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Horaire continu à l’école obligatoire : un rêve doré ?

Soumis par John Vuillaume le 23 octobre 2020
Photo niro

L’actualité neuchâteloise est tournée vers un projet novateur : l’école à horaire continu.
Selon une étude neuchâteloise, l’horaire continu est plébiscité par les parents qui désirent se consacrer pleinement à leur activité rémunérée durant la journée.
Ce modèle d’organisation familiale anglo-saxon a conquis les esprits, chez nous aussi.

Mais si l’on veut créer une école à horaire continu, et le canton de Neuchâtel ambitionne de se positionner sur ce créneau, il faut penser à un encadrement complet et soigné pour les enfants pendant toute la journée. Raccourcir les pauses de midi sans occuper les après-midis reviendrait à « lâcher dans la nature » tous les enfants qui se retrouveraient seul·es à domicile dès 15 heures et jusqu’en début de soirée. Cela fragiliserait davantage les familles défavorisées. Comment introduire un horaire continu généralisé sans un investissement conséquent et intelligent dans l’accompagnement de notre jeunesse?

Quand l’État se substitue à la famille, il doit le faire bien, en développant les devoirs surveillés et en organisant des activités créatrices, culturelles et sportives de qualité pour toutes et tous les jeunes, et en particulier pour celles et ceux qui n’ont pas les moyens de pratiquer l’équitation, le golf et le piano.

Dans nos lycées, l’horaire continu est la règle, mais le sacro-saint mercredi après-midi de congé doit être sacrifié dans cette configuration. Les pauses de midi sont très courtes et les cours se terminent généralement assez tôt dans l’après-midi.

Une éventuelle suppression du mercredi après-midi de congé à l’école obligatoire pourrait aussi avoir des conséquences négatives sur beaucoup d’activités de loisirs qui y trouvent traditionnellement une place privilégiée.

N’oublions pas non plus que l’horaire continu coute cher aux familles, un surplus financier dû aux très nombreux repas de midi pris à l’extérieur. La solution cantine ne pourra être mise en place partout, et elle s’avère très souvent onéreuse pour les familles qui ont plusieurs enfants scolarisé·es. Mais si les parents travaillent plus grâce à l’horaire continu, il y aura plus d’argent dans les familles pour couvrir ces nouvelles dépenses !

L’horaire continu, qui ressort d’une américanisation de plus en plus prégnante de nos modes de vie et qui touche également notre organisation scolaire, est probablement appelé à s’imposer dans nos contrées comme ailleurs. Mais sans moyens suffisants, son introduction ne ferait que renforcer les inégalités entre élèves.

Notre canton, connu pour sa pingrerie en matière scolaire, est-il prêt à investir pour réussir la transition sociétale que constituerait l’horaire continu à l’école obligatoire?

Ou les projets-pilotes annoncés relèvent-ils d’une communication institutionnelle et politique bien rôdée et professionnelle qui vise avant tout à soigner et à moderniser l’image du département de l’éducation ?

Publié le
ven 23/10/2020 - 09:48