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La question des devoirs vue du Québec

Soumis par Pierre Graber le 26 mars 2010

Un rapport «Pour soutenir une réflexion sur les devoirs à l’école primaire» vient d’être publié au Québec.

C’est un document très fouillé et intéressant (plus de 100 pages).  Voici sa conclusion :

«La société et la famille ont changé au cours des dernières décennies. La participation massive des deux parents, ou du parent seul, au marché du travail, la forte croissance du recours à des services de garde après la classe, les transformations familiales telles que séparation, monoparentalité et recomposition créent un contexte qui rend souvent difficile la réalisation des devoirs à la maison. Ces difficultés sont considérablement accrues quand, par exemple, l’enfant a des problèmes d’apprentissage, ou que ses parents ne maîtrisent pas encore le français ou qu’ils se sentent étrangers à la culture scolaire. Il s’ensuit que les élèves ne sont pas touségaux devant les devoirs : tous ne bénéficient pas des conditions leur permettant d’en tirer profit. Les devoirs sont alors source de stress et de tensions familiales, en plus de contribuer parfois à une attitude négative face à l’école qui peut avoir une incidence sur la persévérance scolaire.

Pourtant, beaucoup de parents et d’enseignantes et d’enseignants tiennent aux devoirs. Même si leur effet sur la réussite scolaire au primaire n’a pas été démontré, même si leur influence sur l ’ acquisition de bonnes méthodes de travail est peu documentée, ils établissent un lien régulier entre l’école et la famille et sont une façon de concrétiser la participation des parents au suivi scolaire de leur enfant. Or cette participation est un facteur important de la réussite scolaire.

De l’avis du Conseil, les devoirs ont leurs avantages et leurs inconvénients, et l’opportunité d’en donner ou non ne saurait découler d’une position idéologique in abstracto. La question des devoirs doit être examinée en contexte, en tenant compte de la réalité des élèves et des familles et en s’attachant aux enjeux d’équité qu’elle soulève, de manière à favoriser la réussite de tous et de toutes. Elle doit aussi s’inscrire dans une réflexion pédagogique : les devoirs sont un outil parmi d’autres à la disposition du personnel enseignant et, si on y recourt, ils doivent être pertinents compte tenu des objectifs poursuivis et cohérents avec le projet pédagogique plus large.

Le Conseil invite les écoles et leurs partenaires à mettre au jeu la question des devoirs et à mener une réflexion collective ancrée dans la réalité du milieu social, une réflexion qui permettra de prendre des décisions éclairées. Pour qu’elle bénéficie d’une certaine pérennité et pour qu’elle soit plus facilement partagée, cette réflexion devrait, selon le Conseil, se traduire en orientations consignées dans la documentation officielle de l’école. Différents moyens doivent par ailleurs être mis en œuvre par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, par les commissions scolaires et par les milieux de la formation et de la recherche pour faciliter la réflexion des écoles. En dépit de l’importance de la démarche collective préconisée et de la cohérence institutionnelle qu’elle doit induire, le Conseil souligne toutefois que les décisions de donner ou pas des devoirs, de donner tel type de devoirs dans telle circonstance ou de recourir plutôt à d’autres moyens relèvent ultimement de l’enseignante et l’enseignant.
L’accompagnement scolaire et l’aide aux devoirs doivent faire partie de la réflexion des écoles. Celles-ci doivent veiller à mettre en place des mesures pour aider les enfants quand les parents ne peuvent pas donner le soutien approprié. Beaucoup d’écoles offrent déjà une telle aide, mais le Conseil croit qu’il faut en accroître l’accessibilité et en assurer la stabilité. Il faut aussi préciser les objectifs de l’aide de manière qu’elle ne soit pas un substitut aux activités de récupération qui doivent être offertes par le personnel enseignant ou aux services d’adaptation scolaire prévus pour les enfants ayant des difficultés d’apprentissage. Une fois ces précisions apportées sur les objectifs de l’accompagnement scolaire et de l’aide aux devoirs, il devient clair que ces activités de soutien ne requièrent pas la contribution d’une ou d’un spécialiste; pour aider l’enfant, il suffit d’une personne qui, à l’instar du parent, est intéressée à sa réussite éducative.

La réflexion sur les devoirs, comme l’organisation des services d’accompagnement scolaire et d’aide aux devoirs, doit tabler sur la concertation entre les différentes parties prenantes, dans le respect des rôles et des responsabilités de chacune. Les parents, le personnel enseignant, les services de garde en milieu scolaire, les autres membres de l’équipe-école et les organismes communautaires doivent être interpellés à différentes étapes du processus. Aux yeux du Conseil, il incombe aux directions d’école d’exercer leur leadership pour tisser des liens entre les parties prenantes et favoriser la concertation entre elles.
Des liens doivent également être tissés et entretenus à une échelle plus quotidienne. Le Conseil invite les enseignantes et les einseignants à favoriser chez les parents de leurs élèves une meilleure compréhension de leur rôle dans le suivi scolaire de l’enfant et à entretenir avec eux une communication régulière sur les devoirs ou sur les autres moyens utilisés pour renforcer les apprentissages. Quand un élève fréquente un service d’accompagnement scolaire et d’aide aux devoirs, il faut aussi veiller à assurer une bonne communication entre l’intervenante ou l’intervenant qui assure l’aide, le parent et l’enseignante ou l’enseignant, de manière que chacun puisse jouer au mieux son rôle auprès de l’enfant. En faisant de l’accompagnement scolaire et de l’aide aux devoirs l’occasion d’une meilleure collaboration entre l’école, la famille et la communauté, on favorisera la continuité de l’expérience éducative de l’enfant et, ultimement, sa réussite scolaire.»

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