  Jean-Philippe Ayotte-Beaudet est professeur au Département d'enseignement au préscolaire et au primaire de la Faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke et titulaire de la Chaire de recherche sur l'éducation en plein air. Ses principales activités de recherche portent sur l'éducation scientifique et sur l’éducation en plein air au primaire et au secondaire.

                  Extraits

                  L'éducation en plein air regroupe toutes les situations éducatives qui se déroulent dehors et pour lesquelles on a des objectifs de développement ou d’apprentissage. … En sciences et technologie spécifiquement, on peut réaliser des tâches qui s’apparentent à celles des scientifiques, puisque ceux-ci effectuent beaucoup de travail de terrain, souvent en plein air.

                  … une approche expérientielle de l’éducation … s’inscrit généralement dans une démarche fondée sur des lieux connus par et dans la communauté … cultiver une connexion positive avec la nature, ce qui est un fort déterminant de l’action environnementale …

                  … une des recherches de mon équipe portera sur l’observation. …

                  recherche-action …pour dégager le métamodèle de déploiement de l'éducation en plein air au Québec … première année pilote de la construction et de l’analyse d'une base de données longitudinale sur la pratique d'éducation en plein air chez le personnel enseignant du préscolaire jusqu’au secondaire …

                  Je ne perçois pas l’éducation en plein air comme une discipline à enseigner, car c'est avant tout un contexte d’enseignement-apprentissage. … on est dans le monde tel qu'il est appréhendé au quotidien.

                  … L’élément le plus important que j’ai « importé » de la didactique des sciences est assurément la notion de contextualisation des apprentissages. … je pense que l’éducation en plein air nous conduit à nous questionner plus fondamentalement sur les visées de l’école et notamment sur celles de l’éducation scientifique.

                  De quelques réflexions sur la didactique : entretien avec Pierre Chastenay

                  Université du Québec à Montréal

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/reflexions-didactique-sciences-pierre-chastenay

                  Pierre Chastenay est professeur de didactique des sciences à l’Université du Québec à Montréal, où ses principaux champs d’intérêts sont la didactique de l’astronomie, la formation des maîtres au primaire, l’éducation en milieu informel et la médiation scientifique.

                  Extraits

                  … un des apports importants de la didactique des sciences, c'est la réflexion épistémologique à la base de cette discipline. Cette base, c'est le constructivisme … [L'objet d'étude de la didactique], ce sont essentiellement le développement, la mise en place et l'évaluation de séquences d'enseignement- apprentissage qui visent à faire apprendre des concepts disciplinaires. … ce que la didactique et le constructivisme apportent [...] c'est peut-être l'idée du changement conceptuel …

                  Apports de la neurodidactique des sciences à l’étude des mécanismes d’apprentissage

                  Steve Masson, Uqam

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/neurodidactique-sciences-mecanismes-apprentissage

                  Steve Masson, est professeur à la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) et codirecteur du Laboratoire de recherche en neuroéducation. À l'aide de l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, il étudie les mécanismes cérébraux liés aux apprentissages scolaires et à l’enseignement.

                  Extraits :

                  La recherche en neurodidactique des sciences … a contribué à une meilleure compréhension des mécanismes neurocognitifs associés à l’apprentissage de certains concepts scientifiques … ses éclairages sur ce qui facilite ou bloque un apprentissage peuvent avoir une portée sur l’ensemble des contextes d’enseignement et de transmission des savoirs.

                  On constate que les jeunes comme les adultes entretiennent des conceptions diverses de phénomènes naturels ou technologiques, et que celles-ci sont souvent assez différentes de celles généralement acceptées dans la communauté scientifique. Plus encore, l’enseignement des sciences ne modifie pas toujours durablement ces conceptions. On dira qu’elles « résistent » à l’enseignement. Les didacticien·nes des sciences se sont alors demandé comment remplacer, complexifier, transformer ou faire coexister ces ensembles de conceptions. De très nombreuses recherches ont été menées sur ce sujet.

                  … les scientifiques ont souhaité allier didactique et neurosciences pour mieux comprendre ce qui se passe dans le cerveau lors de l’apprentissage des matières comme la chimie ou la physique … la neurodidactique des sciences offre désormais des apports pertinents à d’autres disciplines. Steve en identifie deux principaux. Le premier est d’ordre théorique et concerne l’idée selon laquelle apprendre un concept, c’est souvent apprendre à inhiber des conceptions que l’on entretient déjà. Le deuxième apport est plutôt d’ordre méthodologique. Il s’agit de proposer aux personnes participant aux recherches des tâches plus contextualisées, qui ressemblent à celles qu’elles pourraient réaliser dans la vie quotidienne.

                  … apprendre les sciences, c’est notamment apprendre à inhiber des conceptions erronées qui ne disparaissent parfois jamais du cerveau. Au lieu d’envisager un remplacement des conceptions intuitives erronées par des conceptions scientifiques, il faut plutôt envisager une coexistence peut-être permanente des deux types de conceptions, avec le contrôle inhibiteur comme arbitre permettant le passage de l’une à l’autre (Potvin, 2013)

                  Croisements didactiques entre sciences et cultures

                  Sivane Hirsch, Université Laval
                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/croisements-didactiques-entre-sciences-cultures

                  Sivane Hirsch est professeure titulaire à la faculté des sciences de l’éducation à l’Université Laval. Elle s’intéresse à la prise en compte de la diversité ethnoculturelle et religieuse à l’école, dans les pratiques du personnel enseignant et dans la formation initiale et continue à cet égard.

                  Extraits

                  …il y a eu le concept de « question socialement vive » qui ma inspirée …Je me suis alors demandé ce qui rend un thème « sensible ». Partie sur cette piste, je me suis penchée de nouveau sur des travaux de didactique des sciences et de la technologie, notamment ceux qui font appel au concept de controverse sociotechnique, un concept qui tient compte de ces cas fréquents où l’on doit prendre des décisions sans détenir toute l’information nécessaire pour trancher adéquatement. D’ailleurs, dans les controverses sociotechniques comme dans les thèmes sensibles, on se heurte, en raison du thème à l’étude, à sa dimension politique, c’est-à-dire à la manière dont on veut organiser notre vie collective, donc dont on veut choisir, débattre ou entrer en conflit ….

                  un thème sensible touche quatre grandes dimensions :

                  • La dimension éthique, qui touche les représentations et les valeurs;
                  • La dimension sociale, qui parle de la pluralité du public;
                  • La dimension politique, qui amène à reconnaitre que l’on vit en société, et que les rapports de pouvoir entre les groupes sont inévitables;
                  • La dimension pédagogique, qui s’intéresse aux manières d’enseigner des thèmes très complexes.

                  Qu’est-ce que la didactique des sciences et de la technologie pourrait apprendre des fondements de l’éducation et de la didactique du programme de culture et citoyenneté québécoise (CCQ) ? demande Audrey Groleau

                  Il y a d’abord une réflexion en CCQ sur les manières dont on peut exercer sa citoyenneté…. L’ajout d’une réflexion éthique est aussi fort pertinent, car elle invite les jeunes à chercher à comprendre et à tenir compte des paradoxes et des incohérences qui émergent toujours de nos réflexions sur la complexité du social et à les assumer lorsque c’est possible. … L’idée ne sera pas de trancher en se présentant pour ou contre un projet, par exemple. Ce sera d’apprendre à poser de bonnes questions, à évaluer les savoirs de diverses disciplines et leur pertinence, à faire des choix, etc., mais aussi d’apprendre à vivre dans le désaccord.

                  Croisements entre didactique, administration de l’éducation et pédagogie de l’enseignement supérieur

                  Entretien avec Alain Huot, Université du Québec à Trois-Rivières

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/croisements-entre-didactique-administration-education-pedagogie#author-key-0

                  Alain Huot (Ph. D. UQAM) est professeur titulaire en administration de l’éducation à l’UQTR. Ses intérêts multiples portent sur l’amélioration continue, l’innovation pédagogique, les processus d’accompagnement, les technologies et le numérique, l'efficacité et l'efficience tant stratégiques qu’opérationnelles de même que la transdisciplinarité en enseignement-gestion-santé. Il est chercheur au GRIDE, au LIRES, au Réverbère ainsi qu'au CRIFPE. Il agit également à titre de président de l’ADERAE et du GRIIP.

                  Extraits

                  Ce que j'apprécie particulièrement de la didactique des sciences et de la technologie pour la formation de mes étudiants et étudiantes dans un contexte de stage, c’est son approche principalement centrée sur la résolution de problèmes.

                  … je constate que le travail transdisciplinaire est de plus en plus nécessaire pour évoluer dans le milieu académique. …Les travaux en administration de l’éducation traitent souvent d’évènements ou de situations complexes qui comportent des aspects humains, des composantes organisationnelles, mais aussi des dimensions politiques et économiques. Je crois qu’un maillage de tous ces aspects gagnerait à être pris en compte plus fréquemment en didactique des sciences et de la technologie, car tout savoir scientifique est un construit qui a sa part de contexte biosociopolitique.

                  … La didactique des sciences et de la technologie étudie bien sûr l’enseignement et l’apprentissage, mais elle met peu l’accent sur l’apprentissage des adultes, et c’est ici qu’elle peut tirer leçons de la pédagogie de l’enseignement supérieur.

                  La participation des scientifiques aux affaires sociétales: entretien avec Isabelle Arseneau et Chantal Pouliot

                  Isabelle Arseneau et Chantal Pouliot, Université Laval

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/participation-scientifiques-science-societe-controverse-questions-vives

                  Isabelle Arseneau, professionnelle de recherche en didactique des sciences et en éducation relative à l’environnement à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval et spécialiste en éducation scientifique au Centre de démonstration en sciences physiques du Cégep Garneau, à Québec

                  Chantal Pouliot est professeure à l’Université Laval au Département d'études sur l'enseignement et l’apprentissage. Ses travaux portent sur les controverses environnementales et sanitaires.

                  Extraits

                  Comment enseigner les questions relatives à l’environnement et à la santé publique qui traversent l’actualité, et qui sont souvent controversées? C’est là une des questions traitées concrètement par la recherche en didactique. Une piste pour contribuer à l'enseignement de ces questions est de bien comprendre les manières dont des scientifiques agissent dans de tels contextes.

                  …une personne engagée décide de défendre une cause commune qui lui est externe, c’est-à-dire qui ne l’affecte pas directement…le fait de se dire engagé·e comme chercheur·euses peut aussi rendre plus vulnérable, ou du moins cela vulnérabilise la crédibilité projetée. …

                  … plusieurs des scientifiques que j’ai interrogé·es considèrent que l’action sociopolitique est risquée, en particulier au regard du maintien de leur crédibilité scientifique auprès du public, mais également auprès de leurs pair·es.

                  … la liberté universitaire, et la conviction qu’elle sera respectée, voire soutenue et défendue par les administrations universitaires, s’avère une condition importante à la participation des universitaires aux affaires sociétales, en particulier dans des contextes épineux comme les questions environnementales et de santé publique.

                  … les citoyen·nes seraient capables, tout comme les scientifiques, d’identifier les problèmes, de comprendre les situations complexes, d’élargir les problématiques ou de les contextualiser, de proposer des solutions pertinentes et de participer aux conversations sociopolitiques en plus d’être capables de communiquer des messages clairs … les citoyen·nes devraient, toujours selon les scientifiques interrogé·es, avoir davantage d’opportunités de participer aux débats et aux conversations sociopolitiques.

                  … la recherche en didactique que j’ai menée me permet de souligner l’importance de combattre, à l’école et dans la formation des scientifiques, la posture déficitaire à l’égard des capacités citoyennes en faisant la démonstration que les citoyen·nes sont capables de comprendre les questions complexes et les enjeux, de prendre la parole, d’être critiques et d’agir de manière pertinente sur les situations.

                  … faire de la recherche sur les enjeux contemporains est un défi … de nombreux scientifiques se disent désemparés, tristes et tendus devant l’ampleur des crises environnementales et sociales qui caractérisent le monde actuel. Par exemple, certains refusent de parler de réchauffement des océans dans les médias tellement ces connaissances sont chargées et éprouvantes …

                  En 2024, il apparait clair que l’étude, dans le champ de la didactique des sciences, des rôles et capacités des citoyen·nes et des scientifiques au regard des mobilisations citoyennes est pour le moins opportune.

                  La recherche participative : mailler les expertises, améliorer les pratiques

                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/recherche-participative-mailler-expertises-ameliorer-pratiques

                  Christine Couture,
                  Emmanuelle Aurousseau,
                  Catherine Duquette,
                  Nicole Monney, UQAC,
                  Julie Rock - Katshishkutamatshesht, UQTR, Université du Québec à Chicoutimi et Université du Québec à Trois-Rivières

                  Christine Couture est professeure au Département desSciences de l’Éducation
                  Didactique de la science et de la technologie au primaire à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), Chercheuse associée au CRIFPE et à la CHAIRE UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples, elle travaille à documenter le développement de pratiques d’enseignement en science et technologie dans une approche de recherche collaborative.

                  Emmanuelle Aurousseau, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)

                  Catherine Duquette estprofesseure titulaire à l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) etspécialiste de la didactique de l'histoire, ses intérêts de recherche portent à la fois sur la progression des apprentissages liés à la pensée historique.

                  Nicole Monney est professeure au département des Sciences de l’Éducation à l’UQAC. Elle est chercheure associée auCRIRESet auCRRE. Son expertise porte sur l’évaluation formative des apprentissages, sur la formation pratique des enseignants et sur les pratiques en gestion de classe dont, la planification des apprentissages.

                  Julie Rock, Université du Québec à Trois Rivières (UQTR), Laboratoire de recherche et d'intervention sur les difficultés d'adaptation psychosociale à l'école.

                  Extraits

                  La recherche participative est l'approche de recherche privilégiée par ces autrices …Elles font part aussi des apports de l'approche participative, tant pour la recherche en général que pour les milieux de pratique et pour la formation…. En recherche participative, le défi consiste à trouver un projet commun qui soit une occasion à la fois de développement professionnel et de production de connaissances.

                  Nos projets reposent sur un maillage d’expertises non seulement entre praticien·nes et chercheur·euses, mais aussi entre chercheur·euses qui ont des points de vue et des perspectives bien ancrés dans leur spécialité… L’idée centrale est e s’en servir comme grille d’analyse réflexive pour coconstruire des approches, des outils et des savoirs sur les pratiques en codéveloppement.

                  Le travail conjoint réalisé avec nos partenaires des Premiers Peuples, dont nos étudiantes et notre collègue innue, enrichit nos recherches de nouvelles perspectives tout en développant des approches enracinées dans leurs ancrages culturels.

                  Nos travaux se prolongent aussi dans une action concertée en sécurisation culturelle2 qui documente des pratiques développées dans les milieux éducatifs et communautaires pour soutenir la persévérance scolaire et la réussite de jeunes et d’adultes des Premiers Peuples.

                  La question des données probantes pose le risque d’uniformiser les pratiques de recherche. «Les recherches basées sur les données probantes (evidence based practice) peuvent conduire à une simplification, voire à un triple réductionnisme:

                  1) unréductionnisme épistémologique qui exclut la diversité des formes de savoirs et d’approches ;

                  2) un réductionnisme du sens de l’action, qui gomme la complexité de celle-ci et son aspect multidimensionnel ;

                  3) un réductionnisme culturel, puisque les minorités culturelles sont statistiquement peu représentées, alors qu’il est important de mobiliser et considérer les perspectives des Premiers Peuples dans une avenue de sécurisation culturelle

                  Les recherches participatives [...] produisent des connaissances bien ancrées dans la pratique qui mettent au jour des façons de faire concrètes, ajustables et transférables dans différents contextes

                  Satisfaction et apprentissage : s'appuyer sur le plaisir de connaitre

                  Gabriel Lecompte, UQTR, Ousmane Sy, UQTR
                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/satisfaction-apprentissage-sciences-didactique-plaisir-connaitre

                  Gabriel Lecompte, Université du Québec à Trois Rivières (UQTR), est assistant de recherche et étudiant au doctorat en éducation. Ses travaux se penchent sur divers aspects de la compétence du numérique dans le cadre de l’enseignement des sciences et de la technologie.

                  Extraits

                  La satisfaction exerce une influence positive sur les élèves …la satisfaction est considérée comme une condition nécessaire pour réussir le changement conceptuel.

                  il nous paraît pertinent d’intégrer les réflexions didactiques autour de ce concept dans les planifications et les pratiques de l’enseignement des sciences et de la technologie

                  Le modèle Épistémique-Pragmatique-Relationnel (ÉPR) …expliqué par Sy (2022) permet de décrire une pratique enseignante et d’accompagner un·e enseignant·e en formation dans la planification et l’analyse d’activités d’enseignement et d’apprentissage.

                  … soutenir la satisfaction, c’est réfléchir au bien-être, à l’apprentissage des élèves et à la mise en place d’une ambiance propice au plaisir d’acquérir des connaissances ensemble.

                   

                  Jeu de société, enseignement et recherche en didactique : c’est du sérieux!

                  Audrey Groleau, Université du Québec à Trois-Rivières
                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/jeu-societe-enseignement-recherche-didactique-c-est-du-serieux

                  Extraits

                  En didactique des sciences et de la technologie, c’est par l’entremise du courant traitant des « questions socialement vives » que les jeux de société ont d’abord été très utilisés…Puis, leur emploi a progressivement été documenté par la recherche.

                  … non seulement les jeux de société favorisent une compréhension approfondie et nuancée de questions socialement vives, mais ils tendent à susciter l’intérêt des élèves pour des thèmes autrement souvent considérés comme arides

                  Un exemple très connu en didactique des sciences et de la technologie est celui du jeu de rôle prenant la forme d’un débat s’apparentant à un procès autour des risques pour la santé entourant l’usage de téléphones cellulaires. Il a utilisé en 2006 par Virgine Albe de l’École normale supérieure Paris-Saclay, … Ce qui est intéressant, dans ce genre de jeux, c’est la réflexion, à la suite de la partie, autour des décisions prises. Aurait-on pu jouer différemment? Quelles sont les conséquences positives et négatives des choix effectués? Qu’est-ce qui rend la mise en situation proposée aussi complexe?

                  D’autres disciplines gagneraient à s’inspirer de la didactique des sciences et de la technologieen employant des jeux de société pour soutenir l’enseignement et l’apprentissage de concepts complexes et le développement de compétences disciplinaires ou professionnelles

                  BD sur l’anatomie sexuée inclusive, inspirée par la didactique des sciences

                  Guillaume Cyr, Université du Québec à Montréal, Maude Bouchard-Fortier, illustratrice
                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/bande-dessinee-anatomie-sexe-inclusivite-didactique-sciences

                  Guillaume Cyr, Université du Québec à Montréal, chargé de cours dans la formation initiale en enseignement à l’UQTR, Par son expérience dans les groupes militants et communautaires LGBTQIA+, il a modifié la manière dont il enseignait les notions liées à la sexuation des corps humains.

                  Maude Bouchard-Fortier, illustratrice. Des années de séances de dessin de modèles vivants, combinées à une connaissance de l’anatomie et de la physiologie humaine acquise lors de ses études Maude cumule des habiletés qui lui permettent de créer des schémas anatomiques qui n’existent dans aucun autre ouvrage de biologie et qui possèdent une grande vertu didactique.

                  Extraits

                  Le projet de livre a pris naissance dans le cadre de la recherche doctorale de Guillaume traitant de cette question: comment des enseignant·es de science et de technologie du secondaire pourraient-ils s’approprier l’intégration de la diversité sexuelle, de genre et de corps sexués dans leur pratique?

                  Les questions liées à la sexualité touchent effectivement à des enjeux qui sont non seulement d’ordre de la compréhension du monde naturel, mais aussi d’ordre social, culturel, éthique, politique et affectif.

                  … nous avons été intéressés par un modèle plus récent qui suggère qu'il serait plus efficace d’exposer les apprenant·es à des conceptions conformes au savoir scientifique «avant» de confronter leurs conceptions, si elles sont erronées.

                  … celui de l'homologie. Ce concept participe à rendre compréhensible la conception vers laquelle on souhaite amener les lecteur·trices. Il permet d’expliquer comment les corps qu’on qualifie généralement de masculin et de féminin ne sont pas, en fait, si différents l’un de l’autre.

                  Le concept d’homologie …. permet d'accompagner le·la lecteur·trice au-delà des catégorisations binaires en visualisant comment des caractéristiques intermédiaires peuvent se manifester. … Il existe donc une multitude de corps qui ne peuvent être classés dans l’une des deux catégories utilisées par le corps médical (mâle et femelle).

                  … Les termes «intersexués» et «intersexes», non pathologisants, sont favorisés par les groupes de personnes directement concernées, ainsi que par la plupart des chercheur·euses en sciences sociales.

                  La dernière section aborde donc la distinction entre les quatre dimensions de l’identité sexuelle: le corps sexué (la dimension abordée tout au long du livre), l’identité de genre, l’expression de genre et l’orientation sexuelle.

                  Voici le lien vers la totalité du dossier :
                  https://www.acfas.ca/publications/magazine/enjeux-recherche/didactique

                  .........................................................

                  [1]  Acfas (organisation canadienne qui se donne pour mission de promouvoir l’activité scientifique, de stimuler la recherche et de diffuser le savoir en français)

                    https://www.acfas.ca/

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                    Ninon Louise LePage

                    Britten et Rimbaud mis en image par Antoine+Manuel

                    1 mois 3 semaines ago
                    A la Chapelle Corneille à Rouen, l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie et la soprano Emy Gazeilles dirigés par Victor…L’expérience devient totale

                    Dans le cadre du Festival Normandie Impressionniste 2024, le dispositif immersif avec déambulation du public sera également adapté à l’Église Saint-Julien à Caen. Et à Cabourg, la Villa du Temps retrouvé accueillera sur sa façade les projections, pendant deux soirées d’été.

                    En 1939, Benjamin Britten (1913-1976) profondément pacifiste a écrit en exil Les Illuminations, pour protester contre la guerre. Le compositeur met en musique neuf poèmes en prose d’Arthur Rimbaud (1854-1891) pour voix aiguë et orchestre à cordes. Connu pour être le meilleur arrangeur de poésie anglaise depuis Purcell, Britten se passionnait également pour la poésie française. L’imagerie musicale inspirée de Rimbaud entre en résonance avec les atmosphères étranges développées par Antoine+Manuel (Antoine Audiau et Manuel Warosz).

                    Les deux designers ont éprouvé un coup de cœur pour la Chapelle Corneille à Rouen dont le décor sculpté très chargé s’inscrit dans les idées diffusées par la Contre-Réforme.

                    Les vitraux translucides offrent une impressionnante luminosité. Pour assister au spectacle visuel, il faut attendre la tombée de la nuit. Quatre projecteurs posés sur les murs renvoient des paysages surréalistes sur les côtés de la nef, les voûtes, les ornements. Les fresques mouvantes apparaissent en reflet dans l’imposante sphère suspendue à la croisée du transept. Pour le public, l’expérience devient totale en concert live ou en enregistrement, avec l’écoute de la merveilleuse voix d’Emy Gazeilles accompagnée des musiciens.

                    Les Illuminations de Britten, Chapelle Corneille - Rouen © Fatma Alilate

                    Images génératives

                    Antoine+Manuel ont d’abord été inspirés par les lieux, les espaces puis par les textes et la musique. Ce sont vingt-cinq à trente minutes d’images animées qui sont proposées. Ces graphistes de formation ont toujours réalisé leurs propres images. Mais pour ce format inédit, ils ont décidé de puiser dans les images génératives - pas du tout à leurs goûts. « J’aime me confronter à des images qui me rebutent, précise Manuel Warosz. J’ai voulu utiliser ces images artificielles, déplaisantes. »

                    L’intelligence artificielle produit un premier corpus. Pour une image gardée à partir de références et de mots, d’autres en plus grand nombre sont supprimées. « L’intelligence artificielle a tendance à aller vers du déjà vu, il faut donc imposer des interdits », explique Manuel Warosz. Les images conservées sont découpées et retravaillées pour différents scénarios avec des jeux d’ombre, des touches psychédéliques, de la fantaisie. Il y a différentes séquences en écho aux interprétations d’Emy Gazeilles et des musiciens. Les images peuvent être en 3D et semblaient presque réalistes - on reconnaît des arbres. D’autres visions surgissent représentées par des formes ou des tâches dans des illusions d’optique.

                    L’Église Saint-Julien à Caen est d’un autre style architectural car bâtie dans les années 1950. Antoine+Manuel sont autant enthousiastes : « Un bijou de la reconstruction ! Tous les murs sont recouverts de vitraux - les petits carrés lumineux rappellent les pixels. » Dans cette église, le format enregistré sera écourté car il sera associé à la projection de films d’un cinéma de Caen.

                    Fatma Alilate

                    Les Illuminations opus 18 de Benjamin Britten (1913-1976)

                    Création vidéos Antoine+Manuel
                    Mapping Anne-Charlotte Gellez
                    Direction musicale Victor Jacob
                    Soprano Emy Gazeilles

                    Orchestre de l’Opera de Rouen Normandie
                    Rouen, Chapelle Corneille
                    Jeudi 28 mars, 19h30 à 21h30, vendredi 29 mars, 19h30 à 21h30, samedi 30 mars, 19h30 à 21h30 Parcours libre
                    Caen, Église Saint-Julien
                    Samedi 6 avril de 10 h à 18 h, dimanche 7 avril de 10 h à 15 h Parcours libre
                    Cabourg, Villa du Temps retrouvé
                    Jeudi 15 août, vendredi 16 août en soirée Projections sur les façades

                    Fatma Alilate
                    Photos : « Les Illuminations » de Britten, Chapelle Corneille - Rouen © Fatma Alilate
                    Antoine+Manuel, Images « Les Illuminations » de Britten, Chapelle Corneille - Rouen © Fatma Alilate

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                      Fatma Alilate

                      Didactique des sciences, réflexions de chercheurs

                      1 mois 3 semaines ago
                      Dans le cadre des dossiers thématiques publiés sur les Enjeux de la recherche, dans le magazine de l’Acfas [1] apparaissait récemment…L’éditorial du 16 mars, rédigé par Audrey Groleau, UQTR et Ousmane Sy, UQTR

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/editorial-didactique-sciences-apports-autres-disciplines

                      Audrey Groleau est professeure titulaire de didactique des sciences et de la technologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Elle est titulaire de la Chaire d’excellence en enseignement UQTR sur l’appropriation de questions technoscientifiques d’actualité.

                      Ousmane Sy est professeur de didactique des sciences et de la technologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)». Il enseigne la didactique des sciences et de la technologie auprès d’étudiants et d’étudiantes en enseignement au primaire, au secondaire et en adaptation scolaire et il contribue à la formation de chercheurs et de chercheuses en éducation.

                      Extrait :

                      Le dossier regroupe dix contributions prenant la forme de textes de réflexion, d’entrevues et de discussions mettant le plus souvent de l’avant des didacticiennes et didacticiens des sciences et de la technologie. On vise à y présenter les apports de la didactique des sciences et de la technologie, à d’autres champs de recherche. D’emblée, Audrey et Ousmane ont cherché à offrir une définition de la discipline de recherche de la didactique des sciences : l’étude de l’enseignement et de l’apprentissage des sciences et de la technologie selon ses aspects axiologiques, épistémologiques et praxéologiques, soit le pourquoi, le quoi et le comment. … C’est aussi étudier les manières dont les jeunes et moins jeunes transforment leurs conceptions de phénomènes scientifiques et technologiques.

                      L’éducation en plein air ou l’apprentissage des savoirs dans la « vraie vie

                      Jean-Philippe Ayotte-Beaudet, Université de Sherbrooke

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/education-plein-air-apprentissage-savoirs-vraie-vie

                      Jean-Philippe Ayotte-Beaudet est professeur au Département d'enseignement au préscolaire et au primaire de la Faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke et titulaire de la Chaire de recherche sur l'éducation en plein air. Ses principales activités de recherche portent sur l'éducation scientifique et sur l’éducation en plein air au primaire et au secondaire.

                      Extraits

                      L'éducation en plein air regroupe toutes les situations éducatives qui se déroulent dehors et pour lesquelles on a des objectifs de développement ou d’apprentissage. … En sciences et technologie spécifiquement, on peut réaliser des tâches qui s’apparentent à celles des scientifiques, puisque ceux-ci effectuent beaucoup de travail de terrain, souvent en plein air.

                      … une approche expérientielle de l’éducation … s’inscrit généralement dans une démarche fondée sur des lieux connus par et dans la communauté … cultiver une connexion positive avec la nature, ce qui est un fort déterminant de l’action environnementale …

                      … une des recherches de mon équipe portera sur l’observation. …

                      recherche-action …pour dégager le métamodèle de déploiement de l'éducation en plein air au Québec … première année pilote de la construction et de l’analyse d'une base de données longitudinale sur la pratique d'éducation en plein air chez le personnel enseignant du préscolaire jusqu’au secondaire …

                      Je ne perçois pas l’éducation en plein air comme une discipline à enseigner, car c'est avant tout un contexte d’enseignement-apprentissage. … on est dans le monde tel qu'il est appréhendé au quotidien.

                      … L’élément le plus important que j’ai « importé » de la didactique des sciences est assurément la notion de contextualisation des apprentissages. … je pense que l’éducation en plein air nous conduit à nous questionner plus fondamentalement sur les visées de l’école et notamment sur celles de l’éducation scientifique.

                      De quelques réflexions sur la didactique : entretien avec Pierre Chastenay

                      Université du Québec à Montréal

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/reflexions-didactique-sciences-pierre-chastenay

                      Pierre Chastenay est professeur de didactique des sciences à l’Université du Québec à Montréal, où ses principaux champs d’intérêts sont la didactique de l’astronomie, la formation des maîtres au primaire, l’éducation en milieu informel et la médiation scientifique.

                      Extraits

                      … un des apports importants de la didactique des sciences, c'est la réflexion épistémologique à la base de cette discipline. Cette base, c'est le constructivisme … [L'objet d'étude de la didactique], ce sont essentiellement le développement, la mise en place et l'évaluation de séquences d'enseignement- apprentissage qui visent à faire apprendre des concepts disciplinaires. … ce que la didactique et le constructivisme apportent [...] c'est peut-être l'idée du changement conceptuel …

                      Apports de la neurodidactique des sciences à l’étude des mécanismes d’apprentissage

                      Steve Masson, Uqam

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/neurodidactique-sciences-mecanismes-apprentissage

                      Steve Masson, est professeur à la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) et codirecteur du Laboratoire de recherche en neuroéducation. À l'aide de l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, il étudie les mécanismes cérébraux liés aux apprentissages scolaires et à l’enseignement.

                      Extraits :

                      La recherche en neurodidactique des sciences … a contribué à une meilleure compréhension des mécanismes neurocognitifs associés à l’apprentissage de certains concepts scientifiques … ses éclairages sur ce qui facilite ou bloque un apprentissage peuvent avoir une portée sur l’ensemble des contextes d’enseignement et de transmission des savoirs.

                      On constate que les jeunes comme les adultes entretiennent des conceptions diverses de phénomènes naturels ou technologiques, et que celles-ci sont souvent assez différentes de celles généralement acceptées dans la communauté scientifique. Plus encore, l’enseignement des sciences ne modifie pas toujours durablement ces conceptions. On dira qu’elles « résistent » à l’enseignement. Les didacticien·nes des sciences se sont alors demandé comment remplacer, complexifier, transformer ou faire coexister ces ensembles de conceptions. De très nombreuses recherches ont été menées sur ce sujet.

                      … les scientifiques ont souhaité allier didactique et neurosciences pour mieux comprendre ce qui se passe dans le cerveau lors de l’apprentissage des matières comme la chimie ou la physique … la neurodidactique des sciences offre désormais des apports pertinents à d’autres disciplines. Steve en identifie deux principaux. Le premier est d’ordre théorique et concerne l’idée selon laquelle apprendre un concept, c’est souvent apprendre à inhiber des conceptions que l’on entretient déjà. Le deuxième apport est plutôt d’ordre méthodologique. Il s’agit de proposer aux personnes participant aux recherches des tâches plus contextualisées, qui ressemblent à celles qu’elles pourraient réaliser dans la vie quotidienne.

                      … apprendre les sciences, c’est notamment apprendre à inhiber des conceptions erronées qui ne disparaissent parfois jamais du cerveau. Au lieu d’envisager un remplacement des conceptions intuitives erronées par des conceptions scientifiques, il faut plutôt envisager une coexistence peut-être permanente des deux types de conceptions, avec le contrôle inhibiteur comme arbitre permettant le passage de l’une à l’autre (Potvin, 2013)

                      Croisements didactiques entre sciences et cultures

                      Sivane Hirsch, Université Laval
                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/croisements-didactiques-entre-sciences-cultures

                      Sivane Hirsch est professeure titulaire à la faculté des sciences de l’éducation à l’Université Laval. Elle s’intéresse à la prise en compte de la diversité ethnoculturelle et religieuse à l’école, dans les pratiques du personnel enseignant et dans la formation initiale et continue à cet égard.

                      Extraits

                      …il y a eu le concept de « question socialement vive » qui ma inspirée …Je me suis alors demandé ce qui rend un thème « sensible ». Partie sur cette piste, je me suis penchée de nouveau sur des travaux de didactique des sciences et de la technologie, notamment ceux qui font appel au concept de controverse sociotechnique, un concept qui tient compte de ces cas fréquents où l’on doit prendre des décisions sans détenir toute l’information nécessaire pour trancher adéquatement. D’ailleurs, dans les controverses sociotechniques comme dans les thèmes sensibles, on se heurte, en raison du thème à l’étude, à sa dimension politique, c’est-à-dire à la manière dont on veut organiser notre vie collective, donc dont on veut choisir, débattre ou entrer en conflit ….

                      un thème sensible touche quatre grandes dimensions :

                      • La dimension éthique, qui touche les représentations et les valeurs;
                      • La dimension sociale, qui parle de la pluralité du public;
                      • La dimension politique, qui amène à reconnaitre que l’on vit en société, et que les rapports de pouvoir entre les groupes sont inévitables;
                      • La dimension pédagogique, qui s’intéresse aux manières d’enseigner des thèmes très complexes.

                      Qu’est-ce que la didactique des sciences et de la technologie pourrait apprendre des fondements de l’éducation et de la didactique du programme de culture et citoyenneté québécoise (CCQ) ? demande Audrey Groleau

                      Il y a d’abord une réflexion en CCQ sur les manières dont on peut exercer sa citoyenneté…. L’ajout d’une réflexion éthique est aussi fort pertinent, car elle invite les jeunes à chercher à comprendre et à tenir compte des paradoxes et des incohérences qui émergent toujours de nos réflexions sur la complexité du social et à les assumer lorsque c’est possible. … L’idée ne sera pas de trancher en se présentant pour ou contre un projet, par exemple. Ce sera d’apprendre à poser de bonnes questions, à évaluer les savoirs de diverses disciplines et leur pertinence, à faire des choix, etc., mais aussi d’apprendre à vivre dans le désaccord.

                      Croisements entre didactique, administration de l’éducation et pédagogie de l’enseignement supérieur

                      Entretien avec Alain Huot, Université du Québec à Trois-Rivières

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/croisements-entre-didactique-administration-education-pedagogie#author-key-0

                      Alain Huot (Ph. D. UQAM) est professeur titulaire en administration de l’éducation à l’UQTR. Ses intérêts multiples portent sur l’amélioration continue, l’innovation pédagogique, les processus d’accompagnement, les technologies et le numérique, l'efficacité et l'efficience tant stratégiques qu’opérationnelles de même que la transdisciplinarité en enseignement-gestion-santé. Il est chercheur au GRIDE, au LIRES, au Réverbère ainsi qu'au CRIFPE. Il agit également à titre de président de l’ADERAE et du GRIIP.

                      Extraits

                      Ce que j'apprécie particulièrement de la didactique des sciences et de la technologie pour la formation de mes étudiants et étudiantes dans un contexte de stage, c’est son approche principalement centrée sur la résolution de problèmes.

                      … je constate que le travail transdisciplinaire est de plus en plus nécessaire pour évoluer dans le milieu académique. …Les travaux en administration de l’éducation traitent souvent d’évènements ou de situations complexes qui comportent des aspects humains, des composantes organisationnelles, mais aussi des dimensions politiques et économiques. Je crois qu’un maillage de tous ces aspects gagnerait à être pris en compte plus fréquemment en didactique des sciences et de la technologie, car tout savoir scientifique est un construit qui a sa part de contexte biosociopolitique.

                      … La didactique des sciences et de la technologie étudie bien sûr l’enseignement et l’apprentissage, mais elle met peu l’accent sur l’apprentissage des adultes, et c’est ici qu’elle peut tirer leçons de la pédagogie de l’enseignement supérieur.

                      La participation des scientifiques aux affaires sociétales: entretien avec Isabelle Arseneau et Chantal Pouliot

                      Isabelle Arseneau et Chantal Pouliot, Université Laval

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/participation-scientifiques-science-societe-controverse-questions-vives

                      Isabelle Arseneau, professionnelle de recherche en didactique des sciences et en éducation relative à l’environnement à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval et spécialiste en éducation scientifique au Centre de démonstration en sciences physiques du Cégep Garneau, à Québec

                      Chantal Pouliot est professeure à l’Université Laval au Département d'études sur l'enseignement et l’apprentissage. Ses travaux portent sur les controverses environnementales et sanitaires.

                      Extraits

                      Comment enseigner les questions relatives à l’environnement et à la santé publique qui traversent l’actualité, et qui sont souvent controversées? C’est là une des questions traitées concrètement par la recherche en didactique. Une piste pour contribuer à l'enseignement de ces questions est de bien comprendre les manières dont des scientifiques agissent dans de tels contextes.

                      …une personne engagée décide de défendre une cause commune qui lui est externe, c’est-à-dire qui ne l’affecte pas directement…le fait de se dire engagé·e comme chercheur·euses peut aussi rendre plus vulnérable, ou du moins cela vulnérabilise la crédibilité projetée. …

                      … plusieurs des scientifiques que j’ai interrogé·es considèrent que l’action sociopolitique est risquée, en particulier au regard du maintien de leur crédibilité scientifique auprès du public, mais également auprès de leurs pair·es.

                      … la liberté universitaire, et la conviction qu’elle sera respectée, voire soutenue et défendue par les administrations universitaires, s’avère une condition importante à la participation des universitaires aux affaires sociétales, en particulier dans des contextes épineux comme les questions environnementales et de santé publique.

                      … les citoyen·nes seraient capables, tout comme les scientifiques, d’identifier les problèmes, de comprendre les situations complexes, d’élargir les problématiques ou de les contextualiser, de proposer des solutions pertinentes et de participer aux conversations sociopolitiques en plus d’être capables de communiquer des messages clairs … les citoyen·nes devraient, toujours selon les scientifiques interrogé·es, avoir davantage d’opportunités de participer aux débats et aux conversations sociopolitiques.

                      … la recherche en didactique que j’ai menée me permet de souligner l’importance de combattre, à l’école et dans la formation des scientifiques, la posture déficitaire à l’égard des capacités citoyennes en faisant la démonstration que les citoyen·nes sont capables de comprendre les questions complexes et les enjeux, de prendre la parole, d’être critiques et d’agir de manière pertinente sur les situations.

                      … faire de la recherche sur les enjeux contemporains est un défi … de nombreux scientifiques se disent désemparés, tristes et tendus devant l’ampleur des crises environnementales et sociales qui caractérisent le monde actuel. Par exemple, certains refusent de parler de réchauffement des océans dans les médias tellement ces connaissances sont chargées et éprouvantes …

                      En 2024, il apparait clair que l’étude, dans le champ de la didactique des sciences, des rôles et capacités des citoyen·nes et des scientifiques au regard des mobilisations citoyennes est pour le moins opportune.

                      La recherche participative : mailler les expertises, améliorer les pratiques

                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/recherche-participative-mailler-expertises-ameliorer-pratiques

                      Christine Couture,
                      Emmanuelle Aurousseau,
                      Catherine Duquette,
                      Nicole Monney, UQAC,
                      Julie Rock - Katshishkutamatshesht, UQTR, Université du Québec à Chicoutimi et Université du Québec à Trois-Rivières

                      Christine Couture est professeure au Département desSciences de l’Éducation
                      Didactique de la science et de la technologie au primaire à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), Chercheuse associée au CRIFPE et à la CHAIRE UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples, elle travaille à documenter le développement de pratiques d’enseignement en science et technologie dans une approche de recherche collaborative.

                      Emmanuelle Aurousseau, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)

                      Catherine Duquette estprofesseure titulaire à l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) etspécialiste de la didactique de l'histoire, ses intérêts de recherche portent à la fois sur la progression des apprentissages liés à la pensée historique.

                      Nicole Monney est professeure au département des Sciences de l’Éducation à l’UQAC. Elle est chercheure associée auCRIRESet auCRRE. Son expertise porte sur l’évaluation formative des apprentissages, sur la formation pratique des enseignants et sur les pratiques en gestion de classe dont, la planification des apprentissages.

                      Julie Rock, Université du Québec à Trois Rivières (UQTR), Laboratoire de recherche et d'intervention sur les difficultés d'adaptation psychosociale à l'école.

                      Extraits

                      La recherche participative est l'approche de recherche privilégiée par ces autrices …Elles font part aussi des apports de l'approche participative, tant pour la recherche en général que pour les milieux de pratique et pour la formation…. En recherche participative, le défi consiste à trouver un projet commun qui soit une occasion à la fois de développement professionnel et de production de connaissances.

                      Nos projets reposent sur un maillage d’expertises non seulement entre praticien·nes et chercheur·euses, mais aussi entre chercheur·euses qui ont des points de vue et des perspectives bien ancrés dans leur spécialité… L’idée centrale est e s’en servir comme grille d’analyse réflexive pour coconstruire des approches, des outils et des savoirs sur les pratiques en codéveloppement.

                      Le travail conjoint réalisé avec nos partenaires des Premiers Peuples, dont nos étudiantes et notre collègue innue, enrichit nos recherches de nouvelles perspectives tout en développant des approches enracinées dans leurs ancrages culturels.

                      Nos travaux se prolongent aussi dans une action concertée en sécurisation culturelle2 qui documente des pratiques développées dans les milieux éducatifs et communautaires pour soutenir la persévérance scolaire et la réussite de jeunes et d’adultes des Premiers Peuples.

                      La question des données probantes pose le risque d’uniformiser les pratiques de recherche. «Les recherches basées sur les données probantes (evidence based practice) peuvent conduire à une simplification, voire à un triple réductionnisme:

                      1) unréductionnisme épistémologique qui exclut la diversité des formes de savoirs et d’approches ;

                      2) un réductionnisme du sens de l’action, qui gomme la complexité de celle-ci et son aspect multidimensionnel ;

                      3) un réductionnisme culturel, puisque les minorités culturelles sont statistiquement peu représentées, alors qu’il est important de mobiliser et considérer les perspectives des Premiers Peuples dans une avenue de sécurisation culturelle

                      Les recherches participatives [...] produisent des connaissances bien ancrées dans la pratique qui mettent au jour des façons de faire concrètes, ajustables et transférables dans différents contextes

                      Satisfaction et apprentissage : s'appuyer sur le plaisir de connaitre

                      Gabriel Lecompte, UQTR, Ousmane Sy, UQTR
                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/satisfaction-apprentissage-sciences-didactique-plaisir-connaitre

                      Gabriel Lecompte, Université du Québec à Trois Rivières (UQTR), est assistant de recherche et étudiant au doctorat en éducation. Ses travaux se penchent sur divers aspects de la compétence du numérique dans le cadre de l’enseignement des sciences et de la technologie.

                      Extraits

                      La satisfaction exerce une influence positive sur les élèves …la satisfaction est considérée comme une condition nécessaire pour réussir le changement conceptuel.

                      il nous paraît pertinent d’intégrer les réflexions didactiques autour de ce concept dans les planifications et les pratiques de l’enseignement des sciences et de la technologie

                      Le modèle Épistémique-Pragmatique-Relationnel (ÉPR) …expliqué par Sy (2022) permet de décrire une pratique enseignante et d’accompagner un·e enseignant·e en formation dans la planification et l’analyse d’activités d’enseignement et d’apprentissage.

                      … soutenir la satisfaction, c’est réfléchir au bien-être, à l’apprentissage des élèves et à la mise en place d’une ambiance propice au plaisir d’acquérir des connaissances ensemble.

                       

                      Jeu de société, enseignement et recherche en didactique : c’est du sérieux!

                      Audrey Groleau, Université du Québec à Trois-Rivières
                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/jeu-societe-enseignement-recherche-didactique-c-est-du-serieux

                      Extraits

                      En didactique des sciences et de la technologie, c’est par l’entremise du courant traitant des « questions socialement vives » que les jeux de société ont d’abord été très utilisés…Puis, leur emploi a progressivement été documenté par la recherche.

                      … non seulement les jeux de société favorisent une compréhension approfondie et nuancée de questions socialement vives, mais ils tendent à susciter l’intérêt des élèves pour des thèmes autrement souvent considérés comme arides

                      Un exemple très connu en didactique des sciences et de la technologie est celui du jeu de rôle prenant la forme d’un débat s’apparentant à un procès autour des risques pour la santé entourant l’usage de téléphones cellulaires. Il a utilisé en 2006 par Virgine Albe de l’École normale supérieure Paris-Saclay, … Ce qui est intéressant, dans ce genre de jeux, c’est la réflexion, à la suite de la partie, autour des décisions prises. Aurait-on pu jouer différemment? Quelles sont les conséquences positives et négatives des choix effectués? Qu’est-ce qui rend la mise en situation proposée aussi complexe?

                      D’autres disciplines gagneraient à s’inspirer de la didactique des sciences et de la technologieen employant des jeux de société pour soutenir l’enseignement et l’apprentissage de concepts complexes et le développement de compétences disciplinaires ou professionnelles

                      BD sur l’anatomie sexuée inclusive, inspirée par la didactique des sciences

                      Guillaume Cyr, Université du Québec à Montréal, Maude Bouchard-Fortier, illustratrice
                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/2024/03/bande-dessinee-anatomie-sexe-inclusivite-didactique-sciences

                      Guillaume Cyr, Université du Québec à Montréal, chargé de cours dans la formation initiale en enseignement à l’UQTR, Par son expérience dans les groupes militants et communautaires LGBTQIA+, il a modifié la manière dont il enseignait les notions liées à la sexuation des corps humains.

                      Maude Bouchard-Fortier, illustratrice. Des années de séances de dessin de modèles vivants, combinées à une connaissance de l’anatomie et de la physiologie humaine acquise lors de ses études Maude cumule des habiletés qui lui permettent de créer des schémas anatomiques qui n’existent dans aucun autre ouvrage de biologie et qui possèdent une grande vertu didactique.

                      Extraits

                      Le projet de livre a pris naissance dans le cadre de la recherche doctorale de Guillaume traitant de cette question: comment des enseignant·es de science et de technologie du secondaire pourraient-ils s’approprier l’intégration de la diversité sexuelle, de genre et de corps sexués dans leur pratique?

                      Les questions liées à la sexualité touchent effectivement à des enjeux qui sont non seulement d’ordre de la compréhension du monde naturel, mais aussi d’ordre social, culturel, éthique, politique et affectif.

                      … nous avons été intéressés par un modèle plus récent qui suggère qu'il serait plus efficace d’exposer les apprenant·es à des conceptions conformes au savoir scientifique «avant» de confronter leurs conceptions, si elles sont erronées.

                      … celui de l'homologie. Ce concept participe à rendre compréhensible la conception vers laquelle on souhaite amener les lecteur·trices. Il permet d’expliquer comment les corps qu’on qualifie généralement de masculin et de féminin ne sont pas, en fait, si différents l’un de l’autre.

                      Le concept d’homologie …. permet d'accompagner le·la lecteur·trice au-delà des catégorisations binaires en visualisant comment des caractéristiques intermédiaires peuvent se manifester. … Il existe donc une multitude de corps qui ne peuvent être classés dans l’une des deux catégories utilisées par le corps médical (mâle et femelle).

                      … Les termes «intersexués» et «intersexes», non pathologisants, sont favorisés par les groupes de personnes directement concernées, ainsi que par la plupart des chercheur·euses en sciences sociales.

                      La dernière section aborde donc la distinction entre les quatre dimensions de l’identité sexuelle: le corps sexué (la dimension abordée tout au long du livre), l’identité de genre, l’expression de genre et l’orientation sexuelle.

                      Voici le lien vers la totalité du dossier :
                      https://www.acfas.ca/publications/magazine/enjeux-recherche/didactique

                      .........................................................

                      [1]  Acfas (organisation canadienne qui se donne pour mission de promouvoir l’activité scientifique, de stimuler la recherche et de diffuser le savoir en français)

                        https://www.acfas.ca/

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                        Ninon Louise LePage

                        Évaluation nationale des cités éducatives 2023

                        1 mois 3 semaines ago
                        L’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) a été mandaté par l’Agence nationale de cohésion des territoires…L’évaluation pilotée par l’INJEP porte sur les 80 premières cités éducatives labellisées. Elle s’étend de juillet 2021 à juin 2023 et s’articule autour de trois thématiques centrales du programme :

                        La mise en œuvre de la continuité éducative et ses effets sur le parcours des enfants et des jeunes ;

                        Les parcours d’orientation, d’insertion et de formation pour les 11-25 ans ;

                        La place des familles dans les coopérations éducatives. Trois cabinets d’études ont été sélectionnés afin de mener à bien cette évaluation : le cabinet JEUDEVI, le cabinet Pluricité et l’Agence Phare.

                        Chacun a mené l’enquête sur l’une des trois thématiques auprès de cinq cités volontaires labellisées en 2019 (quinze cités en tout).

                        Ce rapport s’appuie principalement sur les enseignements des trois équipes d’évaluation ainsi que sur l’analyse quantitative des revues de projets 2022 des 80 cités éducatives réalisée par l’INJEP. Il complète et approfondit un premier rapport intermédiaire publié en 2022.

                        Il a pour objectif d’offrir une vision globale des effets du programme sur trois dimensions majeures des cités éducatives : la mise en œuvre de « l’alliance éducative » sur les thématiques étudiées ; ses potentiels effets sur l’évolution de l’offre éducative ainsi que, en « bout de chaine », les effets observés sur les bénéficiaires ainsi que sur les professionnels.

                        Si l’évaluation, de nature essentiellement qualitative, ne propose pas de mesure d’impact des effets sur les parcours des usagers, elle permet d’identifier les bonnes pratiques et les difficultés rencontrées, et ainsi de contribuer à établir les conditions de réussite du programme.

                        Article publié sur le site  : INJEP

                        https://injep.fr/wp-content/uploads/2024/03/3_JEUDEVI-_Continuite_educative_Rapport_final.pdf
                        Auteurs : Tana STROMBONI, chargée d’études et d’évaluation, INJEP
                        Sonia LOUHAB, chargée d’études et d’évaluation, INJEP

                        • Cités Educatives
                          An@é

                          ONY et GOBELINS Paris s’allient pour former des techniciens de l’animation 3D à Madagascar

                          1 mois 3 semaines ago
                          Communiqué de presse : GOBELINS Paris, la grande école de la création numérique et des arts visuels et l'association ONY…

                          ONY est une association créée par Ahélya Randriambolaina & OrelSan qui a pour but de soutenir le développement des industries culturelles et créatives (ICC) à Madagascar et de développer des projets dans la musique, le cinéma, l'animation 3D et le jeu-vidéo.

                          L’association accompagne les acteurs des ICC malgaches dans leur professionnalisation en leur apportant de la formation, du mentorat, l’accès à des équipements aux standards internationaux et à des opportunités de mise en réseau. L’objectif est de susciter les collaborations, de créer une dynamique régionale dans l'Océan Indien et ainsi de permettre le développement d'opportunités économiques, le repérage de talents et les échanges culturels.

                          Pour ce faire, ONY structure ses activités autour de 3 piliers :
                          • ONY Booster - un programme d’accélération pour les professionnels des ICC malgaches
                          • ONY Academy - une école dédiée à la pratique des métiers de la musique, du cinéma, du jeu vidéo et de l’animation 3D
                          • ONY House - un espace de travail de 400m² dédié aux ICC au cœur d’Antananarivo

                          Afin de poser les premières pierres d’une école dédiée aux métiers de l’animation 3D à Madagascar, ONY a lancé en 2024 l’académie Animhouse, un cycle de formation gratuite de 12 mois destinée à former des techniciens de l’animation 3D via un apprentissage centré sur la technique, le développement créatif et l’animation de personnages 3D.

                          La pédagogie, fondée sur le partage d’expériences, l’apprentissage des métiers, mais surtout sur la pratique, permettra aux élèves d’apprendre à créer des personnages 3D en maitrisant différentes techniques (mise en scène, mouvement, jeu d’acteur). Au programme : des workshops assurés par des professionnels locaux et la création d’un projet de fin d’étude ayant pour vocation de déboucher sur des opportunités professionnelles.

                          Dans ce cadre, Animhouse a le plaisir de s’associer à GOBELINS Paris pour l’organisation de trois sessions de formation intensives d’une semaine sur les techniques d’animation de personnages 3D (fondamentaux, mécanique du corps et jeux d’acteurs). Ces trois sessions seront dispensées en avril, mai et juin 2024 par Samy Fecih, animateur et formateur, intervenant notamment sur le programme de Summer School de GOBELINS Paris.

                          L’Académie Animhouse est pilotée par Ridha Andriantomanga, fondateur de Lewak, studio d’animation 2D et 3D, et ancien apprenant des programmes de summer school de GOBELINS Paris.

                          L’objectif à terme est de construire un partenariat structurant pour accompagner les jeunes malgaches désirant se former aux métiers de l’animation 3D, susciter le partage de savoir-faire et favoriser le rayonnement des projets créés par les élèves de Animhouse. Ces formations ont vocation à être ouvertes aux étudiants d’autre pays de l’Océan Indien.

                          En s’associant à ONY, GOBELINS Paris poursuit son engagement en faveur de la structuration des écosystèmes ICC sur des marchés émergents et porteurs.

                          En tant qu'acteur engagé dans la promotion de la diversité, notamment dans l'industrie de l'animation, GOBELINS Paris est fière de contribuer au programme ANIMHOUSE.

                          Cécile Blondel, Directrice du département international à GOBELINS Paris :

                          « À travers notre partenariat avec ONY, nous poursuivons notre engagement en faveur du renforcement des compétences, une mission qui nous tient à cœur à GOBELINS Paris. Ensemble, nous sommes déterminés à offrir aux talents malgaches une formation d’excellence en animation 3D, contribuant ainsi à l'épanouissement de l'industrie créative internationale"

                          https://www.gobelins.fr/actualites/animation-3d-madagascar-ony

                          An@é

                          Salon emploiDV (Déficients Visuels), édition 2024, à l’INJA Louis-Braille : un espace d'opportunités et d'inclusion

                          1 mois 3 semaines ago
                          Communiqué de presse - Le salon emploiDV revient pour sa seconde édition le 3 avril prochain. Dédié aux personnes déficientes…

                          Organisé conjointement par l’INJA Louis-Braille qui accueille notamment l’événement, et l’association apiDV, ce salon s'adresse non seulement aux demandeurs d'emploi déficients visuels, mais aussi aux employeurs engagés dans la diversité et l'égalité des chances.

                          Avec une multitude d’ateliers prévue, cet événement promet d'être une plateforme dynamique pour le dialogue, la formation professionnelle et le recrutement :
                          • Un espace dans lequel des déficients visuels en activité viennent témoigner de leur parcours et leur métier en lien avec le handicap visuel.
                          • Un espace sur lequel des centres de formation, écoles spécialisées, universités ou encore ESAT présenteront leur formation.
                          • Un espace dédié à l’accompagnement associatif, public et parapublic : différentes structures viendront se présenter. Les participants auront l'occasion de rencontrer des représentants d’associations inclusives et des organisations de soutien.
                          • Le plus grand espace est dédié aux employeurs privés et publics : plus de 30 entreprises et collectivités seront présentes : ministère de la Défense, ministère de la Culture, le Sénat, la Région Ile-de-France, Thalès, IBM, France TV, La poste, Dior Parfums… Les entreprises partenaires seront présentes pour discuter des opportunités d'emploi, des stages et des programmes de développement de carrière disponibles pour les personnes déficientes visuelles.
                          • Un espace dédié aux nouvelles technologies dans lequel des distributeurs ou développeurs d’outils présenteront leurs solutions (lunettes, logiciels, synthèse vocale…). Ces démonstrations de technologies innovantes mettront en lumière les dispositifs facilitant l'accessibilité sur le lieu de travail.
                          Des ateliers thématiques sont également disponibles aux visiteurs du salon emploiDV en libre accès :

                          Simulation d’entretiens, présentation de certains métiers pour les déficients visuels (masseur, producteur de jingles et de spots radios, mécanicien vélo) ou encore un atelier pour apprendre à faire sa propre plage braille. Ces sessions offriront des conseils pratiques, des techniques d'adaptation et des stratégies pour surmonter les obstacles professionnels.

                          En 2023, plus de 500 visiteurs sont venus visiter le salon emploiDV. En 2024, davantage encore sont attendues en plus d’une hausse de 20% de l’offre exposante (80 exposants cette année).

                          L'événement est ouvert à tous, le 3 avril 2024, de 10h à 17h, à l’Inja Louis-Braille, 56 boulevard des Invalides : personnes déficientes visuelles à la demande d'emploi, professionnels de l'emploi ou simplement intéressés par la promotion de l'inclusion dans le milieu professionnel.

                          An@é

                          PEGASE : le 3 avril à La Gaîté Lyrique (Paris) une rencontre-débat sur recherche - évaluation du programme

                          1 mois 3 semaines ago
                          Mercredi 3 avril à La Gaîté Lyrique (Paris) une rencontre-débat autour de la généralisation de l’éducation artistique et culturelle à…

                          Un évènement de restitution de leurs recherches et de présentation du programme est organisé le mercredi 3 avril à la Gaîté Lyrique à Paris, à partir de 14h30.

                          Programme de la rencontre du 3 avril :

                          Accueil à partir de 14h30, Gaîté Lyrique, 3bis Rue Papin, 75003 Paris

                          • 15h : Introduction - Mot de bienvenue de Juliette Donadieu, Directrice générale de la Gaîté Lyrique
                            • Interventions de : 
                              Benoît Mounier, Directeur général France de la Fondation Daniel et Nina Carasso 
                              Etienne Champion, Recteur Académie de Versailles
                          • 15h15 : Pourquoi avoir mis en place un Programme Expérimental de Généralisation des Arts à l’École ?
                            • Co-intervention de Klaus Fruchtnis, Responsable de l’axe Art Citoyen de la Fondation Daniel et Nina Carasso et Marianne Calvayrac, Déléguée académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle, Conseillère technique du recteur de l’académie de Versailles.

                          • 15h25 : « 2019-2023 : quatre ans au sein du Programme Expérimental de Généralisation des Arts à l’École, de la maternelle au lycée sur l’académie de Versailles » : 
                            • Présentation de la recherche-évaluation

                          • 16h10 : Table ronde 1 : Partage d’expériences, de réussites et de défis rencontrés dans le cadre de PEGASE avec la participation de différents acteurs du programme 

                          • 16h55 :Table Ronde 2 : Regards croisés sur les perspectives de généralisation de l’éducation artistique et culturelle à l’aune de l’expérimentation PEGASE

                          • 17h40 : Synthèse et conclusion

                          • 18h : Cocktail

                          Découvrez le programme et inscrivez-vous pour assister à l'événement à distance sur https://lnkd.in/eTknzsr7

                          En savoir plus:

                          https://www.educavox.fr/innovation/dispositifs/programme-experimental-de-generalisation-des-arts-a-l-ecole

                          • Arts et culture
                            An@é

                            Programme Expérimental de Généralisation des Arts à l'Ecole

                            1 mois 3 semaines ago
                            En septembre 2017, les ministères de la Culture et de l’Éducation nationale s’associent pour annoncer la volonté du gouvernement de…

                            Conçu par la Fondation Daniel et Nina Carasso et l’académie de Versailles, PEGASE est un programme expérimental de généralisation des arts à l’Ecole qui vise à développer des activités artistiques dans des établissements scolaires d’un territoire donné, en collaboration avec les équipes pédagogiques et les acteurs culturels de ce territoire. Mené entre 2018 et 2023 dans 5 établissements de l’académie de Versailles, de la maternelle au lycée, PEGASE plaçait la réussite des élèves au cœur de ses ambitions, mais aussi l’engagement citoyen, la transdisciplinarité et la fluidité du vivre ensemble à l’école.

                            Les projets développés lors de ces 5 années devaient intégrer :

                            • une pratique artistique ou scientifique accompagnée par des équipes pédagogiques et des artistes ;

                            • la rencontre avec des oeuvres, des professionnels de l’art, de la culture et de la recherche ;

                            • l’acquisition de connaissances, dans le cadre des programmes d’enseignements scolaires ;

                            • la construction d’un jugement critique singulier ;

                            • une étroite collaboration entre professeurs et les professionnels de façon à articuler la démarche artistique et la démarche pédagogique en lien avec les apprentissages fondamentaux.

                            Une recherche-évaluation pour analyser et diffuser l’expérimentation de la généralisation de l’éducation artistique et culturelle

                            Expérimental et innovant, le programme PEGASE a fait l’objet d’une évaluation qui a observé le travail accompli par les élèves, les enseignants, les artistes et tous les acteurs du programme, afin d’analyser les conditions dans lesquelles un programme d’éducation artistique et culturelle peut contribuer à la réussite de tous les élèves.

                            Réalisée de manière indépendante par une équipe de 4 chercheurs en éducation, avec différentes spécialités et intérêts, cette recherche-évaluation s’appuie sur une méthodologie mixte qui articule des données quantitatives et qualitatives recueillies pendant 3 années.

                            Ils ont réalisé 227 entretiens semi-directifs en direction des enseignants (n=57), des élèves (n=109), des intervenants culturels et artistes (n=24), des professionnels des structures culturelles (n=18) et des promoteurs du programme (=19). La quasi-intégralité des PACTE (Projets Artistiques et Culturels en Territoire Éducatif) a été observée, et plus d’une quinzaine sur les 3 années ont été suivis au long court. Par ailleurs, un questionnaire a été élaboré autour des expériences scolaires, culturelles et artistiques des élèves (n=1428), répartis sur 5 établissements scolaires : 1 école primaire (n=44), 2 collèges (n=819) et 2 lycées (n=565). 3 

                            Synthèse et préconisations Un programme qui a trouvé son public

                            Malgré un contexte de pandémie COVID 19 (fermeture d’établissements scolaires, de structures culturelles, difficultés rencontrées par les intervenants), le programme PEGASE est largement parvenu à trouver sa cible.

                            • Près de 10 000 élèves concernés au long court • Soit environ 2 500 élèves et 60 enseignants touchés par an • 30 projets par an articulés autour d’une cinquantaine de partenaires culturels (entre intervenants et responsables de structures culturelles) • 4,46 projets par établissement en moyenne et par an dans les établissements PEGASE contre 1,65 dans les autres établissements de l’Académie, qui est pourtant déjà très dynamique sur cette question.

                            Ces éléments marquent une forte valeur ajoutée du programme dans sa capacité à promouvoir des actions liées à l’Éducation Artistique et Culturelle (EAC) dans les établissements bénéficiaires.

                            Sur la mobilisation des enseignants et des partenaires culturels

                            Le volume d’enseignants mobilisés est relativement continu dans 3 des 5 groupes scolaires bénéficiaires du programme. On observe en revanche 2 établissements dans lesquels ce nombre s’effondre (passant de 14 à 7 enseignants puis 3 dans un cas, et de 19 à 5 dans l’autre). On constate dès lors que les situations ne sont pas identiques en fonction des établissements.

                            Dans le premier cas, on observe une logique de captation du programme par un ou quelques enseignants qui ne perturbent pas le volume général de l’action, on peut parler d’une surspécialisation autour du programme. Tandis que dans le second cas la réduction du nombre d’enseignants impliqués a une incidence décisive sur le nombre de projets qui passent ainsi de 9 à 3 projets (avec 3 non validés).

                            Par ailleurs, si les enseignants des disciplines artistiques sont mobilisés régulièrement, ils n’ont pas porté majoritairement les actions du programme, notamment parce qu’ils sont relativement peu nombreux. En revanche, on note une différence de mobilisation tout à fait significative entre les enseignants de Lettres et de Sciences et techniques, les premiers étant 3 à 4 fois plus nombreux à être impliqués dans le programme (44% contre 15%).

                            Ces résultats interrogent les modalités de diffusion et d’appropriation du programme, et nécessitent sans doute un certain volontarisme si l’on veut éviter les risques de structuration de l’action autour de niches disciplinaires.

                            Préconisation 1 : Accompagner les logiques collectives

                            Il semble indispensable de consacrer une part de l’accompagnement aux logiques collectives d’équipe qui peuvent s’organiser autour du programme, voire au conditionnement de leur renouvèlement. Il est nécessaire d’être prudent sur les risques de spécialisation d’un petit groupe d’acteurs voire de quelques-uns seulement dans la promotion du programme. Si leur mobilisation est précieuse, elle ne doit pas empêcher celle d’autres professionnels et il semble indispensable de créer les conditions nécessaires au renouvèlement au moins partiel des enseignants participants, y compris pour tendre à une plus large transversalité des effets structurants du programme sur les dynamiques collectives au sein des établissements.

                            Un programme porteur de sens pour les acteurs mobilisés

                            Les enseignants mobilisés dans le programme identifient des gains professionnels à leur investissement (acquisition de compétences transversales, évolution des pratiques pédagogiques, ouverture aux logiques de travail intercatégoriel, etc.).

                            Cette valorisation professionnelle et personnelle, accompagnée de la croyance dans les bienfaits de l’EAC sur les élèves, compense en partie les désagréments liés au fort investissement : elles permettent ainsi de « tenir » dans les moments d’épuisement.

                            Il ne faut donc pas négliger les bénéfices perçus par les acteurs locaux vis-à-vis du programme PEGASE. Sa particularité, son périmètre comme les modalités d’accompagnement partagées entre la Fondation et le Rectorat sont des atouts décisifs dans l’implication au long court des enseignants déjà engagés à son lancement.

                            Préconisation 2 : Face à l’usure, renforcer un accompagnement formalisé

                            Si les équipes se déploient et que de nombreux projets fonctionnent, ce succès repose sans doute sur des vocations personnelles qui ne formalisent pas suffisamment les registres de professionnalité nécessaires pour les dépasser. En d’autres termes, nous identifions chez les enseignants mobilisés des signes d’usure qui témoignent de la nécessité d’un accompagnement plus formalisé, à l’égard des référentes culture en particulier. L’idée de binômes de « référents Culture » semble être une piste intéressante, tandis que les regroupements organisés (sur des formes non hiérarchiques d’échanges) entre référents sont toujours perçus très favorablement, y compris pour organiser des modèles de régulations des actions engagées.

                            Un programme porté par des femmes

                            Au sein des établissements scolaires, le programme repose en grande partie sur l’investissement des référentes Culture, tandis que les chefs d’établissements sont les garants d’un bon fonctionnement d’ensemble. Exclusivement féminines, ces chevilles ouvrières de la mise en oeuvre du programme s’attèlent à de nombreuses tâches, administratives, gestionnaires, organisationnelles et pédagogiques, avec lesquelles elles étaient plus ou moins familières avant leur engagement au sein du programme.

                            D’ailleurs, l’enquête fait la démonstration de la forte charge de travail éprouvée par les référentes et les enseignants mobilisés dans le programme, qui fait courir le risque de leur épuisement. 

                            Les recherches autour des questions de genre montrent bien à quel point la féminisation de certaines tâches est largement liée à la valeur subalterne qui leur est attribuée.

                            La proportion de femmes impliquées dans le programme est donc fortement en leur faveur. Mais l’exclusivité qu’elles assurent dans les missions de coordination de l’action à l’échelle des établissements signe le statut peu enviable qui est accolé à la fonction de référent.

                            Préconisation 3 : Mieux définir et valoriser le statut de référent Culture

                            Il est indispensable de mieux valoriser le statut de référent Culture, indispensable au fonctionnement du programme. Aujourd’hui, on peut considérer que les missions sont perçues essentiellement sur un registre subalterne, qui permet d’expliquer en grande partie la mobilisation exclusivement féminine autour du dispositif. Si ce n’était pas le cas, nul doute que la proportion d’hommes impliqués serait nettement plus élevée. Le prestige reconnu à l’EAC ne suffit pas à inverser les marqueurs symboliques de reconnaissance des fonctions de coordination autour du programme. Cette situation appelle sans doute à mieux définir et mieux valoriser cette fonction de référent pour qu’elle devienne plus attractive.

                            Préconisation 4 : Mobiliser la formation initiale et continue

                            Les fondements du programme sont sans doute trop facilement perçus comme évidents par ses promoteurs, là où les ressorts collectifs, les logiques partenariales, les pratiques et les savoirs formels et informels qu’il encourage sont loin d’être lisibles pour l’ensemble du corps enseignant. Le programme gagnerait donc sans doute à faire sens pour ce qu’il est : un outil de développement de l’action locale, pouvant être intégré selon des registres différents à des conceptions pédagogiques qui sont loin d’être unifiées à l’école. Ces enjeux traversent la question de la formation initiale et continue des enseignants. Les ressources en la matière sur l’Académie doivent continuer d’être mobilisées, en s’adaptant à l’hétérogénéité des expériences et des parcours des professionnels engagés.

                            Un programme porté par des enseignants chevronnés

                            On constate une surreprésentation des enseignants les plus âgés chez ceux qui sont investis d’une manière ou d’une autre dans le programme. Cet aspect est loin d’être anecdotique, y compris au regard des ambitions de généralisation que porte le dispositif. D’après nos relevés, on peut considérer que les 3/4 des enseignants investis dans le PEGASE ont plus de 40 ans, et que les 3/4 encore ont plus de 5 ans d’ancienneté dans l’établissement.

                            Dans une perspective de généralisation, le risque est fort que les établissements de l’éducation prioritaire qui concentrent les enseignants les plus jeunes, soient moins mobilisés que les autres.

                            La question de l’accompagnement des plus jeunes enseignants se pose donc à double titre : d’abord, elle est une condition pour assurer une meilleure équité dans la diffusion des pratiques liées à l’EAC à tous les élèves, et pas seulement dans les établissements plus favorisés où les professeurs les plus chevronnés sont les plus nombreux. Ensuite, parce que l’accès à des pratiques de projet en lien avec l’EAC est un outil de développement professionnel dont on peut considérer qu’il sera d’autant mieux intégré qu’il sera mobilisé rapidement dans la carrière.

                            Préconisation 5 : Créer des binômes d’enseignants

                            Les jeunes enseignants doivent être mieux associés au programme. L’idée d’un binôme de porteurs de PACTE associant un enseignant de moins de 5 ans d’ancienneté et un autre plus chevronné est sans doute à creuser. Il pourrait s’agir finalement d’encourager une forme paritaire pour ces enseignants : un homme et une femme, un jeune enseignant et un plus âgé.

                            Un réseau de partenaires variés et renouvelés

                            L’une des forces du programme a été sa capacité à mobiliser des partenaires variés et nombreux sur l’ensemble des territoires concernés. On insistera sur la variété des thématiques adressées, mais aussi sur celles des structures culturelles impliquées.

                            Si un large spectre de partenaires a d’abord été mobilisé, on constate un resserrement dans le temps sur un nombre plus faible de structures, mais avec des relations qui semblent plus solides. Plus précisément, les services du Rectorat peuvent être perçus comme force de proposition pour définir un ou deux partenaires culturels incontournables qui servent de socle au développement des actions sur le territoire ; d’autres partenaires s’ajoutent en fonction des thématiques et des ressources locales. À noter par ailleurs que le programme a su se préserver des « effets de niche », c’est-à-dire d’une focalisation sur quelques partenaires.

                            C’est là sans doute une force non négligeable de la dynamique qui a été enclenchée : le dispositif et son encadrement permettent de développer une véritable stratégie de diversification des partenaires, évitant du même coup des effets de concentration sur certaines thématiques ou spécialités. Cet enjeu est fondamental pour ne pas céder à une tentation d’unification du propos ou des pratiques qui, si elle peut être consensuelle, dénature la démarche fondamentale du pouvoir émancipateur de l’art et de la culture.

                            Ce marqueur distingue le programme d’autres dispositifs qui, par des effets de routines, favorisent une forme d’homogénéisation de l’EAC. Ce n’est pas le cas de PEGASE qui a su se fondre dans une logique singulière de mobilisation des ressources locales.

                            Préconisation 6 : Diversifier les partenaires culturels locaux

                            La démarche de diversification et d’ajustement des partenaires culturels est cohérente avec une ambition de généralisation de l’EAC. L’équilibre entre le renouvèlement de certains partenariats et le développement de nouvelles alliances liées aux ressources locales est une condition du déploiement du programme.

                            Les stratégies d’alliances et le modèle de mise en relation des artistes, des intervenants et des équipes éducatives sont très majoritairement favorables, et on peut sans doute y voir la marque d’un « savoir-faire » académique historique qu’il ne faut pas minimiser.

                            Il y a là sans doute un motif supplémentaire pour promouvoir un modèle qui affirme le caractère central de l’école dans le processus, tout en permettant à des professionnels non scolaires de se mobiliser pleinement dans un rapport de confiance assez rare pour être souligné. Pour autant, on note un flou concernant le rôle de la structure culturelle partenaire aux différents stades du projet. Il mériterait d’être clarifié pour tous les professionnels : les structures culturelles, les intervenants ou les artistes ne sont en effet pas également dotés sur les conditions du travail de l’EAC en milieu scolaire et ses singularités.

                            Préconisation 7 : Favoriser des espaces partagés d’élaboration des actions culturelles en milieu scolaire

                            Si la logique d’alliance qui s’organise autour de l’école semble favorable à l’implantation du programme, il est sans doute souhaitable de veiller à ce que les structures partenaires et les intervenants artistiques et culturels soient moins isolés les uns des autres. Ils apparaissent très inégalement dotés pour travailler d’un point de vue réflexif sur les modalités de l’action culturelle et artistique en milieu scolaire. Cette logique d’alliance doit trouver des espaces partagés d’élaboration.

                            Un dispositif parmi d’autres ?

                            PEGASE s’insère dans une logique caractéristique de « dispositifs » dans le champ de l’action éducative, mais il est loin d’être la seule organisation de ce type dans les établissements mobilisés.

                            Même s’il faut souligner les moyens financiers déployés et la forte valorisation par l’institution des actions engagées, force est de constater qu’à l’échelle des établissements et des écoles, et en dehors du périmètre des enseignants qui sont le plus fortement investis, il apparait malgré tout comme un dispositif parmi d’autres.

                            La démultiplication des dispositifs fait courir le risque d’un morcèlement de l’action éducative, voire de son archipélisation (Fourquet & Manternach, 2019): la prolifération des thématiques prises en charge et des sollicitations pour les enseignants et les acteurs scolaires peut aboutir à une forme de spécialisation de chacun sur une thématique particulière, dont le sens semble souvent peu lisible à l’échelle d’un projet global au sein des établissements.

                            Préconisation 8 : Labelliser les établissements dans lesquels l’EAC est structurante

                            Le projet PEGASE ne peut pas être un dispositif parmi d’autres si l’enjeu de son développement est celui d’une mobilisation collective de l’ensemble de l’équipe éducative en direction de tous les élèves de l’établissement. Aujourd’hui, la démultiplication de la forme du dispositif alimente la dilution des actions et des forces engagées. La labellisation d’écoles pour lesquels l’EAC devient structurante pour le projet d’établissement est sans doute une piste à envisager.

                            Un programme incident sur les pratiques artistiques et culturelles en dehors des établissements

                            Globalement, les activités pratiquées dans le cadre de PEGASE semblent renforcer la fréquentation ou la pratique de ces mêmes activités dans d’autres cadres à l’extérieur de l’établissement scolaire. Ainsi, les enfants ayant participé à des projets avec des intervenants en théâtre, en danse ou en arts plastiques par exemple, semblent pratiquer un peu plus que les autres ces mêmes activités par ailleurs.

                            Il semble bien que la pratique des activités artistiques et culturelles dans PEGASE renforce la fréquentation de structures et les pratiques culturelles hors de l’école, même si ce ratio reste mesuré.

                            Le programme ne suffit pas à transformer radicalement les pratiques culturelles des enfants et des jeunes, mais il est sans doute décisif pour un nombre significatif d’entre eux pour assoir ou renforcer ces mêmes pratiques.

                            Une expérience du programme corrélée à l’expérience scolaire

                            L’expérience du programme semble nettement corrélée à l’expérience plus générale des élèves en termes de climat scolaire.

                            À partir du calcul d’un Indice de Climat du Programme, nous considérons que

                            27% des élèves ont une appréciation très favorable de leur expérience des projets, 48% favorable et 25% défavorable.

                            Les élèves des écoles primaires adhèrent plus encore que leurs homologues du secondaire aux activités engagées.

                            L’expérience du programme est nettement corrélée avec l’expérience plus générale des élèves en termes de climat scolaire.

                            52% des élèves qui signalent une appréciation très favorable du climat scolaire ont également une appréciation très favorable du programme. Inversement, 44% des élèves qui ont une appréciation négative du climat scolaire ont également une expérience négative du programme. Cette corrélation est très significative d’un point de vue statistique, et démontre le lien entre l’appréciation du programme et l’expérience scolaire des élèves d’un point de vue plus général.

                            Les contenus de ces projets comme leur modalité de développement ne peuvent suffire à inverser les tendances de l’expérience scolaire : les leviers sur lesquels ils pèsent peuvent participer de l’amélioration de la situation, mais ne suffisent pas à la contrebalancer.

                            Ces résultats confirment l’incidence du contexte d’implantation du programme : plus le climat sera favorable, plus l’appréciation du programme par les élèves est susceptible d’être favorable.

                            Préconisation 9 : Un programme impactant dans un climat scolaire favorable

                            Le programme doit être implanté dans les établissements où le contexte est favorable en termes de climat scolaire. Il ne peut pas, à lui seul, être un moyen de résoudre des crises. En revanche, il peut être un levier significatif de mobilisation collective, à condition de ne pas être accaparé par quelques acteurs locaux.

                            Une typologie du rapport des élèves au programme

                            Nous avons identifié 5 catégories d’élèves pour qualifier les rapports différenciés entretenus avec le programme.

                            • 5% sont qualifiés d’artistes, en cela qu’ils sont pleinement entrés dans le programme et qu’ils s’y sont engagés bien au-delà des attendus ordinaires. Pour ces élèves, le programme semble avoir été décisif à l’expression d’une « vocation » artistique et/ou culturelle dans laquelle ils restent engagés.

                             

                            • 28% sont qualifiés de convaincus : ils manifestent une forte satisfaction à l’égard du programme en s’attachant particulièrement à l’expression de son contenu et de ses modalités. En d’autres termes, ces élèves semblent adhérer au dispositif pour ce qu’il est : un programme d’enseignement des arts et de la culture. La pratique est souvent envisagée comme une continuité de l’exercice de la classe qui, si elle est engagée dans des dispositions différentes, doit également permettre de renforcer le curriculum « ordinaire ».

                            • 40% sont qualifiés de satisfaits : ils sont très proches des convaincus dans leur rapport au programme, mais ils sont un peu moins nombreux à manifester un degré maximum de satisfaction à l’égard du programme et semblent moins s’approprier la démarche artistique. Ils restent cependant très positifs à l’égard des bénéfices perçus du programme et de ses activités.

                            • 21% sont qualifiés d’affectifs : ils représentent environ 1/5 des élèves, et sont plus représentés que les autres dans le lycée professionnel. Ils ne manifestent ni opposition ni grand enthousiasme à l’égard du programme. Si les projets auxquels ils participent leur donnent plutôt satisfaction, ils s’y plient plutôt qu’ils ne les jugent indispensables. Pour ces élèves, le contenu du projet en lui-même tient moins d’importance que la dimension relationnelle qu’il permet de déployer. L’enjeu du projet comme son objet apparaissent ainsi comme très secondaires, et c’est d’abord le renforcement de la sociabilité entre pairs et les bonnes relations entretenues avec les adultes participants qui les préoccupent.

                             

                            • 7% sont qualifiés de réfractaires : ils sont défiants à l’égard des projets et refusent généralement d’y participer pour des raisons variées (goûts, relations interpersonnelles, etc.). Ces élèves sont facilement identifiables dans les projets par leur comportement d’opposition, identifié aussi bien par les autres élèves que par les intervenants ou les enseignants.

                            Cette typologie révèle un rapport différencié des élèves au programme, qui témoigne aussi d’un degré d’appropriation de ses modalités qui ne peut pas être linéaire. Nos échantillons sont trop restreints pour tirer des considérations générales qui permettraient de conclure à une même distinction à grande échelle.

                            Cependant, cette typologie peut être utile à l’heure de l’affirmation d’une forte volonté de développement de l’EAC.

                            On peut sans doute considérer, qu’à la condition d’un encadrement collectif et d’une appropriation par le corps enseignant de cette démarche, les élèves puissent y trouver dans leur immense majorité un intérêt sincère qui se révèle par une mobilisation significative.

                            Des élèves insuffisamment associés à l’élaboration des projets

                            Le principal reproche formulé par les élèves à l’égard des activités du programme est leur faible prise sur le choix des activités comme sur le déroulement des projets. Seulement 10% des élèves ont le sentiment d’être associés à l’élaboration des projets.

                            Même s’il faut différencier l’expression de ce ressenti entre groupes d’élèves, ils expriment une forte envie de participer à l’élaboration des projets et souhaitent expérimenter des dynamiques artistiques co-construites de manière plus innovante. Que ce soit chez les lycéens, les collégiens ou les écoliers, les élèves expriment régulièrement le fait d’être dépossédés du projet dans son ultime phase de réalisation (en raison de contraintes techniques et organisationnelles). Leur souhait d’aller « au bout » du projet est particulièrement fort et résonne avec l’enjeu plus général d’association des élèves aux démarches engagées. 9

                            Préconisation 10 : Favoriser l’appropriation du programme par les élèves

                            La question de la participation des enfants déborde le seul cas de l’EAC, mais peu de champs disposent des moyens et d’un niveau d’expertise comparable à celui que nous avons observé. Les études sur la participation ont révélé l’éclipse du public dans les dispositifs participatifs. Ces études montrent « les impensés » caractérisant les dispositifs participatifs, ces derniers prenant des formes tantôt disciplinaires, tantôt technicistes et procédurales, aboutissant à une sous-représentation des catégories les plus démunies. 

                            Dans cette lignée, il serait sans doute profitable aux commanditaires de cette étude de travailler délibérément à favoriser les appropriations du programme par les élèves pour ses prochaines déclinaisons. Le fait que les enfants ne soient associés à aucune des phases préparatoires liées au choix de la thématique ou de l’activité par exemple est problématique. Le risque est sérieux dans le cas contraire de s’éloigner d’une démarche favorable au développement de l’esprit critique et de l’émancipation qui est pourtant au cœur de l’histoire de l’EAC.

                            En d’autres termes, il nous semble indispensable de promouvoir des logiques d’appropriation favorable à un pouvoir d’agir qui ne peut se déployer qu’à la condition d’une mobilisation avec les élèves plutôt que pour eux. Cela suppose une évolution de la construction administrative et calendaire des projets.

                            Une adhésion au programme qui ne suffit pas à résoudre les tensions de l’école autour des enjeux d’apprentissages et d’émancipation

                            La forte adhésion mesurée à l’égard du programme ne suffit pas à résoudre l’épineuse question des effets de la démarche sur les apprentissages ordinaires ou l’émancipation des élèves. La tentation d’un rapport instrumental à l’activité artistique et culturelle se pose pour les élèves les plus éloignés de la culture scolaire.

                            Ce sont bien ceux qui sont le mieux scolairement dotés qui parviennent, comme c’est le cas pour les apprentissages ordinaires, à faire le lien entre les activités culturelles engagées au sein du programme et les bénéfices qu’elles sont susceptibles de produire sur le plan personnel ou scolaire.

                            Les usages pédagogiques utilisés dans le cadre du projet correspondent à ce que les travaux sur la question ont identifié comme forme ordinaire de l’EAC : pédagogies du détour, valorisation des épreuves de socialisation, découvertes d’œuvres et de répertoires patrimoniaux, initiation à l’approche esthétique et savante des œuvres, introduction à la création artistique. Mais les différents modes d’articulation de ces usages dans ces projets composites contribuent inégalement à l’appropriation par les élèves des contenus qu’ils connaissent le moins. Les intervenants, appuyés parfois par les enseignants, invitent à découvrir une appréciation savante des répertoires culturels travaillés. Ici ce seront les effets de styles qui seront mis en avant, là les ancrages historiques d’un courant plastique ou littéraire, ailleurs encore les critères esthétiques qui contextualisent une œuvre contemporaine.

                            Préconisation 11 : Accroître le processus d’adhésion

                            Nous faisons l’hypothèse que le peu d’association des élèves à la démarche d’élaboration et/ou de finalisation des activités engagées renforce la difficulté pour ceux qui sont les plus éloignés de la culture scolaire, à lier les activités engagées pour les remobiliser dans des tâches scolaires ordinaires ou sur un registre d’émancipation. Le travail d’explicitation de la démarche doit sans doute être renforcé, comme la légitimation du projet dans un cadre scolaire souvent envisagé comme saturé de contraintes et d’obligations par ailleurs. Si cet enjeu dépasse le seul cadre de l’EAC, il nous semble, en écho à quelques travaux qui le rappellent récemment, que les projets qui s’y déploient sont fortement contraints de travailler à cette explicitation, au risque de ne plus être lisibles par une partie des élèves qui constituent pourtant une cible de premier choix au regard des ambitions de généralisation du programme.

                            Conclusions Quel projet « idéal » pour les enfants ?

                            Les méthodologies croisées proposées nous permettent de définir un « projet idéal » comme envisagé par les enfants. L’enjeu n’est pas ici de projeter cette perspective du point de vue institutionnel ou politique, mais plutôt de l’utiliser pour comprendre les ressorts susceptibles d’accroitre les processus d’adhésion au programme et aux démarches engagées autour de l’EAC en général. Trois marqueurs se détachent :

                            • les projets doivent être co- construits avec les élèves ;
                            • les projets doivent valoriser les sorties et privilégier la rencontre avec les œuvres en dehors de l’environnement scolaire ;
                            • les projets doivent prévoir des espaces d’interactions dynamiques et innovants privilégiant de bonnes relations entre les acteurs (élèves, enseignants et intervenants) tout en respectant le cadre scolaire.

                            C’est là finalement une vision de l’EAC qui, si elle est enfantine, nous semble parfaitement en phase avec les principes qu’affirme cette politique publique.

                            Points d’attention

                            Le programme PEGASE contribue sans aucun doute au développement de cette ambition de promotion de l’éducation artistique et culturelle.

                            Il ne suffit pas à épuiser les tensions exogènes et particulières que l’action engage, mais il est un moyen de poser les jalons de certaines conditions à l’intervention, non pas sur la base d’un « programme modèle » duplicable, mais plutôt à partir des nécessaires ajustements et considérations à porter aux dynamiques locales, aux cadres structurels de l’école, à la mobilisation singulière des acteurs du champ artistique et culturel. Dans le même sens, cette recherche- évaluation n’a pas la prétention d’épuiser le sujet des recommandations ou des analyses à propos des caractéristiques et des effets de ce programme.

                            Les échantillons dont nous disposons du point de vue quantitatif restent restreints pour prétendre à des conclusions généralisées. Les corpus qualitatifs bien que très significatifs ne sont pas confrontés terme à terme à d’autres espaces scolaires immédiatement comparables ; la mesure des effets de long terme comme ceux qui existent peut-être dans d’autres sphères telles que la famille par exemple est aujourd’hui inaccessible.

                            Défis et ambitions de la généralisation d’une EAC émancipatrice

                            Ce rapport se veut en revanche une contribution à l’analyse collective des besoins comme des ressources disponibles dans ce programme, et plus largement à l’idée d’une généralisation de l’EAC qui devrait profiter au plus grand nombre.

                            Tout au long de cette enquête, nous avons été vigilants à ne pas nous enfermer dans un rapport prescripteur aux terrains. Ce serait cédé à la facilité des positions académiques plutôt que d’affronter les tensions de l’analyse et de ses complexités. Il nous semble que le temps de la généralisation de l’EAC pose des défis fondamentaux qu’il ne faut pas négliger, au risque de dénaturer profondément son ambition.

                            Comme l’écrit très justement Alain Kerlan,  la politique éducative des arts est désormais au pied du mur. Ou bien elle persiste à peaufiner la façade consensuelle et, en effet, elle ne peut contribuer qu’à la dissolution du pouvoir émancipateur de l’art dans un faux partage du sensible. Ou bien elle veut être fidèle à cette mission émancipatrice et elle doit opposer la multiplication des hétérotopies à la généralisation consensuelle.

                            Cette politique est sans doute à inventer, mais elle consiste d’abord à porter ce qui existe déjà, et à conforter ce qui ne demande qu’à être : elle a la chance que cette politique- là ait déjà commencé avant elle, comme en témoigne la multiplicité trop méconnue des expériences et des initiatives. À la politique de généralisation "par le haut", préférons une politique de diffusion des hétérotopies "par le bas". » (Kerlan, 2017, p. 24).

                            C’est bien à cette aspiration que la dynamique développée sur les territoires de l’académie de Versailles et la démarche du programme PEGASE nous engagent. A sa hauteur, ce rapport s’inscrit dans cette filiation d’une contribution aux réflexions qu’il reste à mener collectivement pour continuer de porter un projet de l’EAC émancipateur.

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                            https://reseau-pegase.org/2023/06/27/celebrer-5-ans-deducation-culturelle-et-artistique-a-lecole/

                            https://www.ac-versailles.fr/pegase-programme-experimental-de-generalisation-des-arts-a-l-ecole-123938

                            • Education artistique
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                              An@é

                              Île-de-France : Prix « Patrimoines en poésie », des enfants récompensés

                              1 mois 3 semaines ago
                              A l’Hôtel de la Marine, à Paris, c’était fête la matinée du 23 mars 2024 pour la Cérémonie du Prix…Un vif succès

                              A ce jeu-concours, les enfants poètes sont invités à décrire leur monument francilien préféré. Le poème peut aussi concerner une œuvre, un site naturel, le patrimoine urbain contemporain, la gastronomie…

                              Cette huitième édition a remporté un vif succès avec plus de mille enfants participants et soixante-quatre poèmes présélectionnés. Cinquante-cinq ateliers d’écriture ont permis la préparation au jeu-concours. Les enfants choisissent un monument, un courant artistique, un jardin remarquable, et le décrivent avec leurs mots et leur sensibilité. La participation peut être individuelle ou familiale, en classe, en atelier d’écriture – deux prix spéciaux ont été décernés pour des travaux réalisés en atelier d’écriture.

                              Dans la cour de l’ancien palais du Garde-Meuble de la Couronne, les enfants venus de toute la région parisienne étaient réunis avec leurs parents et leurs professeurs pour un moment dédié au patrimoine et au plaisir des mots.

                              Éveiller à la curiosité

                              Pour cette nouvelle édition, différents lieux sont mis à l’honneur, la Ville de Paris et sa richesse patrimoniale (les catacombes, les colonnes de Buren…), le Musée de la Grande Guerre de Meaux, le Parc de Rentilly… A la lecture du titre d’un poème, une partie du public n’a pas pu s’empêcher de sourire, car il a pour sujet les rats de Paris : « nos amis les bêtes » et « fouilleurs de poubelles » qui découvrent « à leur guise, la Tour Eiffel et le Sacré-Cœur ».

                              Un autre poème donne la parole à un tableau peint par Van Gogh dans l’auberge où il logeait à Auvers-sur-Oise et l’humour est aussi au rendez-vous. L’intérêt de ce jeu-concours est de faire s’exprimer les enfants. Dans le contexte difficile, ils entendent le bruit du monde, des poèmes évoquent la paix, la Première Guerre mondiale, leurs préoccupations. L’originalité, la qualité de l’expression, et la créativité sont des atouts mais l’objectif est bien sûr d’éveiller à la curiosité et d’encourager à l’écriture. Une des lauréates a emporté le Prix pour la seconde année consécutive. Les écoles et collèges qui participent renouvellent généralement l’expérience qui peut s’intégrer dans le parcours d’éducation artistique et culturelle. Les différents textes primés sont publiés dans un recueil avec leurs riches illustrations (dessins, créations plastiques) et remis à chaque enfant participant.

                              Après cette remise de Prix, les enfants et leurs familles ont pu visiter de façon immersive avec un casque audio l’Hôtel de la Marine, pour une traversée de l’Histoire jusqu’à la Révolution française. La visite se termine dans la loggia qui offre une superbe vue sur la place de la Concorde et sur d’emblématiques monuments de Paris.

                              Fatma Alilate

                               

                              Prix Patrimoines en poésie

                              Les lauréats Participation individuelle 8-10 ans 1er prix : Madeline Bœuf (10 ans) – « Les catacombes de Paris », 2e prix : Quentin Albert (10 ans) – « Les Colonnes », sur les Colonnes de Buren, 3e prix : Jamal Wadoux (9 ans) – « Nos amis les bêtes », sur les rats de Paris

                              Les lauréats Participation individuelle 11-12 ans 1er prix : Haron Vergnet-Agrabi (11 ans) – « Paris, mon espoir, ma vie ! », une balade parisienne sur le thème de la paix, 2e prix : Lewis Aceto (11 ans) – « Portrait de guerre », inspiré par le musée de la Grande Guerre de Meaux, 3e prix : Erin Dorme (12 ans) – « Histoire du brie qui ne voulut être mangé »

                              Les lauréats Participation en atelier 11-12 ans 1er prix : Anna Jean (11 ans) - « Moi, la chambre de Van Gogh », sur la maison de Van Gogh à Auvers-sur-Oise, avec le collège Sainte-Elisabeth à Paris 15e, 2e prix : Noé Garcia-Yates (11 ans) - « Monsieur Tout-le-Monde et l’Art nouveau », sur la ville de Nogent-sur-Marne, avec le collège Edouard Branly à Nogent-sur-Marne (94), 3e prix : Fanny Tanquart (11 ans) - « Le Parc de Rentilly », avec le collège des Remparts à Rozay-en-Brie (77)

                              Les lauréats Prix spéciaux en atelier d’écriture Le Jury a attribué deux Prix spéciaux ex-aequo pour des travaux réalisés dans le cadre d’un atelier. Un Prix spécial a été attribué à l'école Roger Ferdinand de Palaiseau (91) pour son recueil intitulé « Chez Elsa Triolet et Louis Aragon » portant sur la Maison Aragon-Triolet de Saint-Arnoult-en-Yvelines (catégorie 8-10 ans).

                              Un autre Prix spécial a été décerné à la Bibliothèque Hergé du 19e arrondissement de Paris, qui a collaboré avec le Labomatique et le CICAT pour la réalisation de poèmes et de photographies sur un ensemble de sites parisiens des 18e et 19e arrondissements (catégorie 8-10 ans).

                              Auteur : Fatma Alilate
                              Photos : Concours Patrimoines en poésie - 8ème édition : © Région Île-de-France

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                                Fatma Alilate

                                Universcience vous dévoile les résultats de son Baromètre de l'esprit critique

                                1 mois 4 semaines ago
                                Quel est le rapport de nos concitoyens à la science, aux médias et au débat d’idées ? Gardent-il un bon…

                                Pour la 3ème année consécutive, Universcience, l’établissement public qui regroupe le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l'industrie, sonde les Françaises et les Français sur toutes ces questions, et bien d’autres, pour mieux cerner leur rapport à l’esprit critique. Pour cette édition 2024, le Baromètre questionne en ouverture leur perception et leur compréhension de l'intelligence artificielle. Quels secteurs va-t-elle changer, est-elle fiable et neutre, et pourrait-elle un jour recevoir un prix Nobel ?

                                Voici ci-dessous les grands enseignements de cette étude :

                                1. Les Français et l'intelligence artificielle : intéressés, ils ne sont pas prêts à la laisser piloter un avion ou prescrire un médicament

                                • Comment les Français et les Françaises perçoivent-ils le sujet de l'IA ? Si 61% des sondés y voient une révolution technologique majeure du niveau de celle de l’imprimerie, 85% pensent nécessaire sa réglementation.
                                • Sur les tâches qu'ils pourraient leur confier : 75% lui font confiance pour détecter des erreurs, 73% analyser des données, 70% trouver des informations. En revanche, piloter un avion ? Seulement 28%. Prescrire un médicament ou rendre des décisions de justice, seulement 33% et 25%.
                                • Concernant les IA génératives : 65% du panel en ont déjà entendu parler, mais seulement 23% en ont déjà utilisé, 34% ne sachent pas de quoi il s'agit.
                                • Délivrer le prix Nobel à une IA ? 74% des sondés répondent par la négative.
                                2. Les Français et la science : un intérêt confirmé pour la science, mais des interrogations éthiques et des disparités de genre, économiques et territoriales

                                • Les sujets scienfiques, comme ceux relatifs aux nouvelles technologies, intéressent 69% des sondés - c’est plus que le sport (48%) ou même la politique (61%).
                                • 8 à 9 enquêtés sur 10 jugent très positivement la science et ses apports.
                                • Quelles disciplines sont-elles vraiment scientifiques ? Si, sans surprise, la chimie, la médecine et la biologie se détachent, les sciences humaines (archéologie, sociologie) reçoivent des réponses moins tranchées. L’économie se retrouve quant à elle en bas de classement, 26 % seulement des répondants la considérant comme une science, ce qui la situe derrière l’homéopathie.
                                3. Les Français et l'esprit critique : un rapport différencié

                                • Si la majorité des répondants se définit comme ayant l’esprit critique (75%), un quart répond par la négative ou ne se prononce pas.
                                • Lorsqu'on leur demande de définir l'esprit critique, ils le définissent en premier lieu par le raisonnement logique et rationnel (44%), la capacité à se méfier de ses propres intuitions (14%) Sur la manière de débattre, les réseaux sociaux sont plus utilisés chez les jeunes que par l'ensemble du panel (34% vs 22%).
                                • Lorsqu'on interroge les sondés sur les enseignements qui leur ont permis de développer leur esprit critique, ils pointent le français et la littérature, deux fois plus que les mathématiques.
                                4. Les Français et les moyens d'information : des différences générationnelles et de genre

                                • Internet (hors réseaux sociaux, 71 %) et la télévision (67 %) sont toujours leurs deux principales sources d’information, avec de fortes différences générationnelles. Chez les jeunes, Internet domine, avec une hausse de 5 points par rapport à 2023.
                                • Même si l’écoute de la radio est en léger recul, elle demeure le média qui suscite le plus la confiance (55 %)
                                5. Les 18-24 ans : plus intéressés par les sciences, plus connectés et ouverts à l'IA que la moyenne du panel
                                • Concernant l'IA, 46% des jeunes ont déjà utilisé une IA générative, soit deux fois plus que la moyenne du panel.
                                • Ils ressortent comme ayant des pratiques scientifiques plus élevées que la moyenne : la prise d'informations par exemple, 79% contre 62% pour le reste du panel.
                                • Pour ce qui est du débat, les jeunes préfèrent échanger avec des personnes qui partagent leur opinion (64% contre 46%).
                                • Pour s'informer, Internet reste leur principale source, en hausse de 5 points par rapport à 2023.

                                > L'intégralité des résultats de cette édition sont à retrouver dans le dossier de presse en téléchargement et sur universcience.fr

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                                Le Baromètre de l’esprit critique a été conçu avec l’appui d’un comité scientifique réunissant :

                                • Michel Dubois, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), directeur du GEMASS (Groupe d’Étude des Méthodes de l’Analyse Sociologique de la Sorbonne)
                                • Emiliano Grossman, professeur associé à Sciences Po, rattaché au Centre d'études européennes et de politique comparée et directeur du Centre de données socio-politiques (CDSP)
                                • Elena Pasquinelli, responsable Recherche et évaluation, Fondation La main à la pâte, associée à l’Institut Jean-Nicod, membre du Conseil scientifique de l’Éducation nationale
                                • Magda Tomasini, directrice de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse
                                • Michel Wieviorka, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS)

                                La partie IA a été conçue avec la relecture de :

                                • Jean-Gabriel Ganascia, professeur Sorbonne Université, chercheur au LIP6.
                                • Lionel Obadia, professeur en Anthropologie, université Lyon 2 / LARHRA (UMR5190) actuellement engagé dans des travaux sur l’IA et la robotique.
                                Du 21 mars au 3 avril 2024 Le Printemps de l'esprit critique

                                Initié à la Cité des sciences et de l’industrie et aux Étincelles du Palais de la découverte en 2022, le Printemps de l’esprit critique propose deux semaines d’événements, d’ateliers, de conférences et de formations pour sensibiliser à l’importance de l’esprit critique et permettre à chacun de le cultiver, du 21 mars au 3 avril 2024.

                                Pour sa troisième édition, le Printemps devient national en s’ouvrant à de nombreux acteurs de la culture scientifique et de l’éducation aux médias (centres de culture scientifique, bibliothèques, institutions d’enseignement supérieur et de recherche, acteurs associatifs...).

                                Une cinquantaine de participants, répartis sur tout le territoire (dont quatre à l’étranger), présente une riche programmation à destination de tous les publics. La plupart d’entre eux ont intégré des focus sur l’intelligence artificielle, thématique de l’édition 2024 du Baromètre de l’esprit critique. À la Cité des sciences et de l'industrie, le public aura accès à un parcours spécifique avec cinq médiations inédites autour de l'intelligence artificielle.

                                > Découvrez toute la programmation du Printemps de l'esprit critique dans le dossier de presse en téléchargement.

                                1-_Dossier_Presse_PEC20242.pdf

                                1-Baromètre_DP_BEC20241.pdf

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                                  Intelligence Artificielle : un manuel ouvert pour les enseignants

                                  1 mois 4 semaines ago
                                  Par Colin de la Higuera et Jotsna Iyer *: La première édition de ce manuel a été publiée en octobre…

                                  Les enseignants et les institutions n’ont pas tardé à réagir, que ce soit pour saluer l’arrivée d’un nouvel outil à intégrer dans la boîte à outils pédagogique ou pour l’interdire en raison de la menace potentielle qu’il semblait pouvoir véhiculer. Le débat a fait rage dans la presse, mais aussi au sein des organismes internationaux. Des pétitions et des lettres ouvertes ont été signées. L’impact sur le marché du travail a été mesuré et certaines entreprises ont déjà commencé à remplacer une partie de leur personnel par l’IA.

                                  Pour les auteurs de ce manuel, cela a suscité une question essentielle et a créé un défi, mais aussi une opportunité. La question qui se posait était celle que tout auteur d’un livre de technologie craint le plus. Mon livre est-il obsolète ? Il aurait pu s’agir de la plus brève espérance de vie jamais enregistrée pour un livre : quelques jours tout au plus. Le défi consistait alors à intégrer les nouveautés apportées par le tsunami ChatGPT dans la seconde édition. Et l’opportunité consistait à publier le livre au meilleur moment, à savoir quand il allait être vraiment nécessaire.

                                  La question : l’importance assumée par l’IA Générative signifie-t-elle que le reste de l’IA est devenu inutile?

                                  Cette question est logique : ChatGPT a été largement adopté parce qu’il est très facile à utiliser. Certaines personnes qui sont devenues expertes en matière d’IA Générative en 2023 ne connaissaient pas grand-chose à l’IA en 2022 ! On pourrait, donc, être tentés de penser que les IA Génératives reposent sur du vent et qu’il suffirait, pour les comprendre – si tel est le but – de lire uniquement ce qui a été écrit au cours des 12 derniers mois. Par conséquent, est-il encore nécessaire de comprendre l’apprentissage automatique et les différents outils développés par les spécialistes de l’intelligence artificielle au cours des 70 dernières années ?

                                  Nous pensons que la réponse est “oui”. Même si elle représente un pas en avant exceptionnel, l’IA générative se fonde sur des technologies et des idées qui sont connues depuis des décennies. La compréhension des données, des distorsions, de l’apprentissage non supervisé, de la personnalisation, de l’éthique est encore une composante essentielle des connaissances qu’un enseignant doit posséder avant d’utiliser l’IA en classe.

                                  Le défi

                                  Le défi résulte de la nécessité de devoir traiter d’une technologie en pleine évolution, de manière à satisfaire les exigences d’un enseignant qui souhaite travailler à partir de connaissances non éphémères – ce qui est tout à fait compréhensible –, pour fonder ses cours sur des concepts et des technologies qui résisteront au temps. Pour ne citer qu’un exemple, il suffit de citer la notion d’hallucination, qui a tant changé au cours de ces 12 derniers mois, et qui va être cruciale dans la manière dont les enseignants adopteront les IA génératives.

                                  L’opportunité

                                  L’opportunité résulte de l’urgence avec laquelle tous les acteurs concernés se penchent actuellement sur la question de l’intelligence artificielle dans l’éducation. Alors qu’en 2020, lors du lancement du projet AI4T, il allait être difficile de recruter suffisamment d’enseignants pour qu’ils apprennent l’IA, afin de pouvoir valider les résultats expérimentaux du projet, en 2023 la place de l’intelligence artificielle dans l’éducation est devenue hautement prioritaire dans tous les pays.

                                  Quelles sont les nouveautés de cette nouvelle édition?

                                  Bien entendu, nous avons dû tenir compte de l’arrivée de ChatGPT (et, par la suite, d’autres IA génératives). Un paragraphe entier (7) est maintenant consacré à la compréhension du phénomène et à des propositions sur la manière dont les enseignants devraient profiter de ces technologies.

                                  Pour les aspects les plus techniques, nous avons choisi de privilégier les images par rapport au texte. Par conséquent, cette version comporte beaucoup de nouvelles illustrations. Nous avons également ajouté 15 brèves vidéos qui pourront aider à comprendre, du moins nous l’espérons, des concepts importants.

                                  Le défi de l’ouverture et du multilinguisme

                                  Ce manuel est diffusé sous licence libre, ce qui signifie qu’une licence Creative Commons a été utilisée et que toutes les images, les vidéos et tout le matériel supplémentaire ont été minutieusement analysés pour pouvoir être librement partagés. Chacun peut donc prendre le matériel ou une partie de celui-ci et le réutiliser comme il le souhaite ou même y apporter des modifications. Différents formats d’exportation sont disponibles et les auteurs peuvent probablement partager leur matériel de toute manière susceptible d’assurer la durabilité du manuel : il pourra continuer à vivre avec de nouvelles versions et de nouveaux projets.

                                  Comme toujours, la seule obligation applicable concerne la citation des sources, à savoir des auteurs du livre ou des différents chapitres, le cas échéant.

                                  Une modification a été prévue, en particulier, avec le plus grand soin. La traduction est possible et nous sommes déjà en train de traduire la version originale anglaise en français, slovène, italien et allemand. De nouveaux projets de traduction du manuel dans d’autres langues sont également en train de naître. Nous sommes persuadés que l’IA peut contribuer au processus de traduction, bien qu’une post-édition humaine soit toujours nécessaire.
                                  Si vous souhaitez faire traduire le livre dans votre langue, nous vous invitons à nous contacter en vue de la création d’un partenariat !

                                  Que disions-nous il y a un an à peine ?

                                  Commençons par ce que vous savez déjà : l’IA est partout et l’éducation ne fait pas exception. Selon certains, l’avenir est lumineux et les futures technologies permettront de rendre l’éducation accessible à tous et pourraient même apporter une aide en cas de pénurie d’enseignants. La technologie permettra à l’enseignant de se consacrer davantage à des tâches « nobles », en laissant à la machine celles plus ‘ennuyeuses’, comme la notation, l’organisation de la classe, les entretiens individuels avec les élèves ou la répétition des leçons.

                                  Pour d’autres, ces algorithmes d’IA représentent un énorme danger et les milliards de dollars que l’industrie est prête à investir dans ce domaine prouvent que l’éducation est maintenant considérée comme un véritable marché. Ce qu’elle n’est pas.

                                  Quelque part à mi-chemin entre ces différents positionnements, on retrouve les chercheurs, les pédagogues, les responsables politiques qui ont pris conscience d’un certain nombre de choses, à savoir que l’IA ne va pas disparaître et qu’elle aura sa place à l’école, si ce n’est pas déjà le cas. Et aucun ministre – et encore moins un enseignant – ne sera en mesure d’y mettre un frein.

                                  A partir de cette constatation, comment l’enseignant peut-il maîtriser la bête et exploiter au mieux l’intelligence artificielle ? Comment l’enseignant peut-il faire en sorte que l’IA soit au service des élèves et non pas l’inverse ?

                                  Le but de ce manuel est d’aider l’enseignant dans cette tâche. Il a été créé dans le cadre du projet Erasmus+ AI4T (Artificial Intelligence for Teachers).

                                   Logo du projet AI4T

                                  Des équipes d’Irlande, du Luxembourg, d’Italie, de Slovénie et de France ont travaillé ensemble pour proposer des ressources d’apprentissage destinées à permettre aux enseignants d’apprendre à connaître l’IA et plus particulièrement l’IA pour l’Éducation. Le matériel d’apprentissage et une présentation du projet et de ses résultats sont disponibles sur la page web du projet AI4T (https:/ www.ai4t.eu/).

                                  La formation des enseignants représente une tâche essentielle pour tous les ministères concernés.

                                  Dans le cas de l’Intelligence Artificielle, cette tâche comprend au moins les aspects suivants, à savoir :

                                  1. Faire comprendre aux enseignants que ce type de formation peut être une chose positive. Il ne peut pas s’agir d’une décision imposée : elle doit être partagée.

                                  2. Présenter l’IA : d’après l’expérience que nous avons acquise lors de nombreuses conférences et de nombreux ateliers, il y a toujours des participants qui ont exploré la question et qui ont lu et assimilé de la documentation à ce sujet. Mais, ce n’est pas le cas de la grande majorité.

                                  3. Expliquer comment l’IA peut fonctionner en classe. Quels sont les mécanismes de fonctionnement ? Quelles sont les idées essentielles ?

                                  4. Utiliser l’IA dans le cadre des tâches éducatives.

                                  5. Analyser ce qui se passe dans ce domaine et être un acteur actif du changement à venir.

                                  Nous espérons que ce manuel pourra vous aider dans le traitement de la plupart de ces questions : nous analysons la situation réelle et établissons une corrélation entre l’IA et l’expérience des enseignants et, en faisant cela, nous espérons encourager ces derniers à s’intéresser encore davantage à ces questions.

                                  Il y aura, sans aucun doute, d’autres défis à relever, d’autres erreurs, probablement une forte opposition et quelques controverses. Dans les chapitres intitulés ‘Parlons IA’, nous cherchons à expliquer comment et pourquoi les algorithmes fonctionnent. Nous voulons aider les enseignants à être des citoyens informés capables de participer pleinement au débat et aux discussions sur l’éducation et l’intelligence artificielle. Quelques-unes des raisons qui ont motivé la préparation de ce matériel sont décrites dans la vidéo réalisée par AI4T.

                                  Nous sommes persuadés que :

                                  • Une certaine connaissance de l’Intelligence Artificielle est nécessaire. Nous devons expliquer cela, car nous entendons dire souvent que ‘l’on n’est pas obligé de savoir comment fonctionne le moteur pour conduire une voiture’. Ce n’est pas tout à fait vrai : la plupart d’entre nous, tout en ne sachant pas comment fonctionne un moteur, acceptent l’idée que leur fonctionnement se fonde sur la science et la technologie.

                                  Nous l’acceptons parce qu’à l’école nous avons appris les principes de base de la physique et de la technologie. De même, nous ne serions pas convaincus par un livre qui nous dirait de ne pas fumer sur la base d’arguments statistiques concernant le nombre de décès prématurés liés au tabagisme. Encore une fois, nous sommes en mesure de comprendre pourquoi le tabac est nocif, parce que l’un de nos enseignants nous a appris, à un moment ou à un autre, le fonctionnement du système respiratoire, à quoi servent les poumons, etc. Nous pensons que ceci s’applique également, aujourd’hui, compte tenu de l’énorme impact que l’IA exerce sur la société : il ne suffit pas de s’informer sur les effets de l’IA. Les enseignants doivent savoir comment elle fonctionne. De même que le but n’est pas de transformer chacun en un biologiste ou un physicien, il s’agit, ici, uniquement de comprendre certains principes et certaines idées.

                                  • Les enseignants sont des apprenants extraordinaires. Ils seront encore plus critiques si certaines choses ne sont pas correctement expliquées et seront encore plus motivés. Ils veulent comprendre. Ce manuel est destiné aux gens qui veulent aller plus loin et qui ne seront pas satisfaits tant qu’ils n’auront pas compris.
                                  • En deuxième lieu, l’IA doit être utilisée dans un environnement sûr : les ordinateurs ou les autres dispositifs seront connectés à Internet, les applications fonctionneront sur le cloud. Ceci comporte un gros problème de sécurité et l’enseignant doit donc s’assurer que l’environnement dans lequel il travaille avec ses élèves est protégé. Il convient d’ajouter que la sécurité informatique représente une question extrêmement complexe et qu’un enseignant ne sera pas en mesure de vérifier les spécifications et de constater que le logiciel est sûr. Cette tâche devra être confiée à une source de confiance.
                                  • L’IA est utile si elle est employée dans un environnement d’apprentissage précisément défini et contrôlé, pour une tâche que l’enseignant a jugée importante. Pour des raisons évidentes de nature économique, les enseignants recevront de plus en plus de produits mis en avant par l’industrie pour les aider à accomplir des tâches que, parfois, ils n’ont même pas jugées importantes. Mais, comme ils sont amusants et font l’objet d’une promotion efficace, ces produits peuvent être considérés importants. Un bon enseignant doit en être conscient et nous espérons pouvoir présenter dans ce manuel suffisamment d’éléments capables de permettre aux enseignants d’identifier ce type de produits et de situations.
                                  • En préparant ce didacticiel, nous avons rencontré un problème sérieux. Nous avions l’intention d’utiliser des logiciels d’IA que nous allions pouvoir recommander aux enseignants, de manière à ce qu’ils puissent être rapidement en mesure de les utiliser en classe. Malheureusement, cela n’a pas été le cas : beaucoup de logiciels ne sont pas encore suffisamment matures, beaucoup de questions de nature éthique doivent encore être résolues et, dans la plupart des cas, plusieurs ministères et gouvernements n’ont pas encore approuvé la liste des logiciels. Nous avons donc décidé de changer d’approche : nous allons mentionner les logiciels dans le manuel. Nous avons choisi cette option parce qu’elle explique un certain aspect de l’IA dans le domaine de l’éducation. Mais, nous n’allons promouvoir aucun logiciel en particulier.

                                  Nous avons quelques raisons de croire que, dans un futur proche, des organismes internationaux tels que l’Unesco, l’Unicef ou le Conseil de l’Europe, apporteront des éléments concrets.

                                  Maintenant, et avant de vous laisser apprécier la lecture de ce manuel, nous souhaitons remercier certaines personnes qui nous ont aidés dans la préparation de ce manuel.

                                  Tout d’abord, nous avons profité de la lecture des oeuvres de Wayne Holmes et de longues heures d’entretiens avec lui.

                                  Un débat a également eu lieu au sein du consortium AI4T avec l’organisation d’ateliers qui ont contribué à donner de la visibilité à ce sujet.

                                  Les enseignants eux-mêmes ont été une source d’information essentielle : nous avons pu échanger des idées avec eux dans le cadre de séminaires et de webinaires, pour comprendre lesquelles, parmi ces idées, sont simplement confuses ou tout à fait erronées.

                                  Certains ont fourni des avis précieux, ont relu le document ou suggéré des liens et des textes, tandis que d’autres ont ajouté des chapitres:

                                  • Manuel Gentile nous a apporté son aide dans la rédaction de certains chapitres et a fait preuve de compétence pour rendre accessibles les aspects les plus obscurs de l’IA ;
                                  • Fabrizio Falchi et Giuseppe Città ont été des collaborateurs formidables et nous ont aidés à comprendre toute une série de questions liées à l’IA ;
                                  • Azim Roussanaly, Anne Boyer et Jiajun Pan ont eu la gentillesse de rédiger le chapitre sur l’analyse de l’apprentissage ;
                                  • Wayne Holmes a rédigé un chapitre sur l’agentivité, une question qui devient importante, en ce qui concerne les implications éthiques de l’IA ;
                                  • Michael Halissy et John Hurley ont exploré la question des devoirs à la maison et des évaluations après l’arrivée des AI Génératives ;
                                  • Bastien Masse est devenu un expert dans l’apprivoisement de l’invite (prompt) ; il a partagé ses compétences ici ;
                                  • Blaž Zupan a présenté le logiciel Orange, qui a été développé par son équipe pour utiliser l’Apprentissage Automatique.

                                  Un remerciement particulier va à tous ceux qui ont traduit ce manuel en français, italien, allemand et slovène : Solenn, Manuel, Daniela et Helena.

                                  IA pour les enseignants: un manuel ouvert

                                  *Par Colin de la Higuera, Professeur à l'Université de Nantes et chercheur au Laboratoire d'informatique de Nantes-Atlantique (Lina). Ancien président de la Société informatique de France, espace de réflexion, de concertation sur les enjeux de l’informatique

                                  Jotsna Iyer, Université de Nantes, Chaire Unesco RELIA

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                                  IA pour les enseignants : un manuel ouvert Copyright © 2024 by Colin de la Higuera et Jotsna Iyer is
                                  licensed under a Licence Creative Commons Attribution 4.0 International

                                   

                                  • Intelligence artificielle
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                                    Pour une éducation aux médias et à l’information (de) tous les jours

                                    1 mois 4 semaines ago
                                    Ce lundi 18 mars 2024 s’ouvre la 35e édition de la Semaine de la presse et des médias dans l’école. Chaque année, dans…

                                    Si cette manifestation a son importance, elle ne suffit bien sûr pas à mener à bien tous les objectifs énoncés ci-dessus. L’observation des pratiques informationnelles enfantines et adolescentes, comme l’analyse des situations d’apprentissage dans le monde scolaire mais aussi en famille, en médiathèques ou dans les communautés associatives, plaident incontestablement pour une banalisation de l’éducation aux médias et à l’information (EMI).

                                    Cette éducation est une pierre angulaire du développement d’une culture générale. Comment s’y prendre pour mieux l’ancrer dans le quotidien des jeunes générations ?

                                    Une recherche d’informations quotidienne

                                    Dès l’enfance, les pratiques informationnelles existent et participent du développement de loisirs et d’activités. Prenons l’exemple d’Emeline, 10 ans. Passionnée de botanique, elle effectue des recherches en ligne sur les plantes. De son côté, Aiden, 7 ans, utilise YouTube pour regarder « des vidéos de dessins pour avoir des techniques et des idées », et ensuite dessiner à son tour.

                                    Dès l’enfance aussi, ces pratiques d’information témoignent d’un enjeu d’intégration sociale fort. Ainsi, Rémy, scolarisé en CM2, raconte l’importance de ses recherches sur les faits de jeu de son équipe de football préférée. Il les partage avec ses frères et son père car, à la maison, on n’a plus les moyens financiers de se rendre au stade : « Quand on en parle à l’école le lundi, c’est comme si j’étais allé à Bollaert ! »

                                    Cette intrication des pratiques informationnelles avec le développement d’une personnalité et de ses goûts et la volonté de prendre sa place dans le monde monte en puissance avec l’âge.

                                    Les collégiens et les lycéens rencontrés sur le terrain racontent le plaisir de s’informer en groupe, de partager leurs découvertes entre pairs, de s’interroger ensemble sur les informations auxquelles ils accèdent. Dans toute leur diversité : non seulement sont évoquées les pratiques informationnelles médiatiques, dites d’actualité, mais aussi les pratiques informationnelles documentaires, extrêmement prégnantes dans la vie enfantine et adolescente.

                                    C’est quoi une information ? Les Clés des Médias (CLEMI, mars 2021).

                                    Contrairement à une vulgate répandue, et affirmée par des études aux contours flous et purement déclaratives, les enfants et les adolescents s’informent. Ils et elles s’informent sur leurs centres d’intérêt, leurs loisirs, mais aussi des sujets de société qui leur tiennent à cœur, à la manière de ces lycéennes qui peuvent discuter longuement des violences sexistes et sexuelles. Elles effectuent une veille informationnelle rigoureuse sur le sujet par le moyen des réseaux sociaux numériques.

                                    Adolescentes et adolescents s’informent avec un plaisir réel, lors de rituels qu’ils mettent en place, seuls, avec des pairs ou en famille. Vasco, lycéen de 17 ans, explique combien il aime « confronter « (ses) » informations avec celles de (sa) mère avec la télé. On n’est pas souvent d’accord, mais c’est ça qui est bien, on se parle ! »

                                    Ces générations tirent parti de ressources informationnelles qui échappent souvent au regard des adultes, à l’instar de Hugo Décrypte, fortement plébiscité par les lycéens, ou encore des titres de presse régionale ou nationale, dont ils suivent les publications via les réseaux sociaux numériques. N’oublions pas non plus les créateurs et créatrices de contenu, qui tiennent une place importante dans l’écosystème informationnel des publics juvéniles, notamment pour nourrir leur curiosité envers l’information documentaire (sur la santé, la sexualité, ou encore la physique ou le cinéma).

                                    Des rituels de familiarisation à l’information

                                    Ces pratiques informationnelles ont besoin de soutien, et les enfants comme les adolescents apparaissent très demandeurs d’accompagnement dans le domaine, conscients notamment de la difficulté à évaluer l’information dans un contexte généralisé de défiance, ou encore à gérer la réception des images violentes en ligne. Ils sont aussi désireux de développer plus encore leurs connaissances informationnelles « pour réussir dans la vie, parce que l’information c’est un tremplin », comme le note Romane, 17 ans.

                                    Les adolescents et les jeunes adultes rencontrés en enquête font part de rituels de familiarisation à l’information qu’ils considèrent comme fondateurs dans leur parcours. C’est le cas de Morgan qui, à 24 ans, tire le fil entre une expérience quotidienne de la lecture et de la discussion autour de la presse d’actualité à l’école primaire et son appétence actuelle, à l’âge adulte, pour la presse écrite :

                                    « Tu titres “De Mon Quotidien à Mad Movies” ! (rires) Sérieusement, je suis certain, ça me vient de là, le plaisir de la presse, tu vois, de prendre de l’info dedans, de savoir que je peux la partager, comme on faisait en primaire, quoi. »

                                    D’autres évoquent des apprentissages structurants, lesquels ont pu être observés lors d’un suivi longitudinal de lycéens dans leur entrée dans les études supérieures et dans la vie professionnelle. À 19 ans, Julie « ne remerciera jamais assez (son professeur documentaliste) qui lui a donné les bonnes cartes pour après ! », notamment en la sensibilisant au référencement bibliographique et au travail de sourçage de l’information.

                                      “Le smartphone, une porte d’entrée à l’information” (Sqool TV, 2023)

                                    Malheureusement, l’étude des parcours sur le long terme, et les enquêtes de terrain en milieu scolaire, montrent la difficulté à mettre en place une progression des apprentissages en éducation aux médias et à l’information. Les temps consacrés à l’information dans la classe, à son analyse comme à sa discussion, sont trop ponctuels.

                                    Or, intégrer des apprentissages informationnels au sein d’un environnement médiatique et documentaire pour le moins complexe, comprendre des concepts essentiels comme l’autorité informationnelle ou encore la ligne éditoriale, développer une culture des sources, tout cela demande du temps.

                                    Sortir du traitement évènementiel de l’éducation à l’information

                                    Le traitement évènementiel de l’information, auquel se trouvent souvent contraints les acteurs de l’éducation aux médias et à l’information, ne permet absolument pas de relever le défi. Tout d’abord, parce que, nous l’avons vu, ce traitement n’est pas à la mesure de la quotidienneté – joyeuse – de la vie sociale des enfants et des adolescents, et des enjeux qu’ils ont à affronter chaque jour pour appréhender le flux d’informations et en traiter le contenu, quel que soit son statut.

                                    Ensuite, la prise en charge des problématiques informationnelles et médiatiques ne saurait se limiter à la gestion d’un évènement en général tellement chargé émotionnellement (attentats, guerres) que la prise de distance nécessaire à la structuration de connaissances n’est pas possible.

                                    Enfin, l’étude des trajectoires informationnelles des acteurs suivis sur le long terme et les interrelations avec les formations en EMI dont ils ont bénéficié montrent à quel point la dimension temporelle est cruciale. C’est ce qui favorise l’intégration de compétences et de connaissances abordées de façon répétée de manière à ce que des transferts soient envisagés et envisageables. C’est ainsi qu’en situation, dans un nouveau contexte, les jeunes concernés seront en mesure de convoquer de nouveau des ressources, des types d’usages ou de pratiques abordés.

                                    Pour l’ensemble de ces raisons, c’est d’une éducation aux médias et à l’information du quotidien et au quotidien dont nos enfants et adolescents ont besoin, une éducation à la hauteur de la place qu’a l’activité informationnelle dans leur vie. C’est-à-dire une place quotidienne, profondément incarnée, sensible, joyeuse, et essentielle dans les sociabilités qu’ils mettent en œuvre, que ce soit avec la famille ou avec les pairs.

                                    Pour une éducation aux médias et à l’information (de) tous les jours (theconversation.com)

                                     Professeure des Universités en Sciences de l’Information et de la Communication, Université de Lorraine



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