Introduit en 2014 dans l’école neuchâteloise, le système à deux niveaux au cycle 3 montre de plus en plus d’effets pervers, que l’on ressent déjà dès la 7e. Sitôt entamée la seconde moitié du cycle 2, de nombreux parents, dans un souci légitime d’assurer l’avenir professionnel de leurs enfants, s’inquiètent des résultats obtenus et sont prêts à tout pour les faire accéder au niveau 21. La course aux «bonnes notes», jusque-là réservée au cycle 3, apparait de plus en plus tôt et exerce une forte pression, avec toutes ses conséquences néfastes sur les élèves et les enseignant·es de la fin de l’école primaire.
Si la réforme est basée sur la volonté louable de supprimer les effets négatifs de l’étiquette «préprof» sur des élèves parfois en difficulté, force est de constater que le maintien de deux niveaux au lieu d’une filière unique ne permet pas aux élèves de progresser sereinement, à leur rythme. Le niveau 1 reste, tout comme l’était la classe de «préprof», une stigmatisation à éviter à tout prix.
On oublie souvent que la première orientation dans les niveaux au cycle 3 se fait sur la base des notes de fin de 8e: ce sont donc les élèves et leurs enseignant·es dans ce demi-cycle qui subissent les premières pressions exercées dans l’évaluation des deux branches principales, dans l’espoir d’atteindre le niveau 2. Les parents soucieux sont tentés de tout mettre en œuvre pour assurer à leur enfant l’accès à des études, oubliant par là qu’un bachelor ou un master ne garantit ni un emploi ni l’épanouissement dans la vie professionnelle et personnelle. Les devoirs sont parfois un prétexte pour certains parents, un moyen d’aider leur enfant à atteindre le niveau supérieur. Ils exigent des objectifs précis et interprètent le Plan d’études romand en sollicitant le corps enseignant à tout prix. L’égalité des chances se heurte à la demande compréhensible des parents en mesure d’aider leur enfant à accéder à ce qui est devenu le but ultime, le fameux niveau 2. Mais est-ce vraiment leur rôle?
Il est temps de choisir l’école que nous voulons pour nos enfants. Faut-il céder à la dérive vers un système qui glorifie la réussite scolaire et entraine la multiplication de cours de soutien privés, poussant les enfants au-delà de leurs limites et les privant d’une adolescence épanouie? Ou faut-il se battre pour une école permettant à chaque enfant de progresser à son rythme dans des classes hétérogènes sans subir dès la préadolescence le spectre d’une orientation qui pourrait leur fermer à jamais des portes? À l’instar de certains pays nordiques, mon choix est fait!
1 français et maths sont les deux branches à niveaux de la 9e année